Amérique latine: Nouvelles violences en Equateur, en partie soumis à l’état d’urgence

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Amérique latineNouvelles violences en Équateur, en partie soumis à l’état d’urgence

Des heurts ont fait deux morts mercredi dans une prison en Équateur, où l’état d’urgence est en vigueur dans deux provinces touchées par la criminalité après une vague d’attentats.

Des impacts de balle à l’entrée d’un centre de santé à Guayaquil, le 2 novembre 2022.

Des impacts de balle à l’entrée d’un centre de santé à Guayaquil, le 2 novembre 2022.

AFP

Deux détenus sont morts et six ont été blessés dans des violences mercredi dans la prison de Guayas 1 à Guayaquil, ont indiqué les autorités pénitentiaires. En soirée, l’organisme chargé d’administrer les prisons (SNAI) a dit à l’AFP que «des membres de groupes criminels organisés causent des perturbations» dans cet établissement pénitentiaire. Un groupe de soldats pointaient leurs armes vers l’intérieur de la prison, a constaté l’AFP.

Les deux décès de mercredi s’ajoutent à ceux de six personnes, dont cinq policiers, tuées depuis mardi dans une série d’attaques à l’explosif et à l’arme à feu contre des postes de police, des stations-service et un hôpital de Guayaquil, grand port de 2,8 millions d’habitants.

«Hier, nous avons été délibérément attaqués par des sabotages et des attentats terroristes orchestrés par des narcodélinquants. Ces attaques cherchaient à installer la peur et le chaos, mais ils n’y sont pas arrivés», a déclaré mercredi le président Guillermo Lasso dans un message radiotélévisé.

Selon les autorités, les violences ont été déclenchées par le transfèrement vers d’autres établissements de 1000 détenus de la prison de Guayas 1, contrôlée par des bandes de narcotrafiquants. Elles ont aussi affecté d’autres prisons du pays, notamment dans la ville côtière d’Esmeraldas, près de la frontière avec la Colombie, où huit gardiens ont été brièvement pris en otage mardi.

Le président Lasso a décrété l’état d’urgence dans les provinces de Guayas et d’Esmeraldas et un couvre-feu à partir de 21 h 00 (03 h 00 en Suisse). La mesure restera en vigueur jusqu’au 16 décembre. «Ces actes de sabotage et de terrorisme sont une déclaration de guerre ouverte contre l’État de droit, le gouvernement et contre vous tous, les citoyens», a affirmé le chef de l’État.

«J’ai peur d’une fusillade»

L’activité était minimale mercredi dans les rues de Guayaquil où les passants pressaient le pas, l’air effrayé, pendant que policiers et militaires patrouillaient en petits groupes. Les forces de sécurité ont annoncé avoir procédé à 53 arrestations mercredi, et saisi armes à feu, munitions et explosifs.

Plus de 1200 homicides ont été recensés dans la ville depuis le début de l’année, soit 60% de plus que pour la même période de 2021, selon des chiffres officiels.

«Je vois des voitures de police la nuit mais je me cache. J’ai peur d’une fusillade juste là parce qu’ils (les policiers) les recherchent», a raconté à l’AFP Andrea Aguilar, une vendeuse de 38 ans. Elle a dit éviter de passer près du poste de police du secteur de La Alborada, où l’une des voitures piégées a explosé mardi. «C’est terrible», s’est-elle lamentée.

«Endroit idéal pour les activités criminelles»

«Le pays assiste avec consternation aux agissements des mafias du trafic de drogue qui, en association avec des tueurs à gages et des criminels de droit commun, tentent d’intimider les Équatoriens», a déclaré mercredi le ministre de la Défense, Luis Lara.

Les narcotrafiquants, dont certains sont liés aux cartels mexicains, mènent une guerre dans les rues et dans les prisons du pays, où des massacres ont fait près de 400 morts depuis février 2021.

Situé entre la Colombie et le Pérou, les plus grands producteurs mondiaux de cocaïne, l’Équateur est passé du statut de pays de transit de drogue à celui d’important centre de distribution vers l’Europe et les États-Unis. En 2021, les autorités ont saisi un nombre record de 210 tonnes de drogues, principalement de la cocaïne. Depuis le début de l’année, les saisies totalisent 160 tonnes.

«L’Équateur est un pays dollarisé avec un système judiciaire corrompu et perméable. C’est l’endroit idéal pour les activités criminelles», explique à l’AFP Xavier Flores, avocat spécialisé dans les droits de l’homme.

Pour l’ancien chef des renseignements militaires, Mario Pazmiño, il existe «une gouvernance criminelle dans le pays, dans laquelle le crime organisé a commencé à chasser l’État de certains territoires». «Il va y avoir une métastase de la violence au niveau national, en commençant par les principales villes où ces organisations contrôlent déjà certaines enclaves, et en s’étendant à d’autres villes qui ne sont pas encore contaminées», a-t-il prédit auprès de l’AFP.

(AFP)

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