CommercePresque tout l’or du monde passe par la Suisse
Dans une nouvelle étude, le WWF révèle que jusqu’à 70% de l’or négocié dans le monde passe par la Suisse. L’organisation demande que ce marché fasse enfin l’objet d’une réglementation pour assurer sa traçabilité.
- par
- Eric Felley
Publiée lundi, une nouvelle étude du WWF sur l’économie aurifère de la planète montre une nouvelle fois la place prééminente qu’y tient la Suisse. Quelques chiffres suffisent à l’établir. Chaque année, 3300 tonnes d’or sont extraites dans le monde et «50% à 70% de tout l’or négocié transitent physiquement par la Suisse». La Suisse est le deuxième plus grand importateur d’or et le plus grand exportateur.
La moitié pour montres et bijoux
De manière générale, le WWF constate que 49% de l’or sert à produire des montres et des bijoux, le reste, 29% est utilisé en guise d’investissement, 15% est acheté par les banques centrales et 7% est intégré à des appareils techniques. Concernant la première utilisation, la Suisse est concernée au premier plan: «Sur les dix plus grandes entreprises horlogères internationales, cinq ont leur siège en Suisse. Les trois plus grandes sont Swatch Group, Rolex et Richemont». De plus, quatre des plus grandes sociétés de raffinage ont aussi leur siège en Suisse: Argor-Heraeus SA, Metalor Technologies SA, PAMP SA et Valcambi.
Pour le WWF, l’exploitation des richesses aurifères de la planète est sujette à maintes critiques, en particulier «les mauvaises conditions de travail, l’esclavage, la traite des êtres humains, le travail des enfants et à la prostitution forcée». Par ailleurs les méthodes d’extraction utilisent des produits chimiques «comme le mercure et le cyanure qui polluent les fleuves des régions concernées.»
Un système aux multiples facettes
L’étude confirme aussi que la plupart des importations d’or en Suisse proviennent de pays qui ne produisent pas d’or comme la Grande-Bretagne (importations de 130 tonnes en 2019), des Émirats arabes unis (128 tonnes) ou d’Italie (68 tonnes): «Ce système commercial aux multiples facettes empêche d’assurer la traçabilité de l’or et permet de mélanger de l’or provenant de sources variées» , constate le WWF.
L’or échappe à l’impôt
Contrairement aux États-Unis et à l’Union européenne, la Suisse n’a pas de loi régulant la «due diligence» s’agissant de l’or issu de régions de conflit. L’organisation écologiste déplore de «faibles exigences en matière d’informations transparentes dans la statistique douanière». Elle pointe aussi du doigt le fait que l’or jouit en Suisse d’un statut fiscal très avantageux: «l’or d’investissement, les pièces en or et l’or destiné à être transformé ne sont pas soumis à un impôt». Même les alliages avec d’autres métaux peuvent être déclarés comme de l’or. Par exemple, de l’argent qui contiendrait 2% d’or n’est pas non plus soumis à l’impôt
En conclusion, le WWF exige davantage de transparence des entreprises qui travaillent avec de l’or. Il attend du Gouvernement suisse l’introduction d’une législation contraignante «pour établir des chaînes d’approvisionnement transparentes et responsables» et «pour garantir que l’or acquis a été produit dans des conditions soutenables pour l’environnement et la société».