Procès à Nyon (VD)L’avocat ripoux écope de 6 mois ferme qu’il a déjà purgés
Le Franco-Italien de 67 ans, qui a fait croire qu’il pouvait exercer en Suisse, ne retournera pas en prison. Il doit en revanche rembourser les personnes grugées.
- par
- Evelyne Emeri
Au bénéfice d’un certificat médical comme lors de la première audience appointée en juin 2021, l’avocat de 67 ans n’était pas présent le 25 janvier pour assumer ses actes face au Tribunal correctionnel d’arrondissement de La Côte, à Nyon. Le président Daniel Stoll a maintenu l’audience, sachant parfaitement que les promesses de Paolo* de comparaître ne se réaliseraient jamais: «Passons au jugement, il sera en décompensation à chaque fois». L’homme est hospitalisé à Paris en raison de son trouble schizo-affectif et la maladie semble plutôt se péjorer. Il a aussi été diagnostiqué schizophrène paranoïaque il y a plus de 20 ans après avoir déclenché la mise en examen de la Banque nationale de Paris (BNP) pour usage de faux.
Souffrant et bluffant
Un sacré «fait d’armes» la BNP en 2000. Des engagements de caution à hauteur de 3,2 millions en falsifiant la signature d’une de ses mandantes. Il avait abusé de la confiance d’une dizaine d’autres particuliers ou entreprises. Ce qui lui vaudra une condamnation à quatre ans de prison (ndlr. purgés partiellement) et 20 millions de dommages et intérêts pour escroquerie, usage de faux et abus de confiance. Au procès de Nyon, l’on a appris combien il avait mal vécu son incarcération. Pourtant des années plus tard – les faits s’étendent d’avril 2017 à août 2019 –, ce même faussaire souffrant, aux lourds antécédents, apparaît en Suisse romande. Radié du barreau français, inexistant au registre des avocats italiens, il rempile. Et embobine de nombreux ex-confrères et des autorités judiciaires dans les cantons de Vaud, de Fribourg, de Genève et du Valais. «La maladie», martèlera la défense.
Actes intentionnels
Du côté des plaignants: l’Ordre des avocats vaudois (OAV) qui se devait de défendre la profession usurpée et de protéger le justiciable; et deux entreprises qui n’ont pas retiré leurs plaintes contrairement à bon nombre d’autres clients identifiés qui ne l’ont pas poursuivi, conscients qu’ils ne récupéreraient rien. La procureure Valérie de Watteville Subilia le déplore. En audition, Paolo lui a servi de multiples versions. Sûr de lui, menteur, répétant qu’il était réellement en droit de pratiquer en Suisse même confronté à la réalité. Elle n’a cru en rien de tout cela et considère que Paolo, bien qu’il bénéficie d’une réduction moyenne de responsabilité pénale, a agi intentionnellement et par appât du gain. Tout comme sa complice juriste, assistante et compagne, Marianne*.
Du ferme sans prison
Aussi absente aux débats pour la seconde fois, mais sans excuses motivées, la Parisienne de 60 ans a été jugée par défaut. Le verdict de la justice vaudoise la libère du chef de prévention d’escroquerie, alors que le ministère public avait requis 60 jours-amende à 30 francs le jour à son encontre. Marianne devra toutefois s’acquitter d’un montant de quelque 3700 francs pour les frais de procédure. Pour Paolo, la Cour a quasiment suivi le réquisitoire du Parquet. La quotité de la peine ferme reste la même: six mois. Les mois avec sursis durant 5 ans ont été ramenés à 9 au lieu des 12 préconisés par la procureure. L’escroc franco-italien ne retournera pas en prison, sa détention provisoire en 2019-2020 étant supérieure à sa sanction ferme. Une farce pour le profane.
Traitement ambulatoire
Sur le plan financier, Paolo – qui serait apparemment sans le sou – devra verser une somme globale de plus de 90’000 francs aux lésés sans compter ses frais d’avocat, selon le jugement rendu à Nyon. Soit 5000 ou 7500 francs (ndlr. selon date du versement) de conclusions civiles à l’endroit de l’Ordre des avocats vaudois qui a bien diminué ses exigences initiales en accord avec le récidiviste; environ 38’000 francs de dommages et intérêts envers l’une des deux entreprises plaignantes assortis des 18’000 francs de dépens; enfin, près de 30’000 francs pour les frais de procédure.
Le Tribunal le condamne également à une amende de 3000 francs et ordonne la poursuite de son traitement psychothérapeutique ambulatoire pendant au moins cinq ans ou aussi longtemps que nécessaire.
*Prénoms d’emprunt