Tour de RomandieChouchou du peloton, la caféine excite-t-elle les esprits?
Rituel d’avant course et coup de boost nécessaire sur l’étape pour certains, le café est responsable de la nervosité du peloton pour d’autres. Tour d’horizon en bord de route du Tour de Romandie.
- par
- Sylvain Bolt -Oron
Personne n’échappe à la pause-café, la fameuse «coffee ride» très populaire dans le milieu de la petite reine. Elle permet aux coureurs de socialiser lors de leurs sorties d’entraînement, donne parfois aussi un but à l’escapade. Au sein du peloton, le café a la cote. Sur le Tour de Romandie, on le savoure avant la course, comme Antoine Debons. «Un en me levant, un autre juste avant le départ, ce n’est pas excessif, sourit le grimpeur valaisan. Mais j’évite la caféine pendant la course sur des épreuves par étapes comme ici, de peur qu’elle ne perturbe mon sommeil.»
Le Jurassien Yannis Voisard, actuel meilleur suisse sur le Tour de Romandie (9e), a une autre stratégie caféinée. «Je n’en consomme pas avant la course pour bénéficier du maximum d’effet possible en course, explique le coureur de la formation Tudor. Pendant l’étape, je prends juste un gel, qui représente environ 180 milligrammes, ce qui est assez selon moi. Et j’avale ça environ une heure avant l’arrivée.»
Interdite jusqu’en 2004
La boisson doit aussi sa popularité au fait qu’elle dope la performance. Elle était d’ailleurs interdite au-dessus d’un certain seuil jusqu’en 2004 par l’Agence mondiale antidopage et a mis hors-jeu l’Italien Gianni Bugno, convaincu de dopage à la caféine en 1994. Les bienfaits du café sont notamment reconnus pour les activités d’endurance et pour éviter que le cerveau ne se mette en veille.
Un coup de booste dont certains autres coureurs raffolent. En gel ou même en gommes à mâcher. La surconsommation de café laisse un goût amer à ses détracteurs. Elle serait responsable d’une certaine nervosité dans le peloton et pourrait être l’une des raisons des chutes qui ont marqué plusieurs épreuves ces dernières semaines.
«Quand certains commencent à prendre des gélules de caféine à haute dose, ça devient problématique, estime Guillaume Martin, au départ de la 2e étape à Fribourg. C’est un excitant, donc avoir une bande d’excités au milieu du peloton, ça peut générer des chutes.» Le coureur français ne déroge pourtant pas à la tradition: un ristretto avalé dans le bus avant de se lancer sur l’étape du jour.
«Mais j’ai entendu parler de chiffres impressionnants dans le peloton, certains consommeraient plus de vingt espressos, s’inquiète le cycliste. Évidemment qu’on ne va pas interdire le café et la caféine, mais on peut peut-être essayer de penser à mettre une limite!»
«Ça peut paraître surprenant que la caféine ne soit plus interdite par l'AMA (ndlr: l’Agence mondiale antidopage) car elle est reconnue pour améliorer les performances, jugeait récemment Xavier Bigard, le directeur médical de l'UCI dans l’Equipe. Mais c'est parce que sa détection pose problème si on veut éviter les faux positifs ou les faux négatifs, d'ailleurs. Il y a une très grande variabilité entre les individus dans l'assimilation de la caféine. On est incapable de déterminer un seuil admissible pour tout le monde.»
Ou quand le café donne du grain à moudre aux instances.