InterviewBigflo & Oli: «Notre rêve est de faire dix dates dans dix opéras»
Nous avons rencontré les deux frangins Ordonez juste avant leur concert au Paléo, vendredi 21 juillet dans leur loge au milieu de photomontages de Maradona et de cartes Pokémon.
- par
- Laurent Flückiger
Avec Martin Garrix, ils étaient sans doute les plus attendus au Paléo vendredi soir 21 juillet. Bigflo & Oli, les deux frangins Ordonez natifs de Toulouse, se sont produits pour une nouvelle fois au festival, la deuxième sur la Grande Scène. Nous les rejoignons en backstage à 20 h, une heure avant leur show. Dans leur loge, il y a une collection de maillots, polos et T-shirts. Chacun a sa penderie. «On en a beaucoup, on fait 24 dates. Voilà le maillot du club de River Plate», nous montre fièrement Bigflo, en référence aux origines argentines de leur papa.
Je remarque qu’il y a deux photomontages de Diego Maradona scotchés au mur. Vous les emmenez partout?
Bigflo: C’est un petit jeu qu’on a. Dans la liste des choses qu’on demande, il y a une photo de Maradona. Et là, je t’avoue qu’ils se sont chauffés. (Rires.)
Oli: Comme on n’est pas très fun, on ne boit pas d’alcool, on ne fume pas, on ne demande rien de fou, on s’est permis de faire cette blague.
B.: Et je demande toujours un paquet de Pokémon.
Tu as eu ce que tu voulais?
B.: Non, je n’ai rien eu.
O.: On donne les cartes aux petits après.
B.: Ici, ils ont vraiment joué le jeu. La fête est différente selon comment le festival se donne. S’ils se sont fait chier à faire tous ces photomontages marrants, c’est qu’ils se sentent impliqués et qu’ils nous aiment bien.
Et au Paléo, vous vous y sentez un peu comme à la maison.
O.: Oui, le Paléo, c’est de beaux souvenirs. En 2015, c’était l’un de nos premiers grands festivals et c’est un rendez-vous mythique pour nous.
B.: Ce festival nous a vus grandir. Il y a à chaque fois une évolution. On a commencé par une petite scène, ensuite la Grande Scène à 19 h et ce soir (vendredi) à 21 h.
La nouveauté, c’est que vous êtes accompagnés d’un orchestre et que le show est redevenu plus rap.
B.: Effectivement, il y a beaucoup plus de musiciens, notamment une section de cuivres qui amène un vent frais sur la prod. Et on a avec nous le beatboxer Wawad qui fait partie de Berywam. Il était libre cet été, on a de la chance de l’avoir, c’est un de nos amis d’enfance, le frérot, et il a percé en même temps que nous. Et plus de hip-hop sur scène, tu dis? Le dernier album est plus rap, c’est ce qui donne probablement cet effet. Au début, on a un gros morceau de sept minutes de pur rap et plus tard on remet des vieux sons, on fait un medley.
Qu’est-ce qui a déclenché cette envie de revenir à plus de rap?
O.: On a tenté plein de choses, et c’est comme la mode, ça revient. Cela nous plaisait de se remettre au freestyle comme on nous a connus sur YouTube à nos débuts. On a aussi fait une émission radio sur Skyrock qui a bien tourné et qui nous a redonné envie de rapper.
B.: On pensait que les morceaux rap fleuves n’intéressaient pas forcément les gens, mais après l’émission on a eu beaucoup de demandes du public à revenir à ça.
Pourquoi pensiez-vous que les morceaux rap n’intéressaient plus?
O.: À un moment donné, le rap non mélodique n’avait plus trop la cote. Mais aujourd’hui il y a toute une vague de rappeurs qui reviennent à ça. Je ne dis pas que c’est le retour à l’âge d’or, mais les jeunes aiment ça.
Vous avez un orchestre et j’ai lu que vous pensez à avoir un orchestre symphonique un jour.
O.: Oui, ça serait un rêve de faire, pourquoi pas, une tournée de dix dates dans dix opéras. On embarquerait l’orchestre de Toulouse. Avant, il y a déjà pas mal de choses à faire.
Toutes les générations écoutent Bigflo & Oli. N’est-ce pas là votre plus grand succès?
O.: C’est l’une de nos plus grandes fiertés. Notre premier titre connu date de bientôt dix ans et, quand on regarde dans le rétro, on se dit que des gens d’âges et de styles différents ont été touchés par nos histoires, qu’ils se mélangent. On les voit grandir. C’est un peu comme avec une saga, comme avec Harry Potter qu’on voit se poser des questions.
B.: La plus grande difficulté est de fidéliser ces gens. Ma fierté est de l’avoir réussi.
O.: C’est aussi pour ça que notre dernier album s’appelle «Les autres c’est nous». Il y a une réflexion sur le fait de devenir l’autre. On était les rookies, maintenant on est un peu moins jeunes et on est devenus ceux qu’on voyait avec un peu plus de carrière.
Un autre de vos succès est d’avoir réussi à lâcher les réseaux sociaux durant deux ans. Vous racontez dans le morceau «J’étais pas là» que ça ne vous a pas manqué.
B.: Cela nous a fait beaucoup de bien. On a totalement changé notre rapport à réseaux sociaux. Je me suis rendu compte que ça bouffait trop de temps sur ma vie. Dans mon entourage, il y en a beaucoup qui prennent cette décision. On a été la première génération à les prendre en pleine tête, au lycée déjà, on était des cobayes. Je crois qu’on a même été plus accros que les jeunes d’aujourd’hui qui en connaît les affres.
O.: Avec tous les derniers événements, avec le Covid, beaucoup réalisent qu’on y lit beaucoup trop de conneries. Les créateurs de contenus se font partout tailler. Au bout d’un moment, on veut moins nourrir le monstre.
Vous ne craigniez pas que le public vous suive moins?
B.: Si, un peu. Mais on savait que le public de base resterait. On a aussi eu peur d’avoir eu notre momentum, et que ce soit fini. Le quatrième album était un challenge. Quand on parle avec les anciens, avec Soprano, par exemple, ils nous disent que le plus difficile est de durer. Et pour y arriver, il faut se renouveler.
Vous revenez à l’Arena de Genève le 9 novembre prochain. Faites-nous saliver.
B.: Le show sera plus long et plus abouti qu’en festival. Le public aura des bracelets lumineux comme ceux des concerts de Coldplay.
O.: On démarre le show dans le cube en verre du clip «Sacré bordel». Après, on fait certains morceaux qu’on ne peut pas se permettre de faire en festival, des morceaux plus lents, plus touchants, avec des histoires. Comme «José et Amar» qui rendent hommage à nos grands-pères. Un titre qu’on ne joue pas au Paléo où le public a envie de s’éclater.
Et vous, vous éclatez hors scène au Paléo?
B.: On sera à Martin Garrix. On a des potes qui sont venus de Toulouse. Puis on ira au concert de Josman. À chaque festival, on essaie d’aller voir d’autres artistes. On kiffe.