L’ancien ministre veut faire sauter le mur

Actualisé

JuraL’ancien ministre veut faire sauter le mur

Après avoir négocié la dépollution d’une ancienne décharge industrielle à Bonfol, Pierre Kohler s’oppose au maintien d’un mur de 200 mètres pour un projet artistique.

Vincent Donzé
par
Vincent Donzé
À Bonfol, le débat porte sur le maintien d’un mur de 200 mètres de long et de douze mètres de haut, vestige d’une dépollution.

À Bonfol, le débat porte sur le maintien d’un mur de 200 mètres de long et de douze mètres de haut, vestige d’une dépollution.

lematin.ch/Vincent Donzé

Clap de fin pour Mario Botta: la star tessinoise de l’architecture ne réalisera pas un mémorial à 8,8 millions sur l’ancienne décharge industrielle de Bonfol (JU), fermée en 1976 et assainie aux frais de la chimie bâloise pour 480 millions. Et maintenant? La fondation «Mémoire Art et Forêt – Bonfol» présentera mercredi prochain un nouveau projet de revalorisation établi par l’entrepreneur Gauthier Corbat, l’architecte Sylvain Dubail et l’artiste Augustin Rebetez. Sauf que…

Sauf que l’ancien ministre jurassien de l’Environnement Pierre Kohler et l’ancien directeur de l’Office fédéral de l’Environnement, des forêts et du paysage Philippe Roch ont exprimé leur désaccord. «Fin 1998, nous avons décidé ensemble de demander aux entreprises de la chimie bâloise d’assainir la décharge industrielle de Bonfol, l’un des sites les plus pollués de Suisse et cela aux frais des entreprises ayant déposé ces déchets de 1961 à 1976», indiquent d’emblée les deux signataires.

«Sans les contribuables»

Une décision formelle d’assainissement a été prise par le gouvernement jurassien, avec le soutien de la Confédération. C’était en janvier 2000. Ensuite? «Aujourd’hui le site a été assaini sans que les contribuables aient été mis à contribution», indiquent Pierre Kohler et Philippe Roch.

Problème à leurs yeux: il reste «encore malheureusement quelques vestiges sur place et notamment un mur construit pour procéder à l’assainissement». Faut-il maintenir ce mur pour réaliser un projet artistique? Pierre Kohler et Philippe Roch pensent que non: «Il n’est pas judicieux de dépenser encore des fonds publics et privés pour maintenir ces vestiges de béton».

Meilleur escient

«Nous demandons que l’argent soit utilisé à meilleur escient et que le site de la décharge de Bonfol soit totalement rendu à la nature, à la charge de la chimie bâloise, au bénéfice de la population et des visiteurs toujours plus en quête de biodiversité», indiquent l’ancien ministre cantonal et l’ancien fonctionnaire fédéral, selon qui «un retour à l’état naturel représente le plus bel hommage».

À Bonfol, le maire ne met pas la charrue avant les bœufs: «Après avoir soutenu le premier projet, les autorités souhaitent donner une chance au second», indique Fernand Gasser. Le maire apprécie le projet porté par l’artiste Augustin Rebetez, souvent décrit comme «enchanteur» et «magicien», dans un univers tribal «oscillant entre le rêve et le cauchemar, le léger et le grave»: «Il est beau, ce projet!» promet Fernand Gasser.

Le mur maintenu dans un nouveau projet est l’unique vestige de l’énorme halle d’excavation des déchets déconstruite après 16 ans de fonctionnement, en 2016.

Le mur maintenu dans un nouveau projet est l’unique vestige de l’énorme halle d’excavation des déchets déconstruite après 16 ans de fonctionnement, en 2016.

lematin.ch/Vincent Donzé

La prochaine étape s’avère cruciale: l’assemblée communale extraordinaire se prononcera sur le nouveau projet culturel présenté par la fondation «Mémoire Art et Forêt – Bonfol», désireuse d’«ouvrir la réflexion sur notre impact écologique à travers le temps» et de «permettre la contemplation d’une nature résiliente».

Le mur de la discorde se dresse au milieu d’une clairière. C’est tout ce qu’il reste d’une halle hermétique construite pour extraire quotidiennement 160 tonnes de déchets toxiques et de terres contaminées, avant leur élimination dans des fours allemands et belges à 1200 degrés.

Ton opinion

5 commentaires