Procès de MoutierMariages forcés: les quatre frères assurent être «des gens civilisés»
Les quatre hommes accusés d’avoir maltraité leurs épouses pendant seize ans se présentent en victimes.
- par
- Vincent Donzé
La fratrie accusée de traite d’êtres humains a endossé le rôle de victime devant le Tribunal régional Jura bernois-Seeland. Après le père du clan d’origine balkanique, ses quatre fils n’ont pas seulement nié toute maltraitance envers leurs épouses pendant seize ans: ils ont exprimé leur tristesse. Faute de preuve irréfutable, la tâche du tribunal se complique.
Vidéo à l’appui, un frère a voulu démontrer que c’est son épouse qui se montrait agressive, notamment avec les enfants. «Il lui arrivait aussi de me frapper», a-t-il prétendu, selon «Le Journal du Jura». «Ma femme m’insultait parce qu’elle n’obtenait pas ses papiers, je ne faisais que lui répondre», a déclaré le jeune homme inscrit à l’assurance invalidité.
«Souvent ma femme me parlait mal. Moi je ne lui répondais pas», a affirmé un autre frère, selon le «JdJ». La fratrie conteste avoir isolé les épouses mariées de force: «Pour moi, les hommes et les femmes ont les mêmes droits», a affirmé un prétendu.
«Ma femme voyait qui elle voulait sortait quand elle voulait». ont entendu les cinq juges. «Si je lui demandais où elle allait, c’était pour que je ne m’inquiète pas de savoir où la chercher», a précisé un frère. «Nous sommes des gens civilisés», a lancé la fratrie.
Dans la normalité
Sur une capture écran d’un post Facebook attribué à une épouse avant sa venue en Suisse, il est écrit qu’«une princesse ne travaille pas». La défense a présenté des photos censées démontrer que les couples vivaient dans sinon dans l’harmonie, du moins dans la normalité. «Quand elle ne voulait pas qu’on couche ensemble, je respectais ce choix», a insisté un prévenu, selon le «JdJ».
La contre-attaque a fusé: «J’ai des preuves qu’elle était en contact avec un autre homme sur les réseaux sociaux. Elle écrivait parfois jusqu’à tard dans la nuit». Plus loin: «J’ai reçu des messages de sa mère dans lesquels elle me garantissait que je ne reverrais plus mes enfants et qu’elles allaient tout faire pour que j’aille en détention».
Expulsion du territoire
En instance de divorce, le plus jeune frère s’est plaint de ne voir ses enfants de cinq et six ans que deux heures par semaine. «Elle tentait de me prendre par le cou, j’essayais d’éviter le coup», a dit un prévenu cité par «Le Quotidien Jurassien».
Âgés de 26 à 38 ans, entrés en Suisse en 1998 pendant la guerre du Kosovo, les quatre frères sont établis désormais à Moutier, Crémines et Bienne. Au bénéfice de permis B ou F, ce dernier étant à renouveler chaque année, ils risquent une expulsion du territoire suisse. Commentaire d’un prévenu: «Me renvoyer là-bas, c’est m’envoyer à la mort».