FootballLes 5 étapes de Granit Xhaka pour atteindre le firmament
Le capitaine de l’équipe de Suisse fêtera sa 118e sélection dimanche (18 heures) contre la Biélorussie. Avant d’égaler le record de Heinz Hermann, il a dû passer par cinq matches mémorables.
- par
- Valentin Schnorhk Saint-Gall
À Saint-Gall, ce dimanche (18 heures), le mercure aura chuté. On aura perdu 10 ou 15 degrés par rapport aux conditions de ces derniers jours. Qu’importe, Granit Xhaka a presque tout connu en équipe de Suisse. Il est le capitaine de tous les vents, de toutes les tempêtes et surtout de tous les succès récents de la sélection nationale. Il est celui qui l’incarne le mieux, et qui peut la porter le plus loin.
Alors, comme toujours, pour défier la Biélorussie, il sera le premier de ses coéquipiers à entrer sur le terrain. Il porte le brassard depuis cinq ans et, à l’époque, personne n’a été étonné, parce qu’il est un leader depuis ses débuts ou presque. C’est en fait naturellement que c’est lui, et pas Xherdan Shaqiri (pourtant un peu plus âgé et présent depuis plus longtemps que lui en sélection), qui s’apprête à effacer le record de Heinz Hermann des tablettes. Dimanche, comme son prédécesseur il y a 32 ans, Xhaka va atteindre les 118 sélections.
Il dépassera vraisemblablement Hermann le mois prochain, avant de porter le futur record sans doute bien plus haut. Avec pas mal d’autres histoires à écrire encore. Mais pour atteindre le firmament, il y a au moins cinq matches-clés qui resteront liés à l’histoire de Xhaka avec l’équipe de Suisse.
4 juin 2011: Angleterre-Suisse, la première
On se rappelle le contexte: l’équipe de Suisse étant tellement mal embarquée dans la campagne de qualifications à l’Euro 2012 (qu’elle manquera), Ottmar Hitzfeld décide d’acter un changement de génération pour le déplacement à Wembley contre l’Angleterre. Avec un benjamin promu titulaire pour sa première sélection: Granit Xhaka n’a pas 19 ans, mais Hitzfeld aligne le joueur du FC Bâle au poste de numéro 10, parce que Gökhan Inler et Valon Behrami sont encore là. La Suisse obtiendra un 2-2 emballant grâce à un doublé sur coup franc de Tranquillo Barnetta.
L’histoire de Xhaka en équipe nationale commence donc ainsi. Pendant trois ans, il jouera en numéro 10, participant à sa première grande compétition pour la Coupe du monde 2014 au Brésil. Et puis, Vladimir Petkovic arrivera à la suite de celle-ci.
11 juin 2016: Albanie – Suisse, le duel fratricide
La prise en main de Vladimir Petkovic amène une rupture. Granit Xhaka est d’abord utilisé dans un rôle plus reculé, mais encore souvent associé à Inler et Behrami. Et puis, début 2016, l’ex-sélectionneur décide de se passer d’Inler. De quoi faire de la place à Xhaka dans un rôle qui lui correspond plus, devant la défense. La Suisse se présente à l’Euro 2016 dans cette configuration.
Avec un premier match forcément particulier, puisque Xhaka, qui n’a jamais caché son attachement au Kosovo et à l’Albanie, même s’il ne possède que le passeport helvétique, doit affronter l’Albanie. Là où évolue en plus son frère Taulant Xhaka. La fratrie s’affronte avec dignité, même si c’est au final la Suisse qui l’emporte 1-0.
L’équipe nationale tombera en 8es de finale, contre la Pologne. Aux tirs au but, Granit Xhaka est le Suisse qui manque sa tentative, en l’envoyant dans les tribunes du stade Geoffroy-Guichard de Saint-Etienne. La déception est énorme.
22 juin 2018: Serbie – Suisse, l’aigle bicéphale
Les années avançant, Granit Xhaka a pris une autre dimension. Si à Arsenal tout n’est pas toujours rose pour lui, il est un joueur qui compte. Toujours titulaire, qu’importe son entraîneur. Et en 2018, il arrive à la Coupe du monde avec des ambitions: notamment celle de mener la Suisse au titre mondial.
Lors du premier match de groupe, contre le Brésil, il est précieux pour résister à la pression auriverde. Arrive alors le deuxième, contre la Serbie et son public particulièrement hostile envers les joueurs d’origine kosovare, Granit Xhaka en tête. Alors quand celui-ci permet à la Suisse d’égaliser d’une magnifique frappe, il ne se prive pas de le leur rendre, avec une célébration langue tirée et aigle bicéphale. Elle sera reproduite après le 2-1 de Shaqiri dans les arrêts de jeu. Ce sont les tripes, le cœur et l’histoire personnelle qui parlent.
Ce ne sera d’ailleurs pas toujours bien compris. En Suisse, on fera à Xhaka & Cie des procès d’identité, mais cela aura eu le mérite de faire le ménage au sein de la communication de l’ASF, où le secrétaire général d’alors, Alex Miescher (lequel voulait priver de formation les binationaux), sera écarté.
Lors du dernier Mondial au Qatar, la Suisse et la Serbie s’affrontent à nouveau, et la Suisse en sort une nouvelle fois vainqueur (3-2), avec une fois de plus un grand Xhaka, malgré les nombreuses provocations auxquelles il a dû faire face sur le terrain. Il le rendra à une reprise, avec un geste obscène en direction du banc et dont il aurait pu se passer.
26 mars 2019: Suisse – Danemark, trop indispensable
C’est après la Coupe du monde 2018 que Vladimir Petkovic renouvelle ses troupes. Behrami, Gelson Fernandes ou Blerim Dzemaili ne font notamment plus partie des plans du sélectionneur. Celui-ci a un objectif: donner toutes les clés à Xhaka. Il lui donne déjà le brassard, profitant de l’absence de Lichtsteiner, et installe un système en 3-5-2 qui correspond parfaitement à son capitaine, qui se régale à organiser le jeu. La Suisse en profite pour se qualifier pour Final Four de la première Ligue des nations.
Viennent ensuite les qualifications pour l’Euro 2020. Après une victoire initiale en Géorgie, la Suisse reçoit le Danemark, autre favori du groupe, à Bâle. Tout se passe parfaitement et l’équipe nationale mène 3-0, Xhaka inscrivant notamment le deuxième but. À la 79e minute, Petkovic choisit de faire souffler son capitaine et le remplace par Djibril Sow.
Et là, tout part en éclats. La Suisse n’a plus de structure, ne parvient plus à garder le ballon et encaisse trois buts. Pas flatteur. Sauf, peut-être, pour souligner l’importance qu’a prise Xhaka dans le jeu suisse. Jamais cela n’avait paru aussi éloquent.
28 juin 2021: France – Suisse, pour l’éternité
Dans l’œil du cyclone, Granit Xhaka l’a presque toujours été. L’Euro 2021, alors que l’Europe n’est pas encore vraiment sortie de la pandémie, est tendu. Tout est prétexte à viser certains membres de l’équipe de Suisse, à commencer par Xhaka, coupable de s’être teint les cheveux en blond. Lui répondra sur le terrain, en étant un acteur majeur de la plus grande performance de l’histoire de l’équipe nationale.
En 8es de finale, contre le champion du monde français, Xhaka est plus que jamais à la baguette. C’est lui qui remotive ses troupes après que la France a inscrit le 3-1. C’est lui qui donne la passe décisive à Mario Gavranovic pour le 3-3. C’est lui qui harangue son groupe quand il le faut, le convaincant plus que jamais qu’il est meilleur que son adversaire, et ce malgré le carton jaune qui le privera de quart de finale contre l’Espagne. Et c’est lui, aussi, qui met en avant son sélectionneur Vladimir Petkovic après la qualification.
Le match d’une vie, qui devait donner espoir. Mais après l’Euro, Petkovic décide de partir. L’ASF nomme Murat Yakin, et entre les deux hommes, le courant a de la peine à passer. Mais dans le jeu, Xhaka, qui n’a sans doute jamais été aussi fort en carrière que ces deux dernières saisons, est intouchable. La Suisse a besoin de lui. Et pour encore un bon moment.