Affaire Mike Ben PeterÉmotion lors du deuxième jour du procès
Dans le cadre du procès de six policiers jugés pour homicide, la veuve et le frère de la victime ont été entendus par le tribunal.
- par
- Xavier Fernandez
Mardi après-midi, à Renens, la veuve de Mike Ben Peter, mort en février 2018 après une interpellation musclée, s’est exprimée devant les juges. «J’ai fait la connaissance de Mike à Malaga (E) en décembre 1999. À l’époque, il travaillait dans un restaurant. Il a attiré mon attention, car j’aimais sa façon de parler. C’était une personne responsable. Il savait comment prendre soin d’une femme. Quand j’étais triste, il me réconfortait», a-t-elle commencé.
À la demande de son avocat, la veuve a décrit la victime comme suit: «Il était toujours calme. Jamais stressé. Il aimait beaucoup les enfants… nos enfants. Je n’avais jamais vu quelqu’un prendre aussi bien soin de ses enfants. Malheureusement, à la naissance de notre troisième enfant, il n’était plus là. J’étais enceinte de deux mois quand Mike est décédé.»
«J’ai crié et ça a réveillé les enfants»
Elle a ensuite expliqué comment elle a appris le décès de son mari. «Je lui ai parlé pour la dernière fois le soir du 28 février, par téléphone. Il m’a dit qu’il allait se chercher à manger et qu’il me rappellerait plus tard. J’ai ensuite reçu un appel vers 2 h 30 du matin. C’était la petite sœur de Mike. Elle m’a dit qu’un médecin suisse avait appelé sa mère, mais elle n’avait pas bien compris ce qu’il avait dit. Elle avait juste compris qu’il était maintenu en vie avec une machine. J’ai crié, et ça a réveillé mes enfants. Je ne comprenais pas. Je criais: «Mais qu’est-ce qui s’est passé?» J’ai ensuite rappelé l’hôpital à plusieurs reprises et supplié les médecins de sauver mon époux.» Mais, vers 11 h, on l’a informée que c’était fini. «Les médecins m’ont dit: «Madame, on est désolés. On a fait tout ce qu’on a pu.» J’étais dévastée.»
Pour finir, Me Simon Ntah l’a interrogée sur ses impressions sur les suites judiciaires données à la mort de Mike Ben Peter. Et elle a répondu, en larmes: «Cinq ans ont passé. C’est très long pour mener une enquête. Maintenant, j’attends que justice soit faite. J’ai appelé mon fils Destiny, car son destin est de ne pas connaître son père. Le plus dur, c’est qu’il me demande régulièrement quand est-ce que son père va revenir. Il me dit: «Je n’aurai jamais de père. J’ai seulement une mère.» Alors, je lui réponds: «Tu as un père. Il est là-haut, dans le ciel.» Mais il me pose sans cesse cette question, tous les jours, et à chaque fois je pleure. Tous les jours, je pleure.» Les plaidoiries ont été repoussées à lundi prochain.
Le frère témoigne à son tour
Le frère de Mike Ben Peter a lui aussi été entendu par le tribunal. Interrogé par son avocat, il a notamment expliqué: «Dans la famille, nous sommes sept frères et sœurs et deux demi-sœurs. Soit neuf en tout. Mike était l’aîné. À la mort de notre père en 1999, il est devenu une sorte de deuxième père pour nous. Quand nous avons appris sa mort, je suis venu en Suisse le soir-même. J’avais besoin de voir son corps. Finalement, son cercueil a été rapatrié au Nigéria au mois de juin. Nous avons célébré ses funérailles, et deux mois plus tard, ma mère est décédée à son tour. Elle ne s’est jamais remise. Pour nous, la famille, la seule chose qui compte désormais, c’est que justice soit rendue.»
Émotions
Ému après avoir entendu la veuve et le frère de Mike Ben Peter, le premier policier qui avait tenté de l’interpeller a spontanément demandé la parole. «Madame, Monsieur, je sais que la douleur de perdre soudainement un proche n’est pas quantifiable ou qualifiable. Mais à travers vos témoignages, j’entends votre peine. Sachez que le décès de Mike m’a également beaucoup touché et me touche encore. Je vous adresse mes plus sincères condoléances.» En entendant ces mots, le frère de Mike, stoïque jusque-là, a complètement fondu en larmes. Dans la foulée, deux autres policiers ont également présenté leurs condoléances. À noter que la femme du primo-intervenant avait, mardi matin, signalé que le policier souffrait encore régulièrement de terreurs nocturnes depuis les faits.