New YorkMéga-concert jusqu’au bout de la nuit pour fêter le hip-hop
Des milliers de personnes ont fêté vendredi les 50 ans du hip-hop lors d’un méga-concert dans le Bronx donné par des pionniers du genre, tels Run-DMC, Nas et Snoop Dogg.
Pendant plus de huit heures, New-Yorkais et touristes ont célébré dans une joie démonstrative cinq décennies d’une musique née le 11 août 1973, dont l’immense influence allait irrémédiablement secouer la culture et l’industrie de la musique. «Je ne savais pas à quel point cela allait être monumental quand cela a commencé», confiait dans le mythique stade de l’équipe de base-ball de 46’000 places Kiesha Astwood, 50 ans, née comme le hip hop en 1973 et sur Sedgwick Avenue, dans le Bronx.
C’est là qu’au rez-de-chaussée d’un immeuble HLM au 1520 Sedgwick Avenue, dans l’un des cinq arrondissements new-yorkais, un DJ d’origine jamaïcaine, Clive Campbell, alias DJ Kool Herc, innove: en faisant tourner le même disque sur deux platines, il isole les séquences de rythmes et percussions et les fait durer dans les enceintes, préfigurant le «breakbeat», composante essentielle du hip-hop.
Lors de ce concert marathon qui a débuté après 1h00 du matin, les stars du genre se sont succédé pour enchaîner les tubes comme Run-DMC et son «It’s Tricky», recueillant les hurlements d’un public chavirant de bonheur. Autre vétéran, Nas a lui joué une série de titres de son album fondateur «Illmatic», dont «The World Is Yours» et «N.Y. State of Mind».
«Une voix»
Une clameur s’est élevée de la foule lorsque l’icône new-yorkaise a clôturé son set en invitant Lauryn Hill sur scène à chanter le morceau sur lequel ils ont collaboré «If I Ruled the World (Imagine That)» ainsi que son propre single «Doo Wop (That Thing)" et son interprétation de «Killing Me Softly", chanté à l’origine avec les Fugees. Snoop Dogg a lui choisi des titres parmi les préférés de ses fans, tels «The Next Episode» «Nuthin› But A ‹G› Thang» et «Gin And Juice».
Lil Wayne, The Sugarhill Gang, des membres du Wu-Tang Clan et d’Ice Cube, faisaient aussi partie du show, tout Melle Mel ou encore Scorpio avec Grandmaster Caz. «Je pense que le hip-hop a vraiment donné une voix aux gens qui n’avaient pas de voix au départ», résumait Antoine Crossley, venu spécialement de Chicago.
«Notre lignée»
Ce concert était le point d’orgue d’une série d’événements. New York a fait fleurir tout l’été nombre d’initiatives culturelles: séances de graffitis ou de breakdance, «block parties», concerts... Pour certains critiques et fans, donner une date officielle à la naissance d’un style de musique, qui dans les faits existait déjà avant le 11 août 1973, semble un peu arbitraire.
Mais peut-être qu’aucun autre type de musique n’a mérité de célébrer sa naissance. Pendant des décennies, le hip-hop a été décrié, ignoré et censuré par une industrie qu’il a contribué à profondément façonner, dans un pays où les rappeurs ont produit des succès massifs et ont eu un impact considérable sur tout, de la musique à la mode, en passant par la langue et la danse.
Alors que la vie était âpre et violente à New York, les premières «block parties», des fêtes, offrirent à des jeunes Afro-Américains une échappatoire à la pauvreté et aux discriminations. Le hip-hop s’est ensuite propagé aux quatre coins de la planète et la plupart des pays ont aujourd’hui leur propre scène.
Dans le public, des enfants aux grands-parents ont dansé, chanté, et fait scintiller la nuit à la lumière de leurs portables. Mais au fil des heures, certains plaisantaient sur le fait qu’ils vieillissaient comme le hip-hop lui-même. «Tous les gens assis ont plus de 30 ans, on a un peu mal aux genoux par ici», reconnaissait l’un d’eux.
Les fans ayant eu l’endurance de rester jusqu’au bout ont pu voir Nas ramener sur scène DJ Kool Herc pour une autre série de remerciements. «C’est notre amour, notre lignée», a-t-il dit. «Le hip-hop est né pour vous et moi, et nous sommes là où nous devons être. A New York.»