Ski alpinY a-t-il eu un acte de sabotage à Sölden?
Les skis de Ragnhild Mowinckel, qui présentaient une valeur de fluor supérieure à ce qui est autorisé, ont-ils été trafiqués? Questions après son élimination samedi lors du géant.
- par
- Christian Maillard
Alors que des activistes se sont collé les mains ce dimanche matin sur la route menant les spectateurs de Sölden au glacier du Rettenbach, pour le géant masculin finalement annulé à cause du vent, une autre polémique a enflé ce samedi dans la station autrichienne. Y a-t-il eu de la triche ou un acte de sabotage sur le glacier de Sölden?
La question se pose après ce premier coup de théâtre de la saison et l’élimination de la Norvégienne Ragnhild Mowinckel, punie à l’arrivée avec une paire de skis qui n’était pas conforme au règlement. Ses lattes comprenaient un taux de fluor largement supérieur à la normale (0,99), ce qui est interdit depuis le début de cet hiver étant donné la toxicité de ce produit utilisé autant par les pros que les amateurs. Ce fart, qui rend les spatules plus glissantes, a-t-il vraiment été utilisé à dessein sachant qu’il y aurait des contrôles à l’arrivée?
Lara Gut-Behrami, victorieuse de ce premier géant, s’interroge: «Si je fais une bonne descente et que je perds une demi-seconde, que doit-on penser? Que je n’ai pas triché mais que d’autres l’ont fait?» La Tessinoise avait également ajouté, jeudi en conférence de presse, que lors des tests effectués cet été à Zermatt, «les skis avec fluor étaient entre six dixièmes et une seconde plus vite que les autres». Comme dans le dopage «pas vu, pas pris», on joue avec la limite?
Quoi qu’il en soit, la Norvégienne a quitté Sölden en larmes, convaincue d’avoir été dupée à son insu. «Nous avons testé le matériel de tous les athlètes et les skis de Ragnhild Mowinckel étaient les seuls à montrer une valeur beaucoup trop élevée, a expliqué Peter Gerdol, patron du circuit féminin, dans un communiqué. Le jury n’a pas eu d’autre option que de la disqualifier. Bien sûr, nous ne sommes pas heureux de devoir faire ça, mais c’était l’unique décision possible dans cette situation.»
La FIS avait annoncé qu’elle serait tolérante au cours des prochaines semaines. Sauf que le taux de fluor était apparemment bien trop important. Ce composé chimique, poison pour la santé, a-t-il été injecté par une tierce personne ou le serviceman s’est-il trompé au moment de préparer les skis? «Nous n’avons aucune idée de ce qui s’est passé», a réagi l’entraîneur de l’équipe féminine norvégienne Atle Skaardal sur le site NRK.no, dénonçant une situation injuste. «J’espère juste que c’est une grosse erreur car personne ne ferait cela exprès, c’est impossible», a déclaré Maria Tviberg à NRK, alors que Mowinckel, classée 6e de la première manche, a confirmé qu’elle n’avait pas essayé de tricher.
3e de ce premier géant féminin de la saison, Petra Vlhova a estimé qu’il n’y avait pas de hasard. «Si tu prends soin de tes skis, tout ira bien. Les règles sont les règles et il faut les suivre, s’est-elle exclamée. Je fais confiance à mon technicien, s’il y a un problème c’est de sa faute, tonne la Slovaque. Je fais confiance en ceux qui travaillent avec moi.» Mais est-ce suffisant?
«Quelqu’un pourrait contaminer les skis avec un spray au fluor en passant à côté, lâchait Lara Gut-Behrami jeudi en conférence de presse. Peut-être bien que le serviceman devrait dormir dans sa chambre avec ses paires de ski.» De quoi se poser d’autres questions, alors que Mikaela Shiffrin et Federica Brignone - qui ont d’ailleurs écrit avec trente autres athlètes à la FIS pour dénoncer un manque de fiabilité dans ce système – ont de leur côté estimé sur TV2 que le système de contrôle n’était pas suffisamment prêt et donc pas équitable. Alors que la valeur de tolérance a été augmentée à 1.8 jusqu’au 31 décembre, il y a forcément des doutes.
Autre hypothèse: est-il possible que des skis propres soient intoxiqués lorsqu’ils passent sur une neige contenant cette substance? «Ce n’est pas possible que ce soit reste récolté sur la neige, estime Peter Gerdol, patron de la Coupe du monde féminine. Les deux dernières années, les contrôleurs ont fait beaucoup de tests et ont exploré la voie d’une contamination possible, mais cela ne donne que de petites valeurs. Dans ce cas, on a testé de nombreuses zones sur les skis et toutes étaient largement positives.»
Chez Head, le directeur de course pour la marque, Rainer Salzgeber, a fait part de son incompréhension auprès des médias autrichiens et a sollicité la FIS, certain que ses techniciens ont fait tout juste. Affaire à suivre, comme l’on dit dans ces cas-là.