FootballYann Sommer est-il trop petit pour être un grand gardien?
Le portier du Bayern, du haut de ses 183 centimètres, est sous le feu de la critique de certains en Allemagne. Le point avant le match retour contre Manchester City, ce mercredi soir.
- par
- Daniel Visentini
Il faut dire la chose crûment, sans détour: Yann Sommer est trop petit. Pour un gardien de but de niveau international, s’entend. Du haut de ses 183 centimètres, le dernier rempart du Bayern et de l’équipe de Suisse a toujours souffert de ce déficit de taille, à tort ou à raison.
Il compense par son placement, par ses réflexes, par sa lecture du jeu, mais, invariablement, le débat autour de sa taille refait surface et, quand on vient remplacer le blessé Manuel Neuer (193 cm) à Munich, il suffit de peu pour l’alimenter. Un 3-0 encaissé à Manchester City il y a une semaine, par exemple, un nul concédé face à Hoffenheim en championnat ce week-end, une période compliquée pour le Bayern talonné par Dortmund au classement et des explications (des excuses?) à trouver avant le match retour si mal emmanché de ce mercredi soir contre les Anglais.
Il faut l’admettre, le profil de Yann Sommer est atypique au plus haut niveau pour le poste de gardien. L’évolution est nette: depuis plusieurs années déjà, les portiers gagnent des centimètres dans tous les championnats.
Une moyenne vers 190 cm
En 2015, une étude qui portait sur les gardiens des sept championnats majeurs européens avait livré son verdict: la taille moyenne des derniers remparts titulaires s’élevait à 189 cm. Pour la Premier League, elle culminait même à 192 centimètres. En 2022, la Ligue 1 s’était elle aussi penchée sur la question: en 20 ans, la taille des gardiens de l’élite française est passée de 184 cm à 190 cm. Les attaquants eux-mêmes étant de plus en plus grands et de plus en plus physiques, c’est naturel.
Longtemps, les gardiens qui dépassaient les 190 cm avaient pour réputation d’être lents, moins mobiles, par opposition aux portiers plus petits, mais plus explosifs, naturellement instinctifs. À voir Thibaut Courtois se comporter aujourd’hui comme un chat géant avec ses 199 centimètres, tout s’efface. La formation a évolué en parallèle, elle favorise pour les grands aussi la vitesse, la détente, la souplesse, la réactivité.
Des critiques injustes?
Yann Sommer est-il perdu dans ce monde des géants? Au lendemain de la défaite 3-0 à Manchester, il y a une semaine, il a essuyé de sévères critiques. Dietmar Hamann (ex du Bayern), y est allé de son explication: «Pour moi, le gardien était désespérément dépassé aujourd’hui», a-t-il asséné. Pour lui, la nagée d’Upamecano (les bourdes du défenseur français ont coûté deux buts) dans cette rencontre était due aussi, partiellement, au portier suisse: «Si vous êtes un peu incertain en tant que défenseur central, alors vous avez besoin d’un gardien de but qui vous donne la sécurité. Le gardien de but n’a pas seulement déstabilisé l’équipe aujourd’hui, mais au cours des dernières semaines», s’est-il lâché.
Roman Weidenfeller (ex-gardien allemand) a de son côté clairement mis en cause la taille de Sommer: «Ce sont les centimètres qui lui manquent, Manuel Neuer l’aurait arrêté», a-t-il lancé, évoquant notamment le tir de Rodri sur le 1-0 de City. Un tir dans la lucarne…
À ce début de cabale contre lui, Sommer a rajouté malgré lui un curieux but concédé contre Hoffenheim, le week-end passé, le 1-1 d’un nul pas au programme pour le grand Bayern.
Le Bayern en question
Faire le procès de Yann Sommer? C’est peut-être ce que les suiveurs du Bayern font de mieux aujourd’hui faute d’oser le procès du club lui-même. L’institution bavaroise s’est pourtant attiré les foudres de Manuel Neuer lui-même, sorti de sa convalescence pour fustiger le limogeage fin janvier de l’entraîneur des gardiens (Toni Tapalovic, en place depuis 2011), écarté par Julian Nagelsmann. Un entraîneur qui sera limogé fin mars, laissant la place à Thomas Tuchel. Lequel a dû composer, le soir même du 3-0 encaissé à City, avec une bagarre entre deux coéquipiers, Leroy Sané et Sadio Mané. Belle stabilité, belle sérénité!
Pour certains, il n’y aurait donc dans le ciel bavarois que des anges et un seul diable, trop petit, Yann Sommer. Raccourci simpliste qui occulte tous les sauvetages du portier suisse, sa présence, en dépit de sa taille. Même si celle-ci fera toujours débat…