ÉthiopieAddis Abeba décrète une trêve humanitaire pour le Tigré
Le gouvernement éthiopien, en conflit avec les rebelles, vient de décréter un cessez-le-feu pour que l’aide parvienne dans cette région. La famine menace d’y toucher 4,6 millions de personnes.
Le gouvernement éthiopien a décrété, jeudi, une «trêve humanitaire illimitée» dans son conflit avec les rebelles du Tigré, pour permettre «la libre circulation de l’aide humanitaire vers ceux ayant besoin d’assistance» dans cette région de l’extrême-nord du pays, menacée de famine. La trêve est «effective immédiatement», indique le gouvernement du Premier ministre Abiy Ahmed, expliquant sa décision par «la nécessité de prendre des mesures extraordinaires pour sauver des vies et réduire la souffrance humaine».
Toutefois, «l’engagement pris par le gouvernement d’Éthiopie ne pourra avoir l’effet désiré d’améliorer la situation humanitaire sur le terrain que si l’autre partie en fait autant», poursuit-il, appelant les rebelles tigréens à «s’abstenir de tout nouvel acte d’agression et à se retirer des zones qu’ils occupent dans les régions voisines du Tigré». Les rebelles tigréens n’ont pas réagi dans l’immédiat.
Forces progouvernementales et rebelles du Tigré s’affrontent dans le nord de l’Ethiopie depuis qu’en novembre 2020, Abiy Ahmed, prix Nobel de la paix l’année précédente, a envoyé l’armée fédérale déloger les autorités de la région, gouvernée alors par le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), qui contestait son autorité depuis des mois.
83% des habitants en «insécurité alimentaire»
Rapidement défaites, les troupes rebelles du TPLF ont ensuite, courant 2021, repris militairement le Tigré, et le conflit s’est depuis propagé aux régions voisines de l’Amhara et de l’Afar. Les bientôt 17 mois de conflit, marqués par de multiples exactions, ont provoqué une grave crise humanitaire dans le nord de l’Éthiopie, où plus de neuf millions de personnes ont besoin d’aide alimentaire, selon le Programme alimentaire mondial (PAM) de l’ONU. Au Tigré, le PAM estimait, en janvier, que 4,6 millions de personnes, soit 83% des près de six millions d’habitants de la région, étaient en situation «d’insécurité alimentaire», tandis que deux millions souffraient d’une «pénurie extrême de nourriture».
Depuis mi-février, les opérations humanitaires au Tigré – où plus de 400’000 personnes ont été déplacées par le conflit – ont été quasiment interrompues par les pénuries de carburant et de liquidités, selon l’ONU. Aucun convoi d’aide n’a pu y entrer depuis le 15 décembre, en raison de combats dans la région de l’Afar, qui empêchent le passage des convois routiers sur la seule voie terrestre opérationnelle.
Un premier cessez-le-feu pour la saison des cultures
Le gouvernement éthiopien avait déjà décrété, le 28 juin, un cessez-le-feu unilatéral, au moment où les forces du TPLF entraient dans Mekele. Ce cessez-le-feu ne courait que «jusqu’à la fin de la saison des cultures», pour permettre aux agriculteurs de «cultiver paisiblement» et à «l’aide humanitaire d’être distribuée».
Les combats avaient ensuite repris, les rebelles du TPLF avançant en Amhara et en Afar, jusqu’à affirmer se trouver à 200 km d’Addis Abeba, la capitale du pays. Ils s’étaient repliés au Tigré fin décembre, à l’issue d’une contre-offensive de l’armée éthiopienne qui avait indiqué qu’elle n’entrerait pas dans la région.
Les rebelles du Tigré s’engagent à leur tour à un cessez-le-feu
Les rebelles de la région du Tigré, en conflit depuis 17 mois avec l’armée éthiopienne, se sont engagés vendredi à respecter un cessez-le-feu, quelques heures après l’annonce par le gouvernement éthiopien d’une «trêve humanitaire illimitée».
«Le gouvernement du Tigré s’engage à mettre en oeuvre une cessation des hostilités, effective immédiatement», indiquent les rebelles dans un communiqué publié vendredi matin, appelant le gouvernement éthiopien à «prendre des mesures concrètes pour faciliter l’accès sans restrictions au Tigré», région du nord de l’Éthiopie où la faim menace.