Annonces de Joe Biden  – Puiser dans les réserves US de pétrole, quel impact sur le marché?

Publié

Annonces de Joe BidenPuiser dans les réserves US de pétrole, quel impact sur le marché?

Face à la flambée des prix et à l’instabilité géopolitique, le président américain a décidé de tirer dans les réserves stratégiques de brut du pays vendredi, tout comme d’autres membres de l’AEI. 

Joe Biden a dit espérer une baisse de «10 à 35 cents le gallon» (3,78 litres) aux États-Unis.

Joe Biden a dit espérer une baisse de «10 à 35 cents le gallon» (3,78 litres) aux États-Unis.

AFP

La décision de Joe Biden de puiser plus de 180 millions de barils dans les réserves stratégiques américaines de pétrole durant les six prochains mois peut-elle stabiliser le marché et faire sensiblement baisser les prix de l’essence, comme l’espère le président américain?

Quel effet sur les prix du pétrole?

Les cours du baril de West Texas Intermediate (WTI), principale variété américaine, ont plongé jeudi après l’annonce, en baisse de près de 7%. Mais vendredi, les prix sont repartis à la hausse. «L’utilisation des réserves est intégrée par le marché, qui va maintenant se mettre à la recherche d’une autre nouvelle ouverture pour s’orienter», prévoit Andy Lipow, du cabinet Lipow Oil Associates.

L’engagement, vendredi, des autres pays membres de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) de tirer également sur leurs réserves, n’a que modérément pesé sur les cours, le WTI continuant à flirter avec les 100 dollars. «L’annonce (...) ne va pas avoir d’effet prolongé sur les prix», a abondé Edward Moya, analyste d’Oanda, «donc si les risques géopolitiques s’intensifient, le pétrole verra l’essentiel de ses pertes de la semaine s’annuler.»

Biden promet «d’aider les Américains»

Quel impact à la pompe?

Joe Biden a dit espérer une baisse de «10 à 35 cents le gallon» (3,78 litres) aux États-Unis. Vendredi, le prix de l’essence ordinaire n’avait perdu qu’un cent en moyenne, à 4,21 dollars, et restait proche de son record absolu (4,33), atteint le 11 mars dernier.

Andy Lipow table sur une diminution de 10 à 15 cents «d’ici une semaine à dix jours», mais pas davantage «parce que le marché voit cette (mesure) comme exceptionnelle. Elle ne va rien faire sortir de plus du sous-sol pour remplacer le pétrole russe.» Pour Bill O’Grady, responsable de la recherche à Confluence Investment Management, l’effet sur les prix de l’essence «sera probablement moindre que pour le brut», car les États-Unis, dont les capacités sont déjà utilisées à 92%, ne disposent pas des ressources suffisantes pour raffiner ce brut supplémentaire.

Y a-t-il un risque de nouveau choc dans six mois?

Une fois écoulés les barils américains et d’autres membres de l’AIE, les fondamentaux du marché vont reprendre le dessus. Or, avant même l’invasion de l’Ukraine et la vague de sanctions sur la Russie, qui a dissuadé une partie des intervenants d’acheter du pétrole russe, l’offre était déjà inférieure à la demande. «Les prix vont devoir remonter, pour stimuler l’augmentation de la production ou décourager la demande», anticipe Andy Lipow.

En outre, avec des réserves stratégiques qui pourraient atteindre leur plus bas niveau depuis 1984, les Etats-Unis vivraient mal un nouvel imprévu, prévient-il. «On sera dans la saison des ouragans et si une tempête paralyse une partie de la production dans le golfe du Mexique, nous n’aurons pas beaucoup de solutions pour combler ce manque.»

Dan Pickering, du cabinet Pickering Energy Partners, a souligné sur Twitter que les prix du baril pour livraison dans six mois ou plus avaient monté depuis jeudi, car «les réserves vont devoir être reconstituées» et les États-Unis devront racheter du pétrole sur le marché. Bill O’Grady, lui, parie sur un non remplacement des 180 millions de barils utilisés. «Si vous pensez vraiment que le monde veut sortir du pétrole», dit l’analyste, en référence au programme de Joe Biden, «il faut le vendre maintenant qu’il a de la valeur.»

Getty Images via AFP

Les producteurs américains vont-ils être dissuadés de pomper?

«C’est possible», estime Andy Lipow, «parce que cela va faire baisser les prix à court terme.» En outre, Joe Biden s’en est pris jeudi à l’industrie pétrolière, l’accusant de «(s’asseoir) sur ses bénéfices» plutôt que d’investir et de produire davantage. «Pourquoi devraient-ils augmenter leur production alors que le gouvernement fait tout pour faire baisser la valeur de ce qu’ils vendent?», s’interroger Bill O’Grady.

Les États-Unis peuvent-ils mettre en circulation un million de barils par jour?

Les analystes de JPMorgan estiment que le gouvernement américain ne pourra pas faire mieux que 850’000 barils quotidiens, «du fait d’enchères insuffisantes (mécanisme d’appel d’offres) et de contraintes liées à ses infrastructures», ce qui limiterait l’effet sur le marché.

Bill O’Grady affirme qu’une partie des oléoducs conçus à l’origine pour pomper le pétrole depuis les immenses cavernes de sel du Texas et de Louisiane dans lesquelles sont entreposées les réserves ne sont plus opérationnelles. «Je serais surpris s’ils arrivaient à déplacer 7 millions de barils par semaine.»

(AFP)

Ton opinion

0 commentaires