Football: Le Tessin doit prendre au sérieux son football

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FootballLe Tessin doit prendre au sérieux son football

Avec le succès de Lugano en finale de la Coupe de Suisse, le football tessinois a été placé sous les projecteurs. Et cela doit accélérer son développement.

Valentin Schnorhk
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Valentin Schnorhk Berne

Un jour, peut-être, un éditeur tessinois aura l’idée de raconter la saison 2021-22 du FC Lugano. L’avenir fera la pertinence du projet. Parce que ces derniers mois ont peut-être été le prélude d’une ère un peu plus glorieuse à laquelle se préparent les Bianconeri. Non pas qu’ils ne viennent de nulle part, mais l’histoire racontée depuis le début du 21e siècle était surtout faite de déboires financiers et sportifs et de planification sportive un peu bancale. Avec la Coupe de Suisse remportée contre Saint-Gall (4-1) dimanche, il y a désormais un succès, et donc un engouement. Le timing est bien choisi. 

Parce que Lugano est au début de quelque chose. Ce titre-là lance un projet plus qu’il ne le couronne. Il faut rappeler que l’été passé, le club tessinois avait changé de propriété. Le président de longue date Angelo Renzetti a passé la main, vendant le club à Joe Mansueto, également propriétaire du Chicago Fire. La possibilité de voir plus grand. Mais avec patience.

Le projet global reste local

Rien n’a vraiment été bousculé du côté du Cornaredo: quelques joueurs sont arrivés pendant la saison (Amoura, Rüegg, Valenzuela, notamment), mais aucune dépense insensée n’a été effectuée. Et puis surtout, qu’importe leur vision globale, les dirigeants ont confié le destin de la formation luganaise à un homme qui n’a rien de plus local.

À 40 ans, Mattia Croci-Torti est en effet devenu le premier Tessinois à remporter la Coupe de Suisse. «C’est vraiment incroyable, quand je pense à là où j’étais en août», a souri Il Crus en conférence de presse dimanche. À savoir, un entraîneur-adjoint dévoué à son club. Qui n’avait jamais entraîné une première équipe professionnelle. Qui n’avait pas le diplôme d’entraîneur UEFA Pro (et il ne l’a toujours pas, puisqu’il est en train de le passer). Qui s’était vu confier ad interim l’équipe au moment du départ d’Abel Braga début septembre. Avant d’être confirmé quelques semaines plus tard à son poste.

Les larmes sincères de Mattia Croci-Torti, qui devient le premier entraîneur tessinois à remporter la finale de la Coupe de Suisse.

Les larmes sincères de Mattia Croci-Torti, qui devient le premier entraîneur tessinois à remporter la finale de la Coupe de Suisse.

Martin Meienberger/freshfocus

«Ce n’était pas un choix facile de la part du club, a-t-il reconnu. Avant la finale, j’ai dit à mon équipe: «Je n’ai pas été nommé pour mes compétences ou mon expérience, mais parce que je suis la personne qui vous fais le plus confiance». Aujourd’hui, ils me l’ont largement rendue.»

Personne en effet ne connaît mieux que Croci-Torti ce groupe luganais. Il est celui qui est parvenu à l’animer. A lui donner du crédit. En s’adaptant à ses caractéristiques. Et en faisant en sorte de préparer tous les matches du mieux possible, à l’instar de cette finale dans laquelle il s’est montré capable de révéler au grand jour les failles saint-galloises. «L’équipe ne m’a jamais abandonné», soufflait-il, comme pour lui reconnaître la fidélité avec laquelle elle reproduit ses consignes. Signe qu’on peut faire de grandes choses à Lugano, sans aller chercher un grand nom.

«L’effet Crus»

Indéniablement, cela a convaincu. Au fur et à mesure de l’aventure en Coupe de Suisse, le Tessin, ce canton où les animosités sont aussi nombreuses que les clubs professionnels qui peuvent y exister, s’est réuni derrière ce FC Lugano. Ils étaient près de 10’000 à avoir fait le déplacement du Wankdorf dimanche, prêts à croire à l’exploit. En 2016, pour leur dernière finale (perdue contre Zurich), ils n’étaient que 6000. Il y a un «effet Crus» au Tessin. «Je pense que cela a beaucoup compté, acquiesce le principal concerné. J’ai fait en sorte de toujours rester positif. Nous sommes un canton qui quand il le veut répond présent. Quand il veut faire la fête, il est là. Et j’ai été très content de voir une marée de tifosi partir de toutes les gares, et pas seulement de celle de Lugano. Cela veut dire qu’on a laissé quelque chose. Et les résultats ont aidé, bien sûr.»

Il y a donc quelque chose sur lequel construire au Tessin. Le football luganais peut être pris au sérieux. Il doit l’être. L’avenir qui s’y trace est plus favorable que jamais. Il y aura en plus un stade moderne (enfin!), accepté en votation populaire en novembre dernier, qui se construira sur les bases du Cornaredo actuel. Il sera a priori opérationnel d’ici à la saison 2025-26. De quoi nourrir encore un peu plus les ambitions et solidifier le projet.

Avec un entraîneur du cru, un projet viable, des installations qui vont se développer et même un public, le futur du football helvétique a la possibilité de s’écrire aussi au Tessin. Cette partie minoritaire et minorée de la Suisse doit s’en convaincre. Parce que depuis dimanche, tout le reste du pays est au courant.

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