Procès en FranceSa femme a tenté de le tuer, mais il veut retourner vivre avec elle
Une tentative de meurtre par conjoint est jugée depuis jeudi en Charente-Maritime. Fait inhabituel: la victime se montre peu loquace, et entend reprendre le fil de son histoire avec son bourreau.
Sa femme a tenté de le tuer il y a quatre ans mais il veut retourner vivre avec elle: au procès d’une tentative de meurtre par conjoint en Charente-Maritime, la Cour d’assises a peiné, jeudi, à faire du mari une victime.
«Si je n’étais pas parti, rien de tout ça serait arrivé»
Au premier jour des débats à Saintes, le président fait venir cet homme de 73 ans à la barre pour l’interroger mais ne parvient à lui arracher que des bribes de réponses. Son épouse, âgée de 70 ans aujourd’hui, lui a porté deux coups de couteau une nuit de mars 2018 alors qu’il devait la quitter pour une autre le lendemain. Lui faisait-elle des reproches? «C’est un peu vrai.» Est-ce qu’elle était jalouse? «Je pense pas.» Est-ce qu’elle l’a menacé quand elle a appris qu’il avait une maîtresse? «Oui, mais j’ai pris ça pour des paroles en l’air.» Est-ce qu’il se sent responsable de la situation? «Oui, si je n’étais pas parti, rien de tout ça serait arrivé.» Depuis les faits, Bernard a vécu quatre ans avec sa nouvelle compagne mais ils se sont séparés il y a quinze jours. Son projet de vie, désormais? «Retourner chez moi avec ma famille et ma femme.» Le président est dépité: «Vous vous rappelez que c’est elle qui est jugée?»
«Un geste de désespoir»
Cette nuit du 6 au 7 mars 2018, Bernard et Nicole soldent 47 ans de mariage par un dernier rapport sexuel, que le premier affirme avoir réclamé – au grand dam de son avocate, car les versions ont divergé durant la procédure. L’épouse se serait ensuite levée du lit pour aller prendre un gros couteau dans la cuisine et revenir frapper son mari au thorax. Dans la chambre ou un couloir, incertitude là aussi. L’accusée affirme qu’elle voulait au départ se suicider puis qu’il «parte avec elle»: elle s’est entaillé les poignets après que son mari, blessé, avait échappé à ses coups. Quatre ans plus tard, elle évoque «un geste de désespoir».
Entre eux, «il n’y avait pas d’échange»
«Je comprends pas pourquoi j’ai fait ça. Je lui ai fait peur, je comprends qu’il ait eu peur. Je regrette tout ce que j’ai fait. J’ai beaucoup réfléchi. Je me fais aider, j’aurais dû me faire aider», assure-t-elle à la Cour, en demandant pardon au mari. Du récit que les deux ex-conjoints font de leur vie commune, il ressort qu’elle a basculé en 2010 avec la mort accidentelle de leur fils, suivie de l’AVC qui a lourdement handicapé leur fille cadette, revenue vivre chez eux. L’après-midi des faits, ils avaient discuté de sa prise en charge, à l’avenir. Mais pour leur fille aînée, ses parents ont toujours été «des taiseux». Entre eux, «il n’y avait pas d’échange», dit-elle. Le procès doit s’achever vendredi.