La forêt du futur plantée avec des cèdres

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ClimatLa forêt du futur plantée avec des cèdres

Des tests sont effectués à 57 endroits partout en Suisse, dans un seul but: identifier les essences adaptées au climat du futur. Exemple en Ajoie.

Vincent Donzé
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Vincent Donzé

Des hêtres victimes de la sécheresse, des épicéas victimes du bostryche: le réchauffement climatique modifie le paysage forestier dans le Jura et partout en Suisse. À quoi ressemblera la forêt jurassienne dans un siècle? Pour le savoir, il faut se rendre à Avignon (F)…

La riposte s’organise au niveau fédéral, avec des plantations d’essences de demain. Des tests sont effectués à 57 endroits d’altitude différente, dans un seul but résumé par Patrice Eschmann, chef de l’Office jurassien de l’environnement: identifier les essences adaptées au climat du futur.

«Les étés, toujours plus secs et plus chauds, affectent durement la forêt et auront tendance à se généraliser à l’avenir», indique l’Office jurassien de l’environnement. Dans le média «ArcInfo», la climatologue neuchâteloise Martine Rebetez assure qu’à la fin du XXIe siècle, «il sera fréquent de dépasser les 40°».

Mont Ventoux

À Bienne, en milieu urbain, le Service des espaces verts a choisi de planter des amandiers dans le parc municipal. Dans le parc d’une villa, la paroisse Sainte-Marie a remplacé un hêtre par un tilleul. Mais là, en Ajoie, il s’agit d’imaginer une forêt futuriste en visitant l’Ardèche: un cèdre planté à Chevenez provient du mont Ventoux.

Sur une surface d’un demi-hectare, plusieurs provenances d’essences forestières indigènes ont été sélectionnées: sapin, érable sycomore, hêtre, chêne sessile, tilleul à petites feuilles… S’y ajoutent des espèces étrangères provenant de régions plus chaudes et sèches, comme le cèdre de l’Atlas, le noisetier de Byzance et le douglas.

Faire juste

«On ne verra pas le résultat, réservé à nos petits-enfants, mais on espère faire juste», glisse Patrice Eschmann, chef de l’Office jurassien de l’environnement, pour qui il importe de «travailler pour les futures générations». La forêt d’aujourd’hui n’est pas naturelle: elle est gérée pour être rentable, ce qui explique la présence des épicéas plantés à l’autel du rendement, au pays du feuillu. «La nature pourrait faire notre travail…», dit quelqu’un en plantant un arbre.

Pour les professionnels de la branche et les propriétaires forestiers, «il est primordial de savoir quelles seront les essences à même de supporter ces changements de conditions, la pérennité de l’ensemble des prestations forestières étant en jeu», indique Noémie Schaffter, collaboratrice scientifique à l’office de l’environnement.

Institut fédéral

Le projet appelé «Plantations expérimentales d’essences d’avenir» a été développé par l’Institut fédéral de recherches (WSL), en collaboration avec l’Office fédéral de l’environnement (OFEV). Les offices cantonaux des forêts et de nombreux propriétaires forestiers sont partie prenante.

Au niveau national 18 essences forestières – dont huit indigènes – sont testées à différentes altitudes et dans différentes régions climatiques. Dans ce grand projet national, une placette a été retenue en Ajoie, au lieu-dit «Foigeret» dans les forêts de la commune de Haute-Ajoie.

Au cours des 30 à 50 prochaines années, chaque tige plantée sera régulièrement examinée pour savoir comment poussent et se développent les différentes essences. Les premiers résultats de ces plantations expérimentales sont attendus dans cinq ans. «Ils doivent aider à identifier des essences d’avenir adaptées au climat futur, et obtenir des indications sur les meilleures provenances de semences», précise Noémie Schaffter.

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