AfghanistanÀ Herat, les talibans privent les femmes du droit de conduire
Les moniteurs d’auto-école de la plus progressiste des villes afghanes ont reçu pour instruction de ne plus délivrer de permis à leurs élèves conductrices.

Pour les responsables talibans de Herat, les femmes n’ont pas leur place derrière le volant.
ReutersDes responsables talibans de Herat, la ville la plus progressiste d’Afghanistan, ont demandé aux moniteurs d’écoles de conduite de ne plus donner le permis aux élèves conductrices, indiquent des professionnels du secteur. «Nous avons verbalement reçu l’instruction de ne plus délivrer de permis de conduire aux femmes… mais nous n’avons pas reçu l’instruction d’empêcher les femmes de conduire dans la ville», confirme Jan Agha Achakzai, directeur de l’Institut de gestion du trafic de Herat, qui supervise les auto-écoles.
L’Afghanistan est un pays profondément conservateur et patriarcal, mais il n’est pas rare que des femmes conduisent dans les grandes villes, notamment à Herat, dans le Nord-Ouest. Naim al-Haq Haqqani, qui dirige le département provincial de l’information et de la culture, assure qu’aucun ordre officiel n’a été donné. Les talibans se sont largement abstenus de publier des décrets nationaux écrits, laissant plutôt les autorités locales publier leurs propres édits, parfois verbalement.
«Je dois pouvoir emmener ma famille chez le médecin dans ma voiture sans attendre que mon frère ou mon mari rentre à la maison», plaide Shaima Wafa alors qu’elle se rend sur un marché local pour acheter des cadeaux pour sa famille à l’occasion de la fête de l’Aïd al-Fitr. «En fait, il est plus sûr pour une femme de conduire son propre véhicule», estime, pour sa part, Fereshteh Yaqoobi, une Afghane qui conduit depuis des années.
Plus en sécurité dans leur voiture que dans un taxi
Zainab Mohseni, 26 ans, a récemment demandé un permis car, selon elle, les femmes se sentent plus en sécurité dans leur propre voiture que dans les taxis conduits par des hommes. Pour la jeune femme, cette nouvelle mesure n’est qu’un signe de plus que le nouveau régime ne reculera devant rien pour empêcher les femmes afghanes de jouir des quelques droits qui leur restent.
Les insurgés devenus dirigeants ont repris le contrôle du pays en août dernier, promettant un régime plus souple que lors de leur dernier passage au pouvoir entre 1996 et 2001, marqué par des violations des droits de l’homme. Mais ils ont de plus en plus restreint les droits des Afghans, en particulier ceux des Afghanes, empêchées de retourner à l’école et d’occuper de nombreux emplois publics.