Viola Amherd«Nous plongeons tous la fourchette dans le même caquelon»
L’élue du Centre sera la présidente de la Suisse dès le 1er janvier 2024.
- par
- Eric Felley
Après avoir été élue conseillère fédérale en décembre 2018, la Valaisanne Viola Amherd est parvenue ce mercredi à la présidence de la Confédération. Cette élection a toutefois été marquée par une soudaine perte de confiance. Lors de sa réélection comme conseillère fédérale, elle a obtenu le résultat remarquable de 201 voix. Mais pour son accession à la présidence, deux heures plus tard, il a fondu à 158 voix seulement.
Elle a sans doute fait les frais des divers scrutins de la matinée, qui ont laissé des traces dans les esprits. À l’heure de prendre la parole, elle a tenu un discours de circonstance et de cohésion, terminant par la formule: «Nous plongeons tous la fourchette dans le même caquelon».
Pour l’égalité
Pour cette politicienne, née à Brigue en 1962, c’est le couronnement d’une vie entièrement consacrée à la politique, qui a commencé comme présidente de la ville de Brigue, puis conseillère nationale depuis 2005. Venant du Parti démocrate-chrétien du Haut-Valais, particulièrement conservateur, elle a toujours suivi une ligne plus centriste, notamment sur les questions sociales et féminines. À Berne, elle n’a jamais hésité à rejoindre le camp des femmes, à l’occasion des journées pour l’égalité, en faveur des quotas ou du mariage pour tous. Célibataire et sans enfants, elle est très discrète sur sa vie privée, publiant de temps à autre sur Facebook des photos de randonnées dans son coin de Haut-Valais. Cet été, elle s’est même cassé le coude en chutant sur un sentier dans la région de Bettmeralp.
Des avions à l’Ukraine
Alors qu’elle aurait préféré s’occuper du Département de justice et police, elle a dû reprendre en 2019 le Département de la défense laissé par Guy Parmelin. Première femme à la tête de l’armée suisse, elle s’est prise au jeu en défendant ses intérêts et en voulant y intégrer davantage de femmes. En pleine pandémie du Covid-19, en septembre 2020, elle a réussi à faire passer de justesse (50,1%) l’achat des avions de combat. Puis, l’agression de l’Ukraine par la Russie, le 24 février 2022, a provoqué une remise en question des besoins de la Suisse en matière de sécurité. Finalement, elle a pu obtenir quelque 13 milliards de francs supplémentaires pour mettre à niveau l’armée durant les dix prochaines années.
Des critiques
Régulièrement en tête des sondages de popularité, Viola Amherd prête toutefois le flanc à la critique à Berne. «Populaire, mais contestée» titre «Le Nouvelliste» de ce mercredi. Elle a été critiquée pour la procédure d’achat du F35, qui a fâché la France, ou pour la gestion de la société d’armement Ruag, ou encore pour la vente de chars à l’Allemagne. Plus récemment, elle a créé un secrétariat d’État à la Politique de sécurité, mais l’ambassadeur qu’elle a nommé, Jean-Daniel Ruch, a dû renoncer un mois après sa nomination. Depuis, personne n’occupe ce poste. Cependant, face aux critiques, Viola Amherd demeure imperméable et peu loquace. À Berne, les parlementaires se plaignent d’ailleurs de la difficulté à obtenir des informations de la part de son département. Avec elle, l’armée est vraiment muette. Autre reproche, elle aurait tendance à s’entourer de collaborateurs haut-valaisans aux couleurs de son parti.
Dans son propre canton, Viola Amherd est surtout connue dans le Haut-Valais. Dans le Valais romand, c’est une personnalité politique qui demeure largement énigmatique. Comme le canton a décidé de donner un jour de congé aux écoles, le 22 décembre, pour marquer son élection, cela devrait contribuer à la faire connaître davantage.