FootballPour l’instant, Servette n’a pas besoin de tout maîtriser pour s’attirer le succès
La victoire 3-2 à la 95e minute contre Zurich laisse transpirer une réussite presque insolente. Mais force est d’admettre qu’elle sait la forcer.
- par
- Valentin Schnorhk Genève
Il y a une forme d’euphorie à la Praille. En étant capable de faire basculer du bon côté un match pas forcément maîtrisé contre Zurich, Servette laisse transpirer une certaine confiance qui se nourrit de ses victoires. Le 3-2 de dimanche et ce but de David Douline à la 95e minute sont à l’image d’une équipe qui ne se pose plus trop de questions.
Et notamment sur la manière. Après un début de saison très minimaliste, les Grenat semblent avoir l’envie d’être plus joueurs depuis quelques semaines. Mais la quête de l’équilibre résulte encore en quelque chose d’assez bancal. Pourtant, en termes de points, Servette réalise un premier tour excellent. Et il lui reste encore un match (à Lugano) pour qu’il soit un record pour les Genevois.
Les trois enseignements
Doit-on parler de réussite? Après 8 journées, Servette est 2e mais avec autant de points que Young Boys. La domination est moins clinquante, mais il est indéniable que les Grenat savent provoquer leur destin. Leur victoire contre Zurich est-elle logique? Pas forcément. Elle n’est pas très belle non plus, mais ils ont su aller la chercher, ne serait-ce qu’en faisant entrer toutes leurs forces offensives en fin de match.
Pour Servette, la décision fut laborieuse. Elle a mis du temps à venir, surtout lorsqu’il a été en supériorité numérique. Un constat: il y a des progrès à faire avec le ballon. Les Grenat ne semblaient pas prêts à déstabiliser un bloc bas lors des vingt dernières minutes. Le trio défensif Vouilloz-Séverin-Douline a souvent peiné à donner les impulsions nécessaires pour fixer le bloc zurichois et ouvrir des espaces pour leurs partenaires. Heureusement, Enzo Crivelli a fini par trouver une position de frappe, pour obtenir le corner décisif. Reste qu’il faudra s’y employer, surtout si le SFC continue à jouer les premiers rôles.
On s’en doutait déjà, mais Zurich n’a pas le profil d’un 9e de Super League, avec deux points dans ses bagages. Dimanche, le Congolais Jonathan Okita a su démontrer ses qualités de vivacité et de déplacement dans une équipe qui a retrouvé ses habiletés à la récupération du ballon. En fait, le FCZ a très souvent mis en exergue les inhabituels manques de repères servettiens, notamment en termes de structure sans ballon.
Le meilleur Servettien: Timothé Cognat
Un mot déjà, sur le côté le plus préoccupant: Timothé Cognat a senti une gêne à la cuisse à l’heure de jeu et a préféré ne pas prendre de risque. D’où sa sortie prématurée, selon Alain Geiger. Sa chance, c’est qu’avec la Coupe le week-end prochain (déplacement à La Chaux-de-Fonds) et la trêve internationale, Servette ne rejouera pas en Super League avant le 2 octobre à Lugano.
Il faudra pouvoir compter sur ce Cognat. Le Français aura marqué et donné une passe décisive à Bauer dimanche. Il aura aussi plusieurs pris sa chance et tenté d’être actif sur les deuxièmes ballons offensifs. Il aura ainsi livré une heure pleine d’activité, qui est indispensable à un Servette proactif.
Le plus décevant (durant 94 minutes): David Douline
Naturellement, on ne peut pas occulter cette tête décisive de la 95e minute. Mais elle ne permet pas d’oublier le match qui l’a précédé. Excellent depuis le début de saison, David Douline le reconnaît lui-même: il n’a pas été parfait contre Zurich.
Ce qu’on peut lui reprocher: un filtrage moindre à mi-terrain, à l’image du deuxième but zurichois, où il se fait dribbler par Okita. Son positionnement lorsque Servette a le ballon est aussi essentiel pour couvrir une éventuelle perte de balle, et il a été moins pertinent dans ce secteur. Et puis, surtout, lorsque les Grenat ont dû penser à attaquer et à faire circuler le ballon pour faire craquer le bloc zurichois en fin de match, il s’est illustré par plusieurs mauvaises passes. Ce registre-là lui correspond moins.
La décla’
Le fait tactique
C’est un but qui en raconte d’autres. C’est une action qui met en exergue le besoin qu’a Servette d’être mobile, de sortir de son positionnement de base. Surtout lorsqu’il évolue avec Ronny Rodelin en pointe. Le Français l’a déjà dit et son entraîneur Alain Geiger le reconnaît: ce n’est pas une vraie pointe. Rodelin a besoin de liberté et vit de ses dézonages.
Sur le 1-0 de Timothé Cognat, Rodelin se déporte sur la droite, où il combine magnifiquement avec Stevanovic, en position idéale pour centrer. Mais cela suggère pour ses coéquipiers d’investir l’axe, d’être présents dans la surface. Contre GC, il y a deux semaines, Antunes était à la retombée. Cette fois, c’est Cognat qui s’est projeté en sprint dans la surface zurichoise pour terminer l’action.
Sans ces courses-là, qu’elles viennent du Français, d’Antunes, de Stevanovic ou encore Pflücke, le projet «Rodelin en 9» ne tient pas. Même si on peut imaginer que lorsque Enzo Crivelli sera aligné dans cette position, cela changera quelque peu, lui qui a plus un profil d’attaquant axial.
La statistique
0,75 Expected Goals, soit le total concédé par Zurich contre Servette. Pourtant, le FCZ a encaissé trois buts. C’est une constante en ce début de saison: l’équipe de Franco Foda sous-performe totalement en la matière. Pourquoi? Sans doute parce qu’elle ne se protège pas très bien défensivement. À l’image d’un Yannik Brecher surpris sur son premier poteau sur une frappe (certes bien placée et puissante) de Bauer (pour le 2-1) ou d’un placement négligé sur le corner décisif.
Une question pour penser l’avenir
Servette est-il prêt à assumer ce rôle d’épouvantail qui lui tombe désormais dessus?