Guerre au SoudanLes deux camps s’accusent de la destruction d’un pont stratégique
Le pont Shambat, qui relie Khartoum-Nord à Omdourman, est en partie effondré depuis samedi matin, alors que le conflit entre l’armée soudanaise et les FSR se poursuit.
Un pont stratégique de la capitale soudanaise Khartoum a été détruit samedi matin, l’armée et les paramilitaires se rejetant mutuellement la responsabilité, près de sept mois après le début de la guerre au Soudan.
Accusations mutuelles
Des témoins ont confirmé à l’AFP la destruction du pont Shambat qui relie Khartoum-Nord à Omdourman, dans la banlieue ouest. Des images circulant sur Internet, et dont l’authenticité n’a pu être vérifiée dans l’immédiat, montrent le pont avec une partie en moins, ainsi que des véhicules, visiblement endommagés, sur la partie du pont encore debout.
L’armée soudanaise, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, a accusé dans un communiqué les «milices rebelles», en référence aux Forces de soutien rapide (FSR), d’avoir «détruit le pont de Shambat tôt ce matin (...), ajoutant un nouveau crime à leur palmarès». Les FSR du général Mohamed Hamdane Daglo ont rejeté ces accusations, affirmant dans un communiqué que «la milice terroriste de Burhane (...) a détruit le pont de Shambat ce matin, croyant pouvoir vaincre nos forces courageuses». «Avec l’effondrement du pont, les FSR ne seront plus en mesure d’acheminer les ravitaillements à leurs forces depuis Khartoum-Nord vers Omdourman, devenue le principal champ de bataille depuis deux semaines», a indiqué à l’AFP un expert militaire.
En août, des frappes aériennes et des tirs d’artillerie de l’armée soudanaise avaient touché le pont. Déclenchée le 15 avril, la guerre entre l’armée et les FSR a fait plus de 9000 morts selon une estimation de l’ONG Armed Conflict Location & Event Data Project (Acled), considérée comme très largement sous-estimée. Elle a aussi déplacé plus de six millions de personnes et détruit la plupart des infrastructures.
Violations des droits humains -
D’intenses combats ont eu lieu au cours de la semaine à Khartoum et dans ses environs, ainsi qu’au Darfour, dans l’ouest du Soudan. Jeudi, des témoins ont déclaré à l’AFP que des cadavres, vêtus d’uniformes militaires, jonchaient les rues d’un quartier de Khartoum, tandis qu’un obus a frappé l’hôpital Al-Nau, dans le nord d’Omdourman, le dernier établissement médical opérationnel de la région, tuant une employée. Mardi, au nord de la capitale soudanaise, un incendie s’est déclaré dans une raffinerie de pétrole contrôlée par les FSR. Les paramilitaires ont attribué cet incendie à une frappe aérienne de l’armée. Cette dernière a déclaré qu’un camion-citerne appartenant aux FSR avait explosé.
Entamé fin octobre, un nouveau round de négociations parrainées par l’Arabie saoudite et les Etats-Unis s’est achevé cette semaine sans aboutir à un accord sur un cessez-le-feu.
Les violences au Soudan frôlent «le mal absolu», a alerté vendredi une responsable de l’ONU, s’inquiétant notamment de «violences qui semblent être basées sur l’appartenance ethnique, au Darfour». «Nous n’arrêtons pas de dire que la situation est horrible et sinistre. Mais franchement, nous sommes à court de mots pour décrire les horreurs qui se produisent au Soudan», a déclaré lors d’une conférence de presse Clémentine Nkweta-Salami, coordinatrice humanitaire de l’ONU dans le pays.