CommentaireGuerre en Ukraine: Alain Berset peut compter sur l’UDC et le pape
En se mettant au-dessus de la mêlée pour dénoncer la «frénésie guerrière» ambiante, le président de la Confédération fait comme si la guerre allait bientôt s’arrêter.
- par
- Eric Felley
Le 3 mars dernier, dans un entretien donné au journal «Le Temps», le président de la Confédération Alain Berset avait dénoncé, «l’ivresse de la guerre», qui s’était emparée des gens en Suisse et ailleurs. Il y exprimait une défense stricte de la neutralité helvétique sur le long terme contre l’autorisation de réexporter du matériel militaire en Ukraine. Les tentatives dans ce sens au Parlement ont finalement échoué.
Dimanche dernier, il est monté d’un cran en dénonçant dans la NZZ, «la frénésie de la guerre» qui affecte ses contemporains. Dans un cas, comme dans l’autre, Alain Berset se positionne au-dessus de la mêlée, comme le garant d’un pacifisme éclairé, alors que tant d’autres se laisseraient entraîner ou griser par la folie de la guerre. «Il faudra un jour négocier avec la Russie (…) Le plus tôt sera le mieux» dit-il aussi. Reste à savoir quand, avec qui et quelle Russie?
Pendant ce temps sur le front
Le président se place dans un temps indéfini, alors que sur le front l’armée ukrainienne résiste chaque jour, mètre par mètre, à la poussée de l’armée russe pour empêcher qu’elle envahisse le pays tout entier. Le 21 février dernier, à l’occasion du 1er anniversaire de son «opération spéciale», Vladimir Poutine avait réitéré sa volonté d’aller jusqu’au bout: «Nous allons régler pas à pas, soigneusement et méthodiquement, les objectifs qui se posent devant nous». Autrement dit: écraser tout le monde jusqu’à Kiev avant de négocier quoi que ce soit.
Le fait est qu’il y a bien une guerre sur le continent européen. Heureusement que l’Ukraine attaquée est soutenue par les pays occidentaux, sans quoi l’armée russe serait déjà aux frontières de la Pologne depuis quelque temps déjà. Au Conseil fédéral, c’est la cheffe de la Défense, Viola Amherd, qui semble avoir conscience de ce qui se passe sur le terrain et de l’importance de collaborer avec nos partenaires. Mais elle est bien isolée.
«Équilibre et unité»
Les prises de position d’Alain Berset ont suscité lundi des critiques dans les médias alémaniques, du président du PLR, Thierry Burkart, à celui du Centre, Gerhard Pfister, jusque dans son propre camp, de Cédric Wermuth. Ironie de l’histoire, c’est à l’UDC qu’il trouve aujourd’hui le meilleur soutien à sa vision de la neutralité. Alain Berset peut aussi compter sur un allié de dernière minute: le Vatican. Dans une interview accordée dimanche à la radiotélévision suisse italienne, le pape François a absous la Suisse de tout péché d’orgueil: «Quand la Suisse reste neutre dans les guerres, cela ne veut pas dire qu’elle s’en lave les mains; c’est une vocation d’équilibre, d’unité».