Moyen-Orient: Risques de torture et de mort: des ONG alertent sur le sort de détenus en Iran

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Moyen-OrientRisques de torture et de mort: des ONG alertent sur le sort de détenus en Iran

Des militants iraniens arrêtés dans le cadre de la répression des manifestations ont des contacts limités avec l’extérieur et risquent d’être torturés, voire de mourir en détention.

Une chambre de la prison d’Evine à Téhéran.

Une chambre de la prison d’Evine à Téhéran.

AFP

Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans, est décédée le 16 septembre, trois jours après son arrestation pour avoir violé, selon la police des mœurs, le drastique code vestimentaire en vigueur.

Ces derniers jours, des images choquantes de l’arrestation du défenseur de la liberté d’expression Hossein Ronaghi ont émergé, le montrant immobilisé par une prise d’étranglement et emmené de force alors qu’il se présentait au bureau des procureurs en septembre.

Depuis son arrestation le 24 septembre, ce critique acharné de la République islamique, contributeur du «Wall Street Journal», est détenu à la prison d’Evine à Téhéran. Selon sa famille, il souffre de fractures aux deux jambes et risque de mourir en détention à cause de problèmes rénaux.

Après l’incendie qui s’est déclaré dans la prison le 15 octobre, Hossein Ronaghi a «brièvement appelé sa mère mais arrivait à peine à parler à cause de son état de santé dégradé», a écrit son frère Hassan Ronaghi sur Twitter. «La vie de Hossein est en danger», a-t-il tweeté mercredi.

«Risque de torture»

Comme lui, des militants des droits humains de premier plan, des journalistes et des avocats ont été arrêtés et leurs soutiens craignent qu’ils ne ressortent pas en vie de la prison d’Evine, où la plupart des prisonniers politiques sont détenus, selon des ONG.

L’incendie de la prison, qui a fait huit morts selon les autorités, n’a fait qu’amplifier les inquiétudes pour leur état de santé. Des militants ont accusé les autorités d’avoir lancé des gaz lacrymogènes et tiré des billes d’acier dans la prison.

«Les détenus, souvent victimes de disparitions forcées, courent un grave risque d’être torturés et de mourir. Une action urgente de la communauté internationale est cruciale à ce stade», plaide Mahmood Amiry-Moghaddam, directeur d’Iran Human Rights (IHR).

Selon cette ONG basée à Oslo, des milliers de personnes ont été arrêtées dans le pays pendant la répression, dont au moins 36 journalistes, 170 étudiants, 14 avocats et plus de 580 militants de la société civile, notamment des ouvriers et des responsables de syndicats d’enseignants.

Roya Boroumand, directrice de l’Abdorrahman Boroumand Center, une ONG basée à Washington, a affirmé à l’AFP que la situation s’était aggravée avec l’afflux de nouveaux prisonniers incarcérés à Evine et à la prison de Fashafouyeh. «Nous sommes très inquiets» pour les prisonniers qui «n’ont pas d’autre choix que de rester assis ou dormir à tour de rôle, à cause du manque de place», selon elle.

«Penser: un crime?»

Selon des analystes, les arrestations de masse sont l’une des principales stratégies des autorités sous la houlette de l’ayatollah Ali Khamenei, pour combattre les manifestations qui représentent l’un des plus grands défis pour le pouvoir en place depuis la Révolution islamique de 1979.

Amnesty International a appelé cette semaine à des contrôles indépendants «pour protéger les prisonniers de davantage d’exécutions illégales, de tortures et de mauvais traitements».

Le militant Majid Tavakoli, emprisonné à plusieurs reprises, notamment après des élections contestées en 2009, reste détenu depuis son arrestation le 23 septembre.

Sa famille indique n’avoir plus de nouvelles de lui depuis l’incendie à Evine. «Pourquoi une personne dont le seul outil est son cerveau ne peut pas être libre? Penser, est-ce un crime?» s’est interrogée son épouse sur Twitter.

«Sévèrement battus»

Arash Sadeghi, libéré en mai après plusieurs années de prison et souffrant de chondrosarcome, un rare type de cancer des os, a été de nouveau emprisonné à Evine le 12 octobre. Son père a partagé sur Twitter une photo d’une dizaine de boîtes de médicaments dont il a besoin. «Vous pouvez emprisonner son corps mais son âme est toujours avec le peuple», a-t-il dit.

IHR a exprimé son inquiétude sur le cas de militants détenus au secret, parmi lesquels le journaliste et défenseur des droits humains Golrokh Iraee et le célèbre blogueur spécialisé en nouvelles technologies Amir Emand Mirmirani. Selon IHR, certains détenus ont fait des «aveux télévisés, sous la contrainte et la torture».

Des prisonniers ont «attesté avoir été sévèrement battus, torturés pendant les interrogatoires et privés de nourriture et d’eau potable», a déclaré Roya Boroumand. «Les détenus restent avec des plombs de fusils et des membres brisés, sans soins médicaux.»

(AFP)

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