IranNucléaire, économie: les priorités du nouveau président Raïssi
L’ultraconservateur Ebrahim Raïssi succède, mardi en Iran et pour quatre ans, au président modéré Hassan Rohani.
L’ultraconservateur Ebrahim Raïssi sera investi mardi nouveau président de l’Iran et devra s’atteler à redresser une économie minée par les sanctions américaines et la crise sanitaire, et relancer les pourparlers pour sauver l’accord international sur le nucléaire.
Vainqueur de la présidentielle de juin marquée par une abstention record, Ebrahim Raïssi succède au modéré Hassan Rohani, qui avait conclu en 2015 un accord sur le nucléaire iranien avec les grandes puissances, après des années de tensions.
Ancien chef de l’Autorité judiciaire, Ebrahim Raïssi, 60 ans, entamera officiellement son mandat de quatre ans après l’approbation de son élection par le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei.
L’investiture se tiendra à partir de 10 h 30 locales (08 h 00 en Suisse) dans le QG des services du guide suprême dans le centre de Téhéran, selon les médias iraniens. L’ayatollah Khamenei doit y prendre la parole après une courte déclaration du nouveau président, lors d’une cérémonie où, en raison de la pandémie du Covid-19, seul un nombre limité de responsables a été invité.
Ebrahim Raïssi prêtera serment jeudi devant le Parlement, auquel il devra présenter ses candidats pour les postes ministériels.
«Surmonter les épreuves»
La présidence d’Ebrahim Raïssi devrait consacrer la mainmise des conservateurs sur le pouvoir, après leur victoire aux élections législatives en 2020. «J’ai beaucoup d’espoir pour l’avenir du pays», a-t-il déclaré selon un communiqué de son bureau, assurant qu’«il est possible et réalisable de surmonter les épreuves et les limites actuelles» en s’appuyant «sur le peuple» iranien.
Pour Clément Therme, chercheur à l’Institut universitaire européen basé à Florence (Italie), l’objectif «principal» d’Ebrahim Raïssi «sera l’amélioration de la situation économique en renforçant les relations économiques entre la République islamique d’Iran et les pays voisins», mais aussi avec la Russie et la Chine.
En 2018, l’ex-président Donald Trump avait retiré les États-Unis, pays ennemi de la République islamique d’Iran, de l’accord de 2015 et rétabli les sanctions américaines contre Téhéran. En riposte, l’Iran avait renoncé à la plupart de ses engagements clés qui limitaient ses activités nucléaires controversées.
Voie différente
Les sanctions rétablies par Washington ont étouffé l’économie iranienne, mettant notamment un coup d’arrêt à ses exportations pétrolières.
À l’hiver 2017-2018 et de nouveau en 2019, l’Iran a été secoué par des manifestations, sur fond de mécontentement social lié à la situation économique. En juillet, des habitants de la province riche en pétrole du Khouzestan (sud-ouest) ont manifesté contre les pénuries d’eau. La crise économique a été aggravée par la pandémie de Covid-19: le pays est le plus durement touché du Proche et Moyen-Orient.
Lors d’un discours devant le conseil des ministres dimanche, Hassan Rohani a défendu son bilan. «Ce que nous avons fait l’a été dans une situation difficile, conséquence de la guerre économique et du coronavirus, et cette année, la sécheresse s’y est ajoutée», a-t-il indiqué.
Hassan Rohani «a cru qu’il serait capable de résoudre rapidement tous les problèmes du pays», note auprès de l’AFP l’économiste réformiste iranien Saïd Laylaz, conseiller auprès de plusieurs présidents iraniens. Le président sortant a fait preuve d’ «idéalisme» dans sa politique d’ouverture à l’Occident: Ebrahim Raïssi choisira une voie différente, estime-t-il.
Négociations
D’ailleurs, l’ayatollah Khamenei, ultime décideur sur les dossiers sensibles comme celui du nucléaire, a averti encore la semaine dernière que «faire confiance à l’Occident ne fonctionnait pas».
Le successeur de Donald Trump, Joe Biden, a lui affirmé être prêt à revenir à l’accord de 2015, s’engageant dans des négociations indirectes avec l’Iran parallèlement à des pourparlers à Vienne avec les autres parties à l’accord --Chine, France, Allemagne, Russie, Royaume-Uni. Alors que les négociations semblent bloquées jusqu’à l’entrée en fonctions d’Ebrahim Raïssi, ce dernier a d’emblée souligné qu’il défendrait les «intérêts nationaux».
Et, dans un nouvel épisode de tensions avec l’Occident, Washington et Londres ont rejoint Israël en accusant l’Iran d’être derrière une attaque contre un pétrolier géré par un milliardaire israélien en mer d’Oman, qui a fait deux morts le 29 juillet. Les États-Unis ont menacé d’«une réplique appropriée». L’Iran a de son côté nié toute implication, avertissant qu’il répondrait à tout «aventurisme» s’il était pris pour cible.