NeuchâtelLes cloches passent mal la nuit
Les citoyens de St-Blaise diront s’ils veulent mettre le temple en sourdine pendant leur sommeil.
- par
- Vincent Donzé
Faut-il sonner les cloches la nuit? À St-Blaise, au bord du lac de Neuchâtel, la commune invite la population à en débattre lors d’un atelier participatif, le 21 octobre prochain. Un petit tour au kiosque situé face au temple permet de prendre la température: «Les cloches empêchent de dormir ceux qui habitent près du temple», assène une cliente sans être contredite.
Pendant la rénovation du temple, clocher compris, les trois cloches sont muettes. Auparavant, ces vestiges de 1766, de 1843 et de 1859 sonnaient tous les quarts d’heure, de jour comme de nuit.
Confronter les opinions
En participant sur inscription à l’atelier du 21 octobre à 9 heures, à l’auditoire des collèges de Vigner, les citoyens pourront exprimer leur ressenti, confronter leurs opinions et chercher un compromis. La proposition élaborée sera remise au Conseil communal. «Nous pourrons ensuite nous appuyer sur cet atelier pour justifier le futur régime de sonneries», a indiqué à «ArcInfo» le conseiller communal Marc Renaud.
Pendant la restauration du temple, les autorités ont reçu différents avis par courriers. Pour les uns, l’absence de sonneries était ressentie comme un manque et pour les autres, comme un soulagement. Marc Renaud a constaté que le tintement des cloches pouvait être vécu la nuit comme «une nuisance sonore intense».
Donner l’heure, mais…
À Douanne, village viticole du bord du lac de Bienne, le Conseil communal a opté pour des nuits silencieuses. C’était il y a six ans et personne ne s’est plaint de ne plus entendre les cloches.
«Ces carillons ont pour fonction de donner l’heure, mais tous les citoyens possèdent une montre ou un smartphone», relevait le président d’une paroisse qui se contente désormais d’un carillon le dimanche, une première fois à 9 h 30 pour cinq minutes, puis à 10 h pour un quart d’heure, au début du culte.
Contre les troubles
Dans le canton de Vaud, une députée popiste a interrogé le Conseil d’État sur une possible réduction de la durée de sonnerie des cloches d’église. Le souci de la députée Céline Misiego, c’est de lutter contre les troubles du sommeil et la réduction des capacités d’apprentissage.
Les émissions sonores sont soumises à la législation fédérale en matière de lutte contre le bruit nuisible et incommodant, mais le Conseil fédéral n’a pas fixé de valeurs limites. Le Conseil d’État vaudois a dirigé Céline Misiego vers les communes, compétentes pour la réglementation du fonctionnement des cloches.
Une longue tradition
Faut-il jeter la tradition au panier et renoncer aux cloches qui sonnent tous les quarts d’heure la nuit? Pour le Conseil d’État vaudois, «le poids des traditions culturelles et du message spirituel véhiculé interdit que l’on amalgame sans détour le tintement à une nuisance sonore».
Dans un arrêt rendu en 2017, le Tribunal fédéral a considéré que «le tintement régulier s’inscrit dans une longue tradition qui jouit d’une acceptation large de la part de la population». Ce n’est pourtant que depuis leur automatisation que les cloches sonnent la nuit. Auparavant, celui qui tirait sur la corde allait aussi se coucher…
Interrompre l’alimentation
À chacun sa méthode: à Wäldi (TG), un citoyen malicieux a caché une minuterie dans les poutres du toit de l’église du village pour interrompre l’alimentation électrique du mécanisme de sonnerie. À Kirchberg (SG) des citoyens s’étaient plaints non pas du volume, mais du timbre strident des cloches.
Rendre les cloches moins bruyantes, c’est aussi possible en utilisant du matériel d’isolation pour atténuer le bruit des carillons. À Liebefeld (BE), l’Église évangélique a été la première à placer des contrepoids sur les poutres pour ralentir le rythme du balancier.