Hockey sur glaceLe Hallenstadion, c’est bientôt fini, et c’est tant mieux!
Le match de jeudi entre les ZSC Lions et Bienne, en quart de finale des play-off, pourrait être le dernier dans la salle zurichoise, après 72 ans.
- par
- Simon Meier
Si le HC Bienne retrouve la clé, s’impose jeudi soir à Zurich et boucle la série deux jours plus tard, alors ce sera fini entre le Hallenstadion et le hockey sur glace. Si les ZSC Lions franchissent l’obstacle seelandais pour s’avancer vers un printemps glorieux, l’histoire durera quelques jours ou semaines de plus. Mais quoi qu’il arrive, l’auguste salle zurichoise ne recevra plus le puck dès la saison prochaine. Une page de 72 ans d’histoire va se tourner.
Il y a de la nostalgie, bien sûr, quand on repense à ce match contre Arosa (5-5) du 18 novembre 1950, qui fut le premier à être disputé sous toit en Suisse. Sept titres de champion, trois relégations, des pages glorieuses et des tunnels sombres: Zurich et ses supporters ont tout connu entre ces vieux murs, qui sont restés debout tout en perdant un peu de leur âme lors de la réfection de 2004-05. D’un autre côté, pour le dire un peu crûment, on ne regrettera pas de voir le «Z» évoluer dans un autre cadre - la Swiss Life Arena, à Altstetten.
Parce que le Hallenstadion, cette vieille diva sortie de terre fin 1939, ne s’est jamais complètement donné au hockey sur glace.
Frigidaire en fin de vie
Dimanche passé encore, lors du troisième acte de ce quart de finale entre les Lions et Bienne, la salle a parfois ressemblé à un frigidaire en fin de vie. Il y faisait tiède et malgré l’hommage rendu via des banderoles à la salle et son lien avec le club (ce match-là aurait déjà pu être le dernier), aucune émotion palpable n’a parcouru les tribunes. Pendant le match, passionnant malgré l’absence de but, on a vu des saucisses blanchir, des raclettes se figer et des frites s’embourber dans la mayonnaise. Mais des gens se lever de leur siège trop molletonné, très peu. Ici, on vient au spectacle. Ici, on somnole un peu. Jusqu’au moment où tombe le but victorieux de la 89e, même si certains étaient déjà partis.
Plus de 9000 personnes dans la salle et par moments, on entend les mouches voler - tristesse. «Le Hallenstadion, ça peut devenir électrique, mais jamais avant la finale», nous glisse un initié. Dimanche, on ne dit pas que le spectacle valait les 1000 sièges brisés à l’occasion du concert des Rolling Stones en avril 1967. Mais le suspense était total, le match emballant, et le baromètre des émotions en tribunes est resté plat. Il y a bien des vrais supporters au Hallenstadion. Avec leur maillot, leur écharpe, qui donnent de la voix et tapent des mains. Mais ils ne sont pas derrière les buts, proches de la glace, comme dans les autres patinoires. Ils sont relégués dans un coin de balcon, perchés, isolés presque. Le public du Hallenstadion, c’est aussi une affaire de classe(s).
Dalaï Lama et Folies Bergère
De Bob Marley au Dalaï Lama, en passant par Louis Armstrong (unique concert en Suisse en 1959), Madonna et Muhammad Ali, les plus fameux se sont produits entre ces murs de briques claires. Et quand les Folies Bergère y ont effectué leurs premières représentations à l’étranger en 1954, autorités locales et groupements féminins ont veillé à ce que les girls se couvrent un poil plus que d’habitude. Au Hallenstadion, on a des manières. Et quand on y joue au hockey, les «populos», les bruyants et les intempestifs sont rangés au placard.
Bientôt, après le match de jeudi soir contre Bienne peut-être, on ne jouera plus du tout au hockey dans la légendaire salle d’Oerlikon, qui vivra sa vie par ailleurs. Par respect, on versera une larme sur sept décennies. Mais la page qui se tourne permet désormais de nourrir un fol espoir: et s’il y avait un peu d’ambiance aux matches des ZSC Lions, à partir de septembre prochain?