Prévoyance socialeLa classe moyenne discriminée par le 3e pilier à la retraite
Selon une enquête de Comparis, les personnes ayant des revenus intermédiaires n’ont aucune chance de maintenir leur niveau de vie à la retraite en raison de versements trop faibles.
![Les retraités ont besoin de 20% d’argent en moins que les personnes actives pour subvenir à leurs besoins. Mais il est quasi impossible d’atteindre 80% de ses anciens revenus une fois à la retraite. Les retraités ont besoin de 20% d’argent en moins que les personnes actives pour subvenir à leurs besoins. Mais il est quasi impossible d’atteindre 80% de ses anciens revenus une fois à la retraite.](https://media.lematin.ch/4/image/2023/11/08/cf4e1538-df10-4d0b-9d32-18b4e8a4090a.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=max&w=1200&h=1200&rect=217%2C324%2C1652%2C1041&fp-x=0.5&fp-y=0.5003663003663004&s=c3c2b014643ec0a691dfd4eb2f41d593)
Les retraités ont besoin de 20% d’argent en moins que les personnes actives pour subvenir à leurs besoins. Mais il est quasi impossible d’atteindre 80% de ses anciens revenus une fois à la retraite.
20min/Michael ScherrerPour que les personnes qui partent à la retraite puissent maintenir leur niveau de vie antérieur, elles ont besoin d’environ 80% de leur dernier revenu professionnel. Or, c’est impossible d’arriver à ces montants, en particulier pour la classe moyenne, révèle mardi une étude de Comparis.
Pour les femmes qui touchent un revenu annuel brut supérieur à 96’000 francs et les hommes un salaire annuel supérieur à 105’000 francs, le maintien du niveau de vie à la retraite n’est pas possible avec les seules rentes de l’AVS et de sa caisse de pension additionnées à celle du pilier 3a, ce qui va à l’encontre du principe des trois piliers, critique Comparis. «Ceci même si le montant maximal de l’AVS est versé pendant 44 ans (pour les hommes) ou 43 ans (pour les femmes).»
Pas de possibilité fiscale supplémentaire
Car contrairement à ce qui est le cas pour les salaires annuels supérieurs à 129’060 francs, il n’existe aucune possibilité supplémentaire pour la classe moyenne de se constituer une prévoyance de manière optimisée sur le plan fiscal, relève le comparateur.
Un homme célibataire ayant un revenu de 129’060 francs qui vit jusqu’à 85 ans a besoin de 717’500 francs d’épargne au moment de la retraite, en plus des rentes de l’AVS et de la caisse de pension pour maintenir son niveau de vie durant les 20 ans qui suivent la retraite. Il devrait donc pouvoir verser un peu plus de 10’100 francs par an dans le pilier 3a, dès l’âge de 20 ans, a calculé Comparis. Pour un homme ayant un revenu de 120’000 francs, il faudrait qu’il verse 8950 francs par an. Et s’il gagne 110’000 francs, ce montant devrait être de 7660 francs. Or, aujourd’hui, il n’est possible de verser que 6883 francs par an.
Les femmes «massivement discriminées»
Et c’est encore pire pour les femmes actives, car elles vivent trois ans de plus que les hommes et partent à la retraite un an plus tôt. En plus de la perception des rentes AVS et de la caisse de pension, elles devraient donc pouvoir recourir à des avoirs de prévoyance privée durant 24 ans. Avec un revenu de 129’060 francs, elles devraient pouvoir verser 12’400 francs par an dans le pilier 3a dès l’âge de 20 ans. Pour un revenu de 120’000 francs, ce montant s’élève à 11’000 francs par an, et pour un revenu de 110’000 francs, 9400 francs.
«En Suisse, les femmes qui font carrière sont les parents pauvres de la politique de prévoyance. Elles sont massivement discriminées par le système», critique Leo Hug, expert Prévoyance chez Comparis. Du coup, le comparateur demande que les versements maximaux autorisés dans le pilier 3a soient portés à 12’400 francs pour les femmes et à 10’100 francs pour les hommes.
Révision de la LPP inutile
En ce qui concerne le 2e pilier, dont la révision est actuellement discutée aux Chambres, Comparis considère qu’une réforme de la prévoyance professionnelle obligatoire est inutile. «Les chiffres varient, mais on estime que seuls 15% environ des assurés LPP ont droit à un taux de conversion de 6,8%. En outre, un réseau de prestations complémentaires existe déjà, qui permettrait de compenser d’éventuelles diminutions de rentes», explique Leo Hug. Il a toutefois calculé que les personnes sans fortune notable percevant des prestations complémentaires, à Lausanne par exemple, ont des revenus après impôts presque équivalents à ceux de personnes anciennement salariées avec salaire LPP maximal.