FootballDaniel Follonier, la vie hors du circuit
«Quand je regarde les autres, ça paraît si facile.» Après sept ans de professionnalisme en Suisse, le Valaisan s’est retrouvé éjecté du milieu. Il attend la suite, reconversion ou coup de fil salutaire, à Cham. En Promotion League.
- par
- Florian Vaney
La sono de la buvette de l’Eizmoos crache ses décibels bien trop fort pour une ambiance d’avant-match. Daniel Follonier entend quand même son téléphone sonner. «C’est IKEA!» Il décroche, se réjouit de sa commande imminente puis range l’appareil dans sa poche. «Vous ne pouvez pas savoir le bien que ça me fait de monter des meubles en ce moment. Cham s’entraîne à 18h15. Les journées peuvent être longues d’ici-là. Alors comme on vient d’emménager avec ma copine…»
Le ton de Daniel Follonier n’est pas résigné. Il oscille. L’abattement n’est jamais totalement absent, mais l’espoir ponctue chaque intervention. Ça vaut pour sa situation actuelle, ses opportunités manquées, cette reconversion qui approche. À 28 ans seulement.
Le football a pris congé de lui
Le Valaisan a été éjecté du circuit. L’expression peut faire mal à entendre, mais l’homme a appris l’importance de regarder la situation en face. Sept ans de professionnalisme, à rouler sa bosse entre la Super et la Challenge League, pour finir par attendre un coup de fil pendant des heures, des jours, des mois depuis l’été dernier. «Je pensais me laisser encore un peu de temps. Je me suis toujours dit que ce n’est pas le foot qui prendrait congé de moi, mais l’inverse.»
Puis est arrivée en début d’année cette offre du SC Cham, club de milieu de classement de Promotion League. À mi-chemin entre le coup de poignard et l’opportunité en or. À nos collègues de Rhône FM, l’homme avouait en avoir pleuré pendant trois jours. «C’est vrai. Le jour où j’ai signé mon contrat, je me suis effondré en rentrant.» Les jambes trop fragiles pour supporter le vertige qui se présentait.
Rattrapé par le passé
«Je ne viens pas vraiment d’une famille où les études sont un débouché. Ma mère est arrivée du Portugal à 20 ans, elle a toujours travaillé, m’a élevé seule. Depuis mes 15 ans, je ne fais que du foot. Heureusement que ça a marché pour moi là-dedans. Ou… malheureusement.» L’aveu éparpille ses regrets. Ceux de ne pas avoir couvert ses arrières plus tôt. Donc de devoir considérer une proposition d’un club de troisième division comme idéale.
Fiche personnelle
Prénom: Daniel
Nom: Follonier
Poste: Milieu de couloir ou offensif
Âge: 28 ans (18 janvier 1994)
Ville d’origine: Sierre
Début en pro: Le 18 mai 2014 avec le FC Sion (victoire 3-1 face à Grasshopper, il inscrit le dernier but)
Parcours: Après Sion suivent Lucerne, Servette, puis Kriens. Pour un total de 66 matches de Super League (10 buts) et 69 matches de Challenge League (9 buts). Il a rejoint le SC Cham, en Promotion League, en février dernier.
Ce n’est pas avec Cham que Daniel Follonier retrouvera la Ligue nationale. Les Zougois ont les moyens de se bâtir une jolie équipe, sans être animés d’une réelle ambition de grandeur. Par contre, dans le contrat de l’ancien joueur de Sion et Servette, il y a tout le reste. Une clause pour le libérer sans discussion possible à la première équipe de Challenge League qui viendrait toquer à la porte. «J’en rêve encore. Mais si le cas de figure se présente, il faudra prendre le temps de bien réfléchir.»
Parce que, en noir sur blanc, le SCC s’est aussi engagé à trouver à son nouvel ailier la formation de son choix, et de la lui financer. Pour un nouveau départ, pas loin d’être définitif. «Dans la région, à part l’EV Zoug en hockey, il n’y a pas vraiment d’immenses clubs. Alors Cham peut s’appuyer sur beaucoup de sponsors, de contacts. Les dirigeants sauront m’aiguiller au bon endroit. Il reste juste à me décider.»
La voie à suivre pourrait être celle de la physiothérapie, comme son pote Kevin Fickentscher. Ou alors celle de prof de sport, voire dans le commerce. Beaucoup d’idées, de chemins à explorer, mais toujours ce flou actuel. Et cette sensation que tout aurait dû être plus simple. Parce qu’être éjecté du circuit, en fin de compte, ce n’est qu’un résultat. Précédé de tout ce qui y a participé.
Délit d’attitude
«C’est drôle, mais quand j’observe les autres, ça paraît si facile. Ils trouvent un club, le contrat s’arrête, ils signent ailleurs. Et ainsi de suite. Personnellement, j’avais la possibilité de rebondir en D2 polonaise. C’est tout. Le genre de pari risqué, où tu ne sais jamais trop quand le salaire va tomber. Et puis même, si ça devait bien se passer: j’y jouais trois ans et, en 2025, retour au point de départ…»
Daniel Follonier ne connaît aussi que trop bien l’un de ses principaux défauts. «Parfois, je me vois à la vidéo et ça saute aux yeux: j’ai l’air nonchalant. Je ne pense pas l’être, mais les apparences sont claires. Dans des pays où la jouerie est valorisée, ce n’est pas un drame. Mais en Suisse, où la culture de l’effort et de la souffrance est capitale, ça ne passe pas.»
Alors parfois, le Valaisan remue le couteau de la plaie. Il repense à cette conversation avec Barthélémy Constantin, le directeur sportif du FC Sion. «Il m’a avoué que l’Eintracht Francfort s’était intéressé à moi. En 2015, après notre victoire en Coupe de Suisse face à Bâle. Peut-être qu’en étant mieux conseillé à ce moment-là…» Peut-être, oui, qu’une carrière ne tient qu’à un fil. Et que la terminer dans les divisions inférieures peut aussi livrer son quota d’émotions.