BerneAu concert de Muse, les nuages ont voulu participer à la fête
À Bernexpo, le ciel s’est abattu sur les spectateurs venus voir le trio britannique, mercredi 12 juillet. Un concert humide qui restera d’autant plus dans les souvenirs.
- par
- Laurent Flückiger Berne
En quinze ans, Muse est venu des dizaines de fois en Suisse. Il y a eu les petites salles qu’ils remplissaient avec l’album «Showbiz» sous le bras. Puis, depuis un bout de temps maintenant, les plus grandes scènes qu’ils occupent avec des titres épiques. Et là, il n’est pas forcément facile de remettre de l’ordre dans ses souvenirs. Mais pour les spectateurs venus à Berne, la date du 12 juillet 2023 laissera une trace indélébile. Très humide, plutôt. Mercredi, le ciel s’est abattu sur le terrain de Bernexpo – la même arène d’une capacité de 30 000 personnes où se sont produits les Guns N’Roses la semaine dernière.
En milieu d’après-midi déjà, un orage force Émilie Zoé, ajoutée à la dernière minute (voir encadré), à interrompre puis repousser son soundcheck et lui donne des sueurs froides quant à l’état de son matériel. Le public attend patiemment que les portes s’ouvrent une demi-heure plus tard que prévue et s’installe autour de la très longue avancée de scène installée pour les stars de la soirée. À 18 h, la native de Lausanne et son batteur claquent 35 minutes de rock en profitant au maximum, alors que la pluie fait sa réapparition au deuxième morceau. Royal Blood, qui fait toute la tournée en première partie de Muse, leur succède avec une prestation honnête sous des nuages très hésitants.
On déroule la moquette
Il est 20 h 20. Dix minutes avant que Matthew Bellamy, Dominic Howard et Christopher Wolstenholme doivent faire leur entrée et qu’on profite enfin d’une bière au sec, les techniciens s’activent soudainement à dérouler de la moquette partout sur la scène. Soit ils sont très prudents, soit ils ont un bulletin météo bien plus précis que celui qui nous annonce une accalmie jusqu’à la fin du concert. C’était la deuxième option.
Muse arrive sur scène à quatre – Dan Lancaster est en renfort au clavier – tous masqués et vêtus de vestes noires à capuches, et c’est comme si les premières notes de guitare de Bellamy sur «Will of the People» avaient fait craquer les nuages. En un instant, c’est le déluge. Le concert vient de commencer, l’idée n’est pas de bouger, et les rares qui lâchent leur place ne trouvent de toute façon aucun couvert. On distingue en fond de scène une main et un énorme masque métallique. Celui-ci sert d’écran où est notamment projetée la tête du chanteur. En tout, Muse fera sept titres de son dernier album sorti l’été dernier et inspiré par l’instabilité dans le monde.
Serpentins, confettis et réponse massive
Alors que des trombes d’eau s’abattent toujours sur Berne, Matthew Bellamy n’hésite pas à emprunter l’avancée de scène en chantant, guitare en bandoulière dans le dos. Il ravit doublement le public puisqu’il l’emmène vingt-deux ans en arrière avec «Bliss». Après quarante minutes de concert, l’averse est passée et laisse la place à des serpentins sur «Compliance» puis à des confettis sur «Verona» – les spectateurs adorent ça. À mi-parcours, le groupe est irrésistible en jouant «Undisclosed Desires» au milieu du public. Et la réponse de celui-ci est massive quand vient «Supermassive Black Hole», suivi de «Plug In Baby» qui fait un effet monstre encore aujourd’hui. Ses morceaux des années 2000 restent les meilleurs, et «Starlight» chanté de bout en bout par la foule le prouve également juste avant le rappel.
Même si on pense que Muse ne nous emportera jamais autant qu’il le faisait avec ses projections de galaxies, à Berne, le trio britannique a présenté un show de deux heures bien travaillé avec des costumes et des images de révolutionnaires masqués, un show avec une couleur et de la cohérence. On regrette par contre le trop grand nombre de temps morts entre les morceaux, qui affaiblit quelque peu la puissance du spectacle offert. Et surtout, Matthew: retourne un peu derrière ton piano, s'il te plaît.
Émilie Zoé: «Jouer sur cette scène était incroyable!»
Une Romande a ouvert pour Muse, mercredi. Le groupe japonais One OK Rock, qui fait toute la tournée avec le trio britannique, ayant été contraint d’annuler pour cause de maladie, c’est Émilie Zoé qui l’a remplacé au pied levé, accompagnée de son batteur, Fred Bürki. Jusqu’ici, leur plus grande scène avait été le Stravinski à Montreux en 2022. Impressions à la sortie du concert.
Émilie Zoé, quel effet ça vous a fait de vous retrouver sur cette scène avant Muse?
C’était incroyable, ça m’a rempli de mon bonheur du début à la fin du concert. Avant de jouer, on se rassemble toujours avec mon équipe pour méditer cinq minutes, et je n’ai pas vraiment eu le trac. Je l’ai plutôt eu la veille, quand on nous a confirmé qu’on venait jouer.
Comment avez-vous appris qu’on comptait sur vous au pied levé?
Samedi, on a joué au Tessin et on pensait faire quelques jours de vacances dans les Grisons. Alors qu’on faisait le plein à la station-service, je reçois un coup du fil de mon management pour venir jouer à Berne. (Rires.) Mais ce n’était pas encore sûr, il fallait que le management de Muse se décide entre deux propositions. Et c’est plus tard que j’ai su que c’est Matthew Bellamy lui-même qui avait donné son aval. C’est fou!
Sacrée validation!
Oui. En même temps, ça fait douze ans que notre projet existe et j’ai l’impression que tout s’est fait étape par étape. Une évolution humaine, si je peux dire. Même si cette scène était inhumaine!
Quel sera votre prochain concert?
Le 5 août au Haldern Pop Festival en Allemagne. On y a joué en tant que découverte l’an dernier et on y retourne, cette fois sur la grande scène. Et comme les organisateurs savent que je fais souvent aussi des projets avec des chorales, ils m’ont proposé de faire un show spécial dans une église avec la chorale du festival.
Émilie Zoé en concert le 18 août au Lac Noir Schwarzsee Festival et le 24 août à Begnins (VD), JVAL Openair.