Hockey sur glaceJordane Hauert sur son retrait de maillot: «C’était très fort»
L’ancien capitaine ajoulot a vu son No 93 être retiré et placé sous le toit de la Raiffeisen Arena vendredi dernier. Une cérémonie qu’il a vécue avec émotion.
- par
- Julien Boegli
Le HC Ajoie s’y est mis. Enfin, diront certains. Le club de Porrentruy a (longuement) honoré l’un de ses anciens joueurs, vendredi passé, en retirant son numéro. Le premier est donc le 93, porté durant plus de deux décennies par Jordane Hauert. Fils du président Patrick, le défenseur a mis un terme à sa carrière le printemps dernier après la série de barrage contre la relégation face à La Chaux-de-Fonds.
Jordane Hauert, c’est – bien davantage que «le fils de» – avant tout 22 saisons en première équipe, dont 10 en tant que capitaine, 1042 matches disputés (115 buts et 462 assists), deux titres de champion de Swiss League (2016 et 2021), une Coupe de Suisse (2020) et «un but inoubliable», comme l’a rappelé le tifo réservé par le kop ajoulot vendredi un quart d’heure avant le coup d’envoi.
Ce but, son unique dans l’élite, c’est évidemment celui inscrit lors de l’acte III du barrage, à la 93e minute de la deuxième prolongation, qui a permis à son équipe, en grand danger de relégation, de renaître dans cette série. Ému, tendu aussi, Jordane Hauert s’est fendu d’un discours, accompagné de son épouse et de ses deux enfants, face aux tribunes de l’arène bruntrutaine et devant un banc sur lequel avaient pris place ses anciens coéquipiers. Il s’est confié après ses retrouvailles éphémères avec son public.
Jordane Hauert, ce public qui vous acclame, cette cérémonie… Comment avez-vous vécu ce moment?
Très honnêtement, en arrivant sur la glace, c’était émotionnellement très fort.
On vous a senti un peu tendu…
J’ai pu avoir l’air tendu, oui, en voyant certains de mes anciens coéquipiers sur le banc.
Vous êtes le premier joueur de l’histoire du club à voir son maillot retiré. Ça procure quoi ?
J’ai une grande reconnaissance envers le club de m’avoir offert cela, bien que je n’aie jamais vraiment aimé être mis en avant. Est-ce que je ressens de la fierté? Certainement un peu. Après, que je sois le premier ou le cinquième, ce que je retiens avant tout, c’est d’avoir pu contribuer à écrire l’histoire du club, à son sauvetage plus récemment. J’étais surtout ému de voir mes coéquipiers autant réceptifs quand je me suis tourné vers eux. C’était un peu particulier, j’avais l’impression de me retrouver en match. Et pour être franc, j’ai eu de la peine à sortir de la glace.
Dites-nous, ça vous manque le hockey?
Vous savez, j’ai quand même 37 ans, deux enfants et une vie professionnelle bien chargée. Et puis le corps qui me donne encore passablement de douleurs. Au vu de la vitesse où ça patine cette année, sachant que je n’étais pas un joueur rapide, je pense que c’était la bonne décision de laisser ma place. Ce qui me manque surtout, c’est l’ambiance du vestiaire, cette adrénaline et les rencontres que l’on fait. C’est un ascenseur émotionnel que l’on vit chaque saison, à Ajoie peut-être plus qu’ailleurs.
Quel regard portez-vous sur la saison du HCA, la première de l’ère post-Hauert?
Je dirais qu’au niveau du jeu proposé, il n’y a pas grand-chose à reprocher. Les gars jouent bien, mouillent le maillot, il y a une réelle envie de bien faire. En termes de système de jeu, défensivement, l’équipe est vraiment bien. Elle n’est pas mauvaise non plus dans les situations spéciales. Il lui manque peut-être un peu de réussite à 5 contre 5. Il y a un palier à franchir à ce niveau-là. Je pense que si elle avait 15 points de plus à l’heure actuelle, personne n’aurait rien à redire.
Vous évoquez cet ascenseur émotionnel. Quelle est l’image la plus forte que vous retenez de votre carrière?
Sans doute le dernier match à La Chaux-de-Fonds (ndlr: acte VI du barrage, victoire d’Ajoie 2-3 grâce à deux buts inscrits dans les trois dernières minutes). L’entraîneur assistant, Petteri Nummelin, me demande d’aller sur la glace. À ce moment-là, on perd 2-1. Je refuse, je lui dis que je préfère prier. On marque le 2-2 dans l’enchaînement. Bon, c’est un pur hasard, hein, je ne suis pas croyant à ce point. On était alors dans un tel état de fatigue et d’anxiété… Il me regarde et me redemande d’aller sur la glace. Je refuse à nouveau, je lui dis que je préfère continuer de prier. On marque le 3-2. On se regarde à nouveau et on ne comprend pas vraiment ce qu’il se passe. Evidemment, j’ai beaucoup d’autres moments que je pourrais vous énumérer pendant des heures. C’était ça le hockey, quelque chose de magnifique.
Pendant la cérémonie, on a pu voir que votre père, présent sur la glace avec le comité directeur, était également ému aux larmes…
Je ne peux que le remercier et le féliciter également. Voir où il a amené le club aujourd’hui, ce qu’il a accompli depuis le temps, je ne peux qu’être admiratif. C’est un travailleur hors pair qui possède une force de caractère exceptionnelle. Pour ma part, je vous dirais que cela n’a jamais été facile d’être le fils du président. J’ai toujours voulu en faire plus, pour ma conscience, pour ne pas que l’on ait quelque chose à me reprocher.