AfriqueLes violences au Soudan risquent d’«envahir toute la région et au-delà»
De nombreux pays ont continué, lundi, à évacuer leurs ressortissants du pays africain, au bord du «précipice», selon le secrétaire général de l’ONU, après dix jours de combats meurtriers.
Au Soudan, après dix jours de combats meurtriers entre l’armée et les paramilitaires, explosions, raids aériens et tirs n’ont pas cessé à Khartoum, poussant à l’exode des milliers d’habitants de la capitale plongée dans le chaos. Ceux qui ne peuvent s’enfuir tentent de survivre, privés d’eau et d’électricité, soumis aux pénuries de nourriture et aux coupures d’internet et de téléphone.
Lundi, le syndicat des médecins a lancé un appel urgent: «Plusieurs quartiers de Khartoum sont bombardés, il y a des morts civils et une cinquantaine de blessés graves, tous les médecins proches doivent s’y rendre au plus vite.» Les combats ont déjà fait plus de 420 morts et 3700 blessés, selon l’Organisation mondiale de la santé.
Les violences dans ce pays de l’est de l’Afrique risquent d’«envahir toute la région et au-delà», a mis en garde, lundi, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres. Il a réclamé une nouvelle fois un cessez-le-feu pour «éloigner le Soudan du précipice».
Plus d’un millier de ressortissants de l’UE évacués
Malgré le départ de nombreux ambassadeurs, diplomates et ressortissants étrangers, Volker Perthes, le chef de la mission de l’ONU qui tente, depuis quatre ans, d’obtenir des militaires au pouvoir une transition vers la démocratie, a annoncé qu’il resterait au Soudan.
Les capitales étrangères sont parvenues à négocier des passages avec les deux belligérants: l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du Soudan, et son adjoint devenu son rival, le général Mohamed Hamdane Daglo, qui commande les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).
Il a fallu «profiter d’une petite fenêtre d’opportunité», explique un porte-parole du gouvernement britannique. «Avec des combats intenses à Khartoum et la fermeture du principal aéroport», «une évacuation temporaire plus large était impossible». Plus de 1000 ressortissants de l’UE ont malgré tout été évacués. «Un premier groupe» de Chinois, plusieurs dizaines de Sud-Africains et des centaines de ressortissants de pays arabes sont aussi partis, par la route, la mer ou les airs.
«Peur pour l’avenir des Soudanais»
Un ressortissant libanais, prêt à embarquer pour l’Arabie saoudite à Port-Soudan, une ville côtière de l’est du pays épargnée par les violences, raconte être parti avec «un T-shirt et un pyjama», tout ce qu'il lui reste «après 17 ans» au Soudan. À Khartoum, «on était en état de siège, comme dans un thriller», confie-t-il. «La guerre nous est tombée dessus sans avertissement», et maintenant, «tout est détruit».
Experts et humanitaires s’inquiètent maintenant du sort des Soudanais. «J’ai peur pour leur avenir», a admis l’ambassadeur norvégien Endre Stiansen. Car le litre d’essence s’échange désormais à prix d’or, et le carburant est la clé pour s’échapper vers l’Égypte, à 1000 kilomètres au nord, ou pour rallier Port-Soudan et espérer monter dans un bateau.
«Alors que les étrangers qui le peuvent s’enfuient, l’impact des violences sur une situation humanitaire déjà critique s’aggrave», prévient l’ONU, dont les agences, comme de nombreuses organisations humanitaires, ont suspendu leurs activités. Cinq humanitaires ont été tués et, selon le syndicat des médecins, près des trois quarts des hôpitaux sont hors service.