FranceLa police verbalise une journaliste qui parle à des gilets jaunes
Bien qu’elle ait présenté sa carte de presse, une collaboratrice de «L’Obs» a été menacée d’amende pour manifestation illégale dimanche. La préfecture a fini par s’excuser.
- par
- Michel Pralong
Les forces de l’ordre avaient l’air tendues, dimanche autour de l’Élysée, à en croire un incident qui s’est produit avec une journaliste de «L’Obs». À 18 heures, deux heures avant les résultats du premier tour de la présidentielle française, elle s’était rendue dans un café de la Madeleine, qui est également proche du QG de campagne d’Emmanuel Macron, pour interviewer quelques gilets jaunes. Elle voulait savoir leurs intentions de vote pour le deuxième tour et attendre avec eux de connaître le nom des deux candidats qui allaient s’affronter.
À 19 h 30, soit une demi-heure avant l’annonce des résultats, tout le monde sort et marche dans la rue, la journaliste continuant à bavarder avec eux, écrit-elle ce lundi matin. C’est alors qu’une trentaine de policiers casqués surgissent et les encerclent en annonçant un contrôle d’identité. «Je présente ma carte de presse, ce qui suffit normalement à ce qu’on vous laisse travailler tranquille, quand on est journaliste, en tout cas dans un contexte calme comme celui-ci, où rien ne menace apparemment l’ordre public», écrit-elle. Sauf que pas cette fois.
«Je ne manifeste pas, je travaille»
On lui demande ensuite une pièce d’identité, elle présente son permis de conduire. La police indique alors au petit groupe qu’elle va tous les verbaliser pour «participation à une manifestation illégale». Les gilets jaunes ne sont pas contents, mais ils ont l’habitude, explique la journaliste. Le contrôle se prolongeant, on approche de l’heure des résultats et dans le petit groupe, toujours bloqué, on regarde son téléphone pour avoir les dernières infos. Un policier demande alors à la journaliste son adresse et quand elle demande pourquoi, c’est pour lui envoyer l’amende. «Me verbaliser de quoi?» s’offusque-t-elle, «de manifestation illégale» répond le policier. «Je ne manifeste pas, je travaille».
Elle s’énerve, lui reprend sa carte d’identité des mains et c’est alors qu’elle est plaquée au mur et maintenue. Elle est menacée d’être embarquée au poste et on lui dit que si elle n’est pas contente, elle n’a qu’à se plaindre à l’inspection des polices. Les résultats tombent, la police finit par s’en aller, laissant les «verbalisés» sur place.
Ce lundi matin, suite à la publication de l’article, la préfecture de Paris a appelé «L’Obs» pour s’excuser et dire qu’il n’y aurait pas d’amende, mais elle s’est justifiée en disant que la carte de presse présentée n’était pas «de format classique». C’est faux, rétorque le journal, qui condamne ces entraves à la liberté d’informer.