Environnement: L’Himalaya, cette décharge à ciel ouvert perchée sur le Toit du Monde

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EnvironnementL’Himalaya, cette décharge à ciel ouvert perchée sur le Toit du Monde

Un explorateur français et son équipe viennent de retrouver 1,6 tonne de déchets plastiques abandonnés par des expéditions à l’assaut des plus hauts sommets de la planète.

Le problème de la pollution causée par les expéditions dans l’Himalaya est récurrent depuis l’ouverture du tourisme dans la région, dans les années 1920. Ici, une opération de nettoyage sur l’Everest, en 2010.

Le problème de la pollution causée par les expéditions dans l’Himalaya est récurrent depuis l’ouverture du tourisme dans la région, dans les années 1920. Ici, une opération de nettoyage sur l’Everest, en 2010.

AFP

Des montagnes de bidons, tentes, tubes de PVC et bouteilles: le plastique est partout, même sur les plus hauts sommets du monde. Un explorateur français et son équipe viennent de retrouver dans l’Himalaya 1,6 tonne de déchets plastiques, alors que s’ouvrent des négociations pour tenter de juguler cette pollution au niveau mondial.

«C’est une vraie décharge. Derrière chaque rocher, on trouve quantité de bouteille d’oxygène, de conserves, des toiles de tente, des chaussures, c’est vraiment aberrant», témoigne Luc Boisnard depuis le Népal, au retour d’une première tentative d’escalade du Makalu, 8485 mètres, où il espère remonter prochainement.

L’objectif de ce chef d’entreprise de 53 ans, alpiniste de longue date, est de dépolluer les hauts sommets qui pour beaucoup «sont aussi devenus de gigantesques poubelles». Nom de l’opération et de l’association qu’il a créées autour de ce projet: Himalayan Clean-Up. L’expédition sur le Makalu, partie fin mars, est sa deuxième après une ascension de l’Everest en 2010. En parallèle un autre membre de l’association vient tout juste de redescendre de l’Annapurna (8091 m).

Restes d’expéditions accumulés depuis les années 1920

De ces deux ascensions, les deux hommes, aidés chacun d’une dizaine de sherpas, ont déjà ramené 3,7 tonnes de déchets, dont 45% de plastiques (1100 kg sur le Makalu et 550 kg sur l’Annapurna). Lors de sa première expédition sur le Toit du Monde, Luc Boisnard avait déjà ramené 1 tonne de déchets dont 550 kg de plastique.

Essentiellement, ces déchets sont les restes d’expéditions d’altitude accumulés depuis 1920, début de l’ouverture au tourisme de la région. Soucieux d’alléger leur paquetage – et parfois aussi peu respectueux de l’environnement – un certain nombre de grimpeurs en herbe laissent volontairement une partie de leurs affaires autour des camps de base voire carrément sur les chemins menant aux sommets.

Jetés dans les glaciers

Certains «sont aussi jetés dans les glaciers himalayens d’où ils ne ressurgiront que dans 200 ans», s’insurge Luc Boisnard. Ces plastiques se désagrègent lentement, polluant durablement les paysages mais aussi les rivières. Déjà en 2019 une étude scientifique avait démontré la présence de microplastiques (fibres de polyester, d’acrylique, de nylon et de polypropylène) au-delà des 8000 mètres d’altitude, y compris dans la neige.

Cette pollution est une nouvelle illustration de l’omniprésence du plastique, matière dérivée du pétrole, alors que s’ouvre lundi à Paris le deuxième cycle de négociations pour tenter d’élaborer d’ici fin 2024 un traité juridiquement contraignant sous l’égide des Nations Unies pour mettre fin à la pollution plastique.

Jusque dans le lait maternel et le placenta des humains

Au-delà de la question des déchets, le premier objectif du futur traité plastique sera la «réduction de l’usage et de la production de plastique». Cette dernière a plus que doublé en 20 ans pour atteindre 460 millions de tonnes par an et pourrait encore tripler d’ici 2060 si rien n’est fait. Deux tiers sont jetés après une seule ou quelques utilisations et moins de 10% des détritus plastiques sont recyclés.

Et en plus des montagnes, des plastiques de toutes tailles sont aussi retrouvés en masse au fond des océans, dans la banquise, l’estomac des oiseaux… et parfois aussi dans le sang, le lait maternel ou le placenta des humains.

(AFP)

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