Amérique latineLe Guatemala sévit sur l’avortement et bannit le mariage gay
Dix ans de prison, telle est désormais la peine encourue par les Guatémaltèques en cas d’interruption de grossesse. Le gouvernement conservateur interdit aussi de «promouvoir» l’homosexualité.

Ce mardi 8 mars, de nombreuses Guatémaltèques ont manifesté pour leurs droits («Femme, écoute, ceci est ta lutte!»). Ce même jour, le Parlement a très sérieusement serré la vis en matière d’avortement.
REUTERSLe Parlement du Guatemala, dominé par les conservateurs, a singulièrement alourdi, en pleine journée internationale des droits des femmes, les peines de prison réprimant l’avortement et interdit le mariage entre personnes du même sexe ou l’enseignement sur la diversité sexuelle. La loi pour la protection de la vie et de la famille, votée mardi par les députés et qui deviendra applicable une fois signée par le président conservateur Alejandro Giammattei, punit de 10 ans de prison, contre 3 actuellement, toute femme qui «a réalisé son propre avortement ou consenti à ce qu’une autre personne l’effectue».
Le texte punit également d’une peine allant jusqu’à 50 ans de prison quiconque effectue «un avortement ou des manœuvres abortives sans le consentement de la femme» et qui provoquent son décès. L’avortement thérapeutique lorsque la vie de la mère est en danger, seul autorisé au Guatemala, est pour sa part plus fortement encadré.
«Loi importante pour la société»
«Alors que d’autres pays continuent d’approuver des lois pro-avortement et des lois qui conduisent à une détérioration du concept originel de famille, cette initiative est maintenant devenue une loi importante pour la société guatémaltèque», s’est réjoui le député Armando Castillo, du parti Viva (droite), un des principaux soutiens du texte.
«Ils criminalisent et punissent les fausses couches, et c’est dangereux.»
D’autres élus se sont montrés critiques. «L’interruption d’une grossesse a un effet dévastateur, et cette loi transforme automatiquement en suspecte une femme malgré la douleur qu’elle peut ressentir, a estimé la députée Lucrecia Hernández, du parti Semilla (centre gauche). Ils criminalisent et punissent les fausses couches, et c’est dangereux.»
L’homosexualité, «un danger pour la paix»
Parallèlement, le texte réforme le Code civil, qui stipule dorénavant que «le mariage entre personnes du même sexe est expressément prohibé» au Guatemala. Le texte interdit également «aux entités éducatives publiques et privées de promouvoir, auprès des enfants et adolescents, des politiques ou des programmes qui tendent à dévier leur identité de leur identité sexuelle de naissance».
«Il existe des groupes minoritaires de la société guatémaltèque, qui proposent des modèles de conduite et de vie en commun distincts de l’ordre naturel du mariage et de la famille.»
Pour les promoteurs de la loi, il existe en effet «des groupes minoritaires de la société guatémaltèque», qui proposent «des modèles de conduite et de vie en commun distincts de l’ordre naturel du mariage et de la famille, ce qui représente une menace pour l’équilibre moral de notre société et, par conséquent, un danger pour la paix».
«Le texte va nourrir l’intolérance!»
Le député Walter Felix, du parti URNG (gauche), a dénoncé un texte «totalement discriminatoire» et qui «incite à la haine». Pour lui, «les droits humains d’une partie significative de la population sont violés». Lucrecia Hernández a ajouté que cette loi «anticonstitutionnelle» allait stigmatiser des personnes et nourrir «l’intolérance» dans la société. «Cette loi devrait en réalité s’appeler «loi pour emprisonner et tuer les femmes», a lancé le député Samuel Pérez, également du parti Semilla. «C’est une des choses les plus éhontées commises par cette législature et, pour couronner le tout, ils font ça durant la Journée de la femme.»
Alors qu’un petit groupe de femmes manifestait devant le Congrès, la députée Patricia Sandoval (FCN, droite) a défendu le texte. «Ne les laissez pas nous donner des idées idiotes. Cette loi est constitutionnelle, elle est viable et c’est la bénédiction de Dieu», a-t-elle assuré.