Amérique latineVenezuela: victoire écrasante du pouvoir lors des régionales
Le pouvoir a remporté 20 des 23 postes de gouverneur et la mairie de Caracas face à une opposition divisée qui participait pour la première fois à un scrutin depuis 2017.
Le pouvoir du président Nicolas Maduro, dont la réélection à la présidence du Venezuela en 2018 n’est pas reconnue par une partie de la communauté internationale, a remporté une victoire écrasante aux élections régionales de dimanche, remportant 20 des 23 postes de gouverneur et la mairie de Caracas.
«Beau triomphe, belle victoire, belle récolte, produit du travail», a aussitôt exulté le président Maduro à la télévision, parlant de «résultats écrasants». La télévision étatique parle de «victoire historique de la révolution» chaviste (du nom de Hugo Chavez, figure de la gauche radicale latino-américaine et défunt prédécesseur de Nicolas Maduro).
L’opposition divisée participait pour la première fois à un scrutin depuis 2017 après avoir boycotté la présidentielle et les législatives. Malgré les discours appelant à l’union, elle n’a pas réussi à s’unir. Elle remporte trois états: l’île de Nueva Esparta, Cojedes et surtout le Zulia, état pétrolier le plus peuplé du pays dont la capitale est Maracaïbo, deuxième ville du Venezuela.
«La carte est majoritairement rouge (couleurs du pouvoir) comme il était à prévoir», indique le politologue Luis Vicente Leon, soulignant que la «division lamentable et absurde de l’opposition» lui a coûté une «victoire promise» dans l’état de Lara.
Le taux de participation s’est élevé à 41,8% avec 8,1 millions de votants de ce pays de 30 millions d’habitants touché par une crise économique inédite et par l’hyper-inflation, selon les résultats annoncés en soirée par le Conseil national électoral (CNE)
Opposition divisée
Avant l’annonce des résultats, l’opposant Henrique Capriles, deux fois deuxième de la présidentielle, avait émis des réserves considérant que la fermeture tardive des bureaux de vote était source de possibles fraudes: «Maduro et son parti ordonnent au CNE de ne pas fermer les bureaux quand il n’y a plus d’électeurs (...) Ils vont nous mettre des votes qui n’existent pas», avait-il écrit sur Twitter.
L’Union européenne avait déployé une mission électorale, la première depuis 15 ans. La mission présentera un rapport mardi.
Le ministre de la Défense Vladimir Padrino a assuré dans une déclaration télévisée en début de soirée que la journée s’était déroulée dans «la paix». Une personne a été tuée par balle près d’un centre de vote à San Francisco (Zulia, ouest). Le ministre de l’Intérieur a promis une enquête, assurant que ce n’était pas en relation avec l’élection.
Plus que le résultat, le scrutin est considéré important parce qu’il constitue un point de départ à la fois pour le pouvoir qui cherche à faire lever les sanctions qui pèsent sur le pays et pour une opposition cherchant à se reconstruire avant la présidentielle de 2024.
Faisant face à des sanctions économiques, notamment de la part des Etats-Unis qui veulent évincer Maduro du pouvoir, Caracas veut desserrer l’étau et voulait que ce scrutin soit une preuve de sa légitimité. Objectif de Caracas dont une partie des fonds à l’extérieur sont gelés: «faire lever au moins partiellement les sanctions, notamment celles sur le pétrole», estime Oswaldo Ramirez, consultant.
Maduro avait ainsi fait plusieurs concessions pour donner des gages à la communauté internationale, réformant le CNE pour y inclure l’opposition ou invitant des missions d’observation étrangères (UE, ONU, Fondation Carter).
De son côté, après avoir boycotté la présidentielle de 2018 et les législatives de 2020, l’opposition divisée a finalement décidé d’aller au scrutin, en espérant qu’il lui permettra d’impulser une dynamique positive en vue de la présidentielle de 2024.
Juan Guaido, sans pouvoir mais reconnu président par intérim par une cinquantaine de pays, estime qu'»il y a une certitude, Maduro est et continuera à être illégitime". «2021 commence le 1er janvier 2022», avait rappelé avant le scrutin un opposant, regrettant la division. «Il n’y a pas de possibilité de fraude avec les machines», avait souligné un spécialiste électoral de l’opposition avant le scrutin, «mais il peut y avoir de la coercition, de la persécution, de la motivation (achat de voix, service etc...), une inégalité de l’accès aux médias».