FootballMichael Frey, une saison de rêve en Belgique
Co-meilleur buteur du championnat belge, l’attaquant bernois affiche un niveau d’efficacité et de confiance inouï. Gros plan avant le déplacement à Gand ce dimanche (16h).
- par
- Brice Cheneval
Les statistiques ne disent pas tout. En revanche, elles restent le meilleur indicateur d’une progression. Et celle de Michael Frey est indéniable. Sur l’année 2021, l’attaquant bernois n’est autre que le 7e buteur le plus prolifique au sein des 15 meilleurs championnats européens. Grâce à ses 25 réalisations en 35 matches, il a terminé devant Lionel Messi, Kylian Mbappé ou encore Mohamed Salah. Un constat dingue. Il ne s’agit pas ici de suggérer que Frey appartient à la même caste que ces superstars, simplement de constater les hauteurs auxquelles ce dernier s’invite désormais.
Il y a encore 6 mois, le natif de Munisenges jouissait d’un relatif anonymat. Il sortait de sa saison la plus aboutie, établie du côté de Waasland-Beveren: 17 buts en 32 matches toutes compétitions confondues. Jamais le grand avant-centre - 1,90 m - n’avait atteint un tel total. C’était même seulement la troisième fois depuis ses débuts professionnels, en 2012, qu’il bouclait un exercice avec plus de 10 réalisations au compteur. Exprimé plus trivialement, rien ne laissait présager sa soudaine transformation.
Transféré au Royal Antwerp cet été, Michael Frey affole les compteurs: déjà 18 buts en 23 matches de championnat, ce qui en fait le co-meilleur réalisateur de D1 belge avec Deniz Undav, le nouveau partenaire de Cameron Puertas à l’Union Saint-Gilloise. «Même s’il avait déjà montré de belles choses à Waasland-Beveren, cela reste une surprise de le voir évoluer à ce niveau, reconnaît Guillaume Gautier, suiveur attentif de la Division 1A pour l’hebdomadaire Sport/Foot Magazine. Il était censé jouer un rôle de doublure et aujourd’hui, il est titulaire à part entière.» «On en parle entre joueurs et ce qui se dit, c’est que ce qu’il fait est incroyable», corrobore l’ailier genevois Dereck Kutesa, prêté à Zulte Waregem.
Un quintuplé dès la 3e journée
Sa saison est émaillée de quelques coups d’éclat, comme cette série de 6 matches consécutifs ponctués d’au moins un but, entre le 29 août et le 3 octobre. Ou le quintuplé claqué sur la pelouse du Standard de Liège dès la 3e journée. «J’étais sur place ce jour-là, c’était surréaliste, hallucine encore Guillaume Gautier. Je n’avais jamais vu une telle performance dans un stade pourtant pas très accueillant pour les adversaires. Je devais noter les joueurs et, pour la première fois, j’ai mis un 10. Je ne pouvais pas faire autrement, il a tout réussi!»
Il y a bien eu de rares moments de creux, notamment en fin d’année. Son mutisme lors du mois de décembre a fait remonter les doutes à son sujet. Le Suisse les a rapidement balayés, inscrivant un doublé dès la reprise, suivi d’un nouveau but au match suivant.
À 27 ans, Michael Frey semble avoir atteint sa plénitude. Si bien que son nom est scruté à chaque convocation de l’équipe de Suisse. Même s’il assurait le surveiller «de près» début octobre, Murat Yakin ne lui a pas encore offert une place dans son groupe. Un choix accueilli avec stupéfaction en Belgique, tant le Bernois frappe les esprits.
Le plus marquant, dans sa spectaculaire ascension, réside dans son efficacité devenue clinique. Selon le modèle des Expected Goals, l’ancien joueur de Young Boys, Lucerne et Zurich devrait compter un peu plus de 12 buts (12,52) à ce stade de la saison, au lieu de 18. Aucun autre attaquant du championnat n’affiche un tel écart. «Là où on voit que c’est un grand joueur, c’est dans ses appels, ses déplacements, témoigne Ismaël Kandouss, défenseur de l’Union Saint-Gilloise. Quand on a affronté Antwerp (ndlr: défaite 1-2 le 26 septembre), il n’a pas eu énormément d’occasions mais ça lui a suffi pour faire la différence.»
Mieux entouré
Dereck Kutesa a croisé son compatriote sur les pelouses de Super League de 2017 à 2018. Il est donc bien placé pour observer le changement: «Je savais que c’était un buteur mais de là à ce qu’il score autant, je ne m’y attendais pas. Ce que je connaissais de lui, c’est que c’était un travailleur, qui a faim de buts. Là, j’ai la sensation qu’il a encore plus faim qu’avant.»
Qui plus est, à Antwerp, club programmé pour jouer le haut de tableau, Frey bénéficie d’une qualité d’effectif bien supérieure à ce qu’il a connu à Waasland-Beveren. «Il se construit rarement un but seul, il a besoin des autres. Et sur ce point, il est mieux entouré qu’à Beveren. Il doit moins s’éparpiller», relate Guillaume Gautier.
Hormis sa réussite offensive, le profil de Frey n’a pas fondamentalement changé. «Ce qui impressionne, avant tout, c’est sa puissance, poursuit le journaliste. Il est très costaud, athlétique. Il y a un côté rugbyman dans ses percées. Un joueur qui l’a affronté m’a dit: «Quand il vient te presser, tu as peur!» Il se dépense beaucoup pour l’équipe, ce n’est pas le genre à attendre dans la surface ou à garder le ballon.»
Dans son sillage, Antwerp est installé sur le podium et peut encore rêver du titre. Un petit miracle, à en croire Guillaume Gautier - «Dans le contenu collectif c’est pauvre, Antwerp est en surrégime» -, rendu possible par les prouesses du Bernois. «Frey fait davantage briller Antwerp que l’inverse», ponctue le journaliste.
La marque des grands.