FranceDans les châteaux de la Loire, le coût de l’énergie grimpe dans les tours
Qu’ils soient privés ou publics, les monuments historiques de Chambord ou Cheverny font face à un budget qui explose. À l’approche de l’hiver, ils cherchent des solutions.
«Une fenêtre double vitrage coûte à peu près 10’000 euros, on en a 148.» Qu’ils soient privés ou publics, les châteaux de la Loire (centre-ouest de la France) font face à l’augmentation du coût de l’énergie en essayant de concilier protection du patrimoine et investissement dans les technologies modernes.
À l’approche de l’hiver, le propriétaire du château de Meung-sur-Loire, Xavier Lelevé, s’inquiète pour sa facture de chauffage, gaz et électricité, qui tourne d’habitude autour de 15’000 à 20’000 euros. Mais pas cette année… «Ça va être multiplié entre cinq et dix. Ce n’est pas envisageable d’exploser le budget énergétique de cette manière», se désole-t-il.
Champignons et termites font leur lit de la chaleur
Dans une partie interdite au public de ce château classé aux Monuments historiques, Xavier Lelevé détaille les fenêtres. Certaines sont en très mauvais état et le ruban adhésif sur les boiseries n’offre qu’un rempart très limité face aux assauts du froid. «Une fenêtre coûte à peu près 10’000 euros, on en a 148, donc vous voyez ce que le budget fenêtres peut représenter», explique-t-il.
Charles-Antoine de Vibraye, propriétaire du château de Cheverny, a, lui, choisi de ne rien faire. Et tant pis si la facture grimpe, le succès du monument, inspiration du château de Moulinsart de Tintin, lui permet d’absorber l’augmentation du fioul, dont il consomme 30’000 à 40’000 litres par an.
Le châtelain n’envisage pas non plus d’isolation: «Si vous emprisonnez la chaleur, vous faites du bien aux champignons potentiels et aux insectes qui vont vous bouffer votre bois. Je crois qu’il faut limiter le chauffage au strict minimum pour ne pas contrarier ce cycle sain d’échanges thermiques à l’intérieur d’un monument.»
Une facture de chauffe qui a plus que doublé en deux ans
Non loin de là, Chambord allume ses cheminées. Au pied de l’escalier de Léonard de Vinci, quatre grosses bûches alimentent doucement l’âtre, seule source de chaleur pour le visiteur. Mais les bureaux, boutiques, la quarantaine de maisons du domaine, ainsi que les pavillons forestiers sont chauffés. «La facture a doublé en deux ans. On est passé de 260’000 euros à plus de 600’000 dans le budget prévisionnel 2023», regrette le directeur du Domaine national, Jean d’Haussonville.
Pour le directeur, la montée des prix ne fait qu’accélérer «la réflexion sur les sources vertueuses d’énergie». Chambord a donc rapidement lancé deux études pour se verdir: une sur l’installation de panneaux photovoltaïques sur les toits des hangars techniques, l’autre sur la géothermie et le chauffage par biomasse, histoire de profiter de la forêt. Dès les prochains mois, le domaine entend investir dans sa forêt de 50 km2 en installant une scierie, ouvrant la possibilité à plus long terme d’utiliser son bois pour se chauffer.
La nuit, il fait 8 °C à Chambord
En attendant, le château appartenant à l’État tente dès aujourd’hui de réduire la facture grâce à un système informatique de gestion technique des bâtiments. «C’est un logiciel qui permet par exemple d’éteindre les lumières s’il n’y a plus d’occupant dans une pièce et de réduire le chauffage la nuit à 8 °C», apprécie le directeur. «Nous n’avons aucun doute sur notre capacité à faire 10% de réduction d’énergie dès 2023», assure-t-il.