Qatar 2022Imbattable aux tirs au but, la Croatie fait pleurer tout le Brésil
La Croatie a cadré un seul tir, celui de l’égalisation. Après avoir enfin trouvé la faille en prolongation, le Brésil s’est bêtement laissé surprendre et a craqué aux tirs au but. Ballot.
- par
- Daniel Visentini Doha
Le poids de l’histoire est lourd, surtout quand il pèse depuis les tribunes. Surtout quand, dans les yeux de Ronaldo, Rivaldo et autres, vingt ans d’attente transpirent. Le Brésil se sait en mission, en réalité, il l’est toujours, avec plus ou moins de bonheur. Il lui aura fallu beaucoup de patience et un trait de génie de l’inévitable Neymar pour se croire qualifié durant les prolongations. Il lui aura aussi fallu beaucoup de naïveté quelques minutes plus tard, pour se faire prendre en contre et regarder Petkovic égaliser. C’est aux tirs au but que tout s’est joué et à cet exercice, la Croatie est tout simplement imbattable. Elle n’en a pas manqué un seul, pendant que Rodrygo et Marquinhos rataient le leur, laissant les Croates filer en demi-finale.
De toutes les 120 minutes de jeu, un seul tir cadré pour la Croatie: l’égalisation. Fou! Les tirs au but? Fous aussi, pour ce rappel édifiant: qualification croate aux tirs au but au Mondial 2018 en 8es de finale contre le Danemark et aussi en quarts de finale contre la Russie; au Qatar: qualification en 8es de finale contre le Japon dans le même exercice et donc, encore une fois face au Brésil. Une sacrée force mentale pour ces moments où il ne faut pas trembler.
Pas de plan anti-Neymar
L’ouverture du score était entièrement méritée, eu égard à la domination brésilienne, dès la seconde période; le 1-1 croate avait l’amertume de la punition pour qui se laisse surprendre à quelques minutes de la fin et d’une qualification promise. On a beau prêter toutes les vertus aux Brésiliens, par romantisme, pour entretenir la légende, il ne faut pas oublier que les Croates eux aussi ont le goût des jolis mouvements et des joueurs pour porter leurs intentions. Cela s’est vu, dès le début. Déjà, pas de plan spécial anti-Neymar. Bien sûr, une attention particulière, mais rien de méthodique. Non, chaque Croate savait sa partition et pouvait la jouer dans les bonnes conditions.
Idem côté Brésil. Une équipe posée, structurée, très européenne. Qui sait ce qu’elle fait et comment le faire. Mais avec ces deux systèmes identiques en miroir (deux 4-3-3), qui pour faire la différence? Pour la Croatie, le danger a souvent été porté par Juranovic. Il avait sans doute fort à faire avec Vinicius, mais le latéral droit croate a aussi animé le flanc droit, faisant souffrir Danilo. Pour le Brésil, quelques fulgurances de Vinicius, justement, pour faire trembler les Croates. Deux équipes sur une corde raide durant toute la première période.
Le Brésil a dansé trop tôt
Il faut croire que le Brésil ne voulait pas se contenter de ça. Alors, dès la seconde période, une pression étouffante pour bloquer la Croatie dans son camp. Juranovic ne pouvait plus monter, la tension enflait avec un Brésil haut. La Seleçao aurait pu marquer là: avec Richarlison (47e), avec Neymar (55e), avec Paqueta (66e), avec Neymar encore (76e) ou avec Paqueta (80e). Beaucoup d’occasions, mais pas de but en récompense.
Le dernier Brésil champion du monde avait l’extraordinaire Ronaldo en buteur. Vingt ans plus tard, il est dans les tribunes à Doha et la Seleçao mesure toujours le vide à ce poste. Tite a d’ailleurs changé l’entier de sa ligne d’attaque durant la seconde période, lançant Antony, Rodrygo et Pedro. Sans effet. C’est sur l’inévitable Neymar que reposait le poids du bonheur brésilien. Et il a assumé. À la fin de la première prolongation, face à cette Croatie regroupée, il a accéléré, plein axe. Un relais avec Paqueta, une opposition catastrophique de Sosa et Neymar sentait le coup, anticipait et glissait le ballon sous la latte. En plus de sortir son équipe de l’ornière, ce but, son 77e sous les couleurs de la Seleção, revêtait une portée historique puisqu’il lui permettait de rejoindre Pelé au sommet de la hiérarchie des buteurs de la sélection brésilienne.
Le Brésil dansait. Trop tôt. Petkovic profitait des errances brésiliennes dans le replacement et la suite est connue: la Croatie ne perd pas aux tirs au but, c’est elle qui file en demi-finale.