France – Vives tensions au procès des attentats du 13 novembre à Paris

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FranceVives tensions au procès des attentats du 13 novembre à Paris

Le 92e jour d’audience du procès des attentats du 13 novembre s’est achevé sur une suspension des débats, après un interrogatoire du principal accusé Salah Abdeslam.

Sur ce dessin fait le 9 février 2022, Salah Abdeslam s’adresse à la cour, lors du procès des attentats du 13 novembre.

Sur ce dessin fait le 9 février 2022, Salah Abdeslam s’adresse à la cour, lors du procès des attentats du 13 novembre.

AFP

Au procès des attentats meurtriers du 13 novembre 2015 en France, les réponses elliptiques du principal accusé Salah Abdeslam ont irrité mardi les parties civiles et provoqué des tensions inédites en six mois d’audience, jusqu’à entraîner une suspension des débats.

Il est environ 18h00 quand une nuée de robes noires se lève d’un coup: les avocats de la défense quittent la salle. «La sérénité des débats est compromise», justifie l’un des avocats de Salah Abdeslam, Me Olivia Ronen. Elle venait de demander, en vain, que la série d’incidents qui avait causé une première interruption d’audience soit formellement actée.

Au fil de plusieurs heures d’interrogatoire de son client, des questions parfois agressives des parties civiles, des évitements puis des réponses de plus en plus provocantes de l’accusé, l’ambiance s’est chargée d’électricité. Salah Abdeslam est le seul membre encore en vie des commandos qui ont mené les attentats ayant fait 130 morts à Paris et à Saint-Denis, en banlieue, le 13 novembre 2015.

Me Sylvie Topaloff, avocate de parties civiles, juge par exemple étrange que Salah Abdeslam ne reconnaisse pas les allers-retours pour récupérer des membres de la cellule djihadiste en Europe: les kamikazes. «C’est une façon de réduire votre implication. Il ne sera pas dit que vous êtes allé chercher des gens qui se sont fait sauter dans les attentats», lance-t-elle. Silence. «Vous avez accouché?» lâche Salah Abdeslam.

«Dans la merde»

Le président s’insurge, l’accusé invective l’avocate: «Ce que vous dites là, si ça rentre dans la tête de la cour, je suis dans la merde!» Me Topaloff crie à son tour, brouhaha général. Dans la salle, les applaudissements ironiques fusent. «130 morts!» hurle une partie civile. Le président de la cour d’assises spéciale de Paris, Jean-Louis Périès, demande à l’accusé de «redescendre un peu».

Plus tard, nouvelle question offensive d’avocats des parties civiles. La défense s’époumone pour réclamer le micro qui reste coupé. Nouvelle clameur collective, le président rappelle qu’il exerce seul la «police de l’audience». Un avocat de l’accusé proteste. «Et bien alors changez de métier!» vitupère Jean-Louis Périès. Nouvelle salve d’applaudissements et de cris, le président suspend l’audience.

À la reprise, vingt minutes plus tard, Jean-Louis Périès tente de calmer le jeu et rappelle que les manifestations du public «ne sont pas admissibles». Pas assez pour contenter la défense.

«Je balance pas»

L’interrogatoire de Salah Abdeslam avait pourtant commencé sereinement. Même si, très vite, un étrange pas de deux s’est instauré entre le président et l’accusé, questionné sur son rôle dans les préparatifs des attaques djihadistes.

La location des voitures, Salah Abdeslam, 32 ans, ne les nie pas. Avec aisance, parfois à la limite de l’insolence, il reconnaît uniquement deux allers-retours pour aller chercher des «frères en islam». «Ils vivaient en zone de guerre», justifie-t-il, un peu comme avec «aujourd’hui la guerre en Ukraine».

S’il n’était pas le chauffeur du premier des cinq trajets qui lui sont imputés, à qui a-t-il prêté le véhicule? Son ami d’enfance et voisin de box Mohamed Abrini? «Moi, je dis pas de noms, je balance pas», répond Salah Abdeslam. Le magistrat insiste, tente d’autres noms. «Je crois que vous ne m’avez pas bien entendu, Monsieur le président», persifle l’accusé. «J’ai l’impression que vous êtes un peu susceptible».

«Un peu susceptible»

La tension commence à monter. Aux questions précises de la cour, l’accusé répond par des «no comment» obstinés et répète qu’il ne savait rien de la «mission» de ceux qu’il allait chercher. L’aurait-il fait s’il avait «su que ces personnes allaient participer de près ou de loin à des attentats?» demande une assesseure.

«Dans l’état d’esprit dans lequel j’étais à l’époque, fêtard, j’allais me marier, je pense que je serais pas parti les chercher», même s’ils «avaient sans doute de bonnes raisons», répond l’accusé. Mais «aujourd’hui, vous m’avez bousillé ma vie, la France, son gouvernement», lance-t-il.

L’assesseure le coupe: ce ne sont pas «les réponses qu’attendent les parties civiles». Le but du procès, «c’est la manifestation de la vérité», rétorque la défense de Salah Abdeslam. Le procès reprendra mercredi.

(AFP)

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