Football - Commentaire: Lausanne s’est séparé du coupable idéal

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FootballCommentaire: Lausanne s’est séparé du coupable idéal

Ilija Borenovic n’est plus l’entraîneur du club vaudois. Le technicien a été mis à pied. Une issue inéluctable après le camouflet subi dimanche. De là à calmer la colère du public…   

Nicolas Jacquier
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Nicolas Jacquier
Longtemps soutenus par ses dirigeants, Ilija Borenovic a été débarqué à trois jours du derby contre Servette. En 23 matches de Super League, il n’a eu l’occasion de fêter que… 2 victoires contre 7 nuls et 14 défaites.

Longtemps soutenus par ses dirigeants, Ilija Borenovic a été débarqué à trois jours du derby contre Servette. En 23 matches de Super League, il n’a eu l’occasion de fêter que… 2 victoires contre 7 nuls et 14 défaites.  

Pascal Muller/freshfocus

Pendant longtemps, il ne s’est rien passé à la Tuilière cette saison. Ni sur le terrain ni en dehors.

Lausanne pouvait perdre et accumuler les déboires, Ilija Borenovic, malgré l’accumulation des revers, avait la garantie de pouvoir y poursuivre sa mission dans une apparente et troublante sérénité.

Le technicien aurait pu être écarté cet automne déjà, ou encore avant Noël si l’on songe à la calamiteuse prestation livrée à Tourbillon (défaite 2-0 contre Sion) lors de la dernière journée avant la pause hivernale - ce ne sont pas les occasions de s’en séparer qui manquaient alors. Contre toute attente pourtant, le successeur de Giorgio Contini allait survivre à un bilan chiffré famélique, dans la lignée des résultats obtenus au printemps 2018 lors de son premier passage au bord de la touche après le limogeage de Fabio Celestini.

Progrès… inexistants

Son maintien surprise sur le très inconfortable banc vaudois était toutefois assorti de plusieurs conditions, exprimées dans un cahier des charges établi au sortir d’une première partie de saison faisant de l’actuel barragiste de Super League le candidat No 1 à la relégation aux yeux de beaucoup d’observateurs. En gros, il était demandé à Borenovic de démontrer sans délai (soit dès la reprise) qu’il pouvait bien s’imposer comme l’homme de la situation. Ce qui supposait obligatoirement une réaction afin d’effacer les doutes et trois points pour commencer 2022…

On sait ce qu’il est advenu, avec cette humiliation dominicale subie à domicile contre Saint-Gall. Une débâcle qui fait désordre, vécue de surcroît sous les yeux du CEO Bob Ratcliffe et de Julien Fournier (directeur du département football chez Ineos), venus constater de visu les progrès sans doute imprudemment promis.

Le timing interpelle

Dès cet instant, Lausanne fessé 5-1 comme il ne l’avait encore jamais été, l’issue devenait inéluctable - sans doute l’entraîneur lui-même s’y attendait-il. On peut résister à tout mais pas au spectacle d’une équipe indigente ayant démissionné, renonçant à exprimer les valeurs dans lesquelles le peuple vaudois aurait dû se retrouver. Seul le timing peut surprendre: dès lors que le sort du coach ne faisait plus mystère, pourquoi avoir laissé filer lundi et mardi pour en fin de compte actionner officiellement le couperet en milieu de semaine, à 72 heures d’un derby contre Servette toujours aussi capital (l’enjeu ne varie pas avec le changement de banc )?


Il serait profondément injuste aujourd’hui de faire porter le chapeau au seul Borenovic. Davantage formateur que compétiteur, l’homme a certes commis des erreurs, qu’il s’est empressé de confesser publiquement – avec une sincérité qui devait finir par se retourner contre lui -, mais il a aussi hérité d’une équipe composée de bric et de broc, sans ressort ni identité, privée de tout ce qui en faisait encore la force jusqu’en mai dernier. Pour la forme, le communiqué évoque un divorce à l’amiable, entériné d’un commun accord, voilà qui ne doit tromper personne.

Une situation devenue intenable

Si la direction du club s’est résolue à se séparer de Borenovic dans l’urgence - et Souleymane Cissé à lâcher un coach que son directeur sportif avait longtemps protégé -, c’est aussi parce que les responsables du LS ont sans doute été sensible aux dégâts collatéraux d’une situation devenue intenable. Avec un climat d’une extrême tension illustré par la colère du public et la fronde grandissante des supporters. A cet environnement malsain allait inévitablement s’ajouter des divisions dans le contingent, avec un vestiaire semble-t-il miné par les dissensions internes, certains joueurs ne voyant plus en leur coach celui qui pouvait réussir à les sortir du pétrin.

Abandonné par ses présumés leaders, Ilija Borenovic s’est ainsi retrouvé isolé, victime à la fois de sa trop grande bienveillance et des vents contraires - en 23 matches de championnats répartis sur deux périodes, il n’aura fêté que… deux victoires (acquises contre Grasshopper à la maison et Saint-Gall à l’extérieur).

Présenté comme le coupable idéal, l’homme a sauté parce qu’il fallait un fusible. A la Tuilière, l’avenir sportif n’est pas plus clair et dégagé pour autant. Le rendez-vous de samedi à la Praille, dans un derby lémanique où le comportement du visiteur et l’attitude des joueurs seront scrutés attentivement, dira si l’accusé Borenovic était vraiment le seul problème du LS.

On n’en est pas persuadé du tout. 

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