CoronavirusSecteur européen du luxe impatient de récupérer la clientèle chinoise
En Chine, la fin des restrictions de déplacement dues à la pandémie fait saliver les boutiques en Europe, d’autant que les Américains pourraient moins voyager.
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Avec la levée des restrictions de déplacements en Chine, «il va y avoir un retour important de touristes chinois, mais ce sera plutôt au deuxième trimestre», selon un gérant de portefeuille. Et le secteur du luxe en «a besoin».
Getty ImagesLa reprise des voyages des Chinois, avec la fin des restrictions de déplacement, est une bonne nouvelle pour le secteur du luxe, même si celui-ci a réussi à compenser leur absence ces deux dernières années, grâce aux Américains notamment, surpassant même ses résultats d’avant-pandémie. «La réouverture de la Chine est l’un des mégathèmes clés pour le secteur du luxe en 2023», estime la banque RBC, qui revoit à la hausse ses prévisions de croissance du secteur à 11% pour 2023, contre 7% auparavant.
Les marques de luxe ne s’y trompent pas: à l’occasion du Nouvel An chinois, ce dimanche, sous le signe du lapin d’eau, Burberry a créé une collection dont le personnage principal est un lapin, Dior une montre «année du lapin», Chopard deux montres inédites…
«Cette opportunité de reprendre de la clientèle chinoise, il ne faut pas passer à côté. Le secteur a besoin de ce relais.»
Avant la pandémie, la clientèle chinoise représentait «un tiers des achats de luxe dans le monde et les deux tiers de ces achats se faisaient en dehors de la Chine», rappelle Joëlle de Montgolfier, directrice du pôle luxe chez Bain and Company. Le secteur du luxe représentait alors 281 milliards de dollars.
«La révélation européenne»
En 2021, année de reprise où le luxe a surpassé ses ventes d’avant-pandémie, «les Chinois ont consommé, mais uniquement en Chine», selon Joëlle de Montgolfier. Et «en 2022, cela a été beaucoup plus compliqué avec les confinements imprévus dans le pays». Ce qui n’a pas empêché les ventes mondiales du secteur de croître de 22%, «sans les Chinois».
Cette croissance a été soutenue par une très forte présence de la clientèle américaine, un maintien des acheteurs japonais, coréens et du Sud-Est asiatique et «la grande révélation de la clientèle européenne, qui avait été ignorée pendant des décennies et a été plus intéressée par le luxe que prévu», déclare Erwan Rambourg, analyste et auteur de «Future Luxe: what’s ahead for the business of luxury».
Dès le deuxième trimestre
Avec la levée des restrictions de déplacements en Chine, «il va y avoir un retour important de touristes chinois, mais ce sera plutôt au deuxième trimestre», selon Arnaud Cadart, gérant de portefeuille chez Flornoy. «L’épidémie est encore bien présente en Chine et affecte beaucoup de monde.» «Les Chinois vont revenir à partir du mois d’avril», confirme Erwan Rambourg. Et c’est tant mieux. «Cette opportunité de reprendre de la clientèle chinoise, il ne faut pas passer à côté», ajoute Arnaud Cadart. «Le secteur a besoin de ce relais.»
Car les flux touristiques des Etats-Unis et du Moyen-Orient pourraient baisser, l’effet euro-dollar étant moins avantageux. Quant à la clientèle européenne, elle pourrait être freinée par la situation économique et les mouvements sociaux, soulignent les spécialistes du secteur. «Les boutiques européennes ont besoin de cette relance de la clientèle chinoise pour se substituer à la clientèle américaine, qui pourrait consommer plus localement», estime Arnaud Cadart.
«Il va falloir plus de personnel»
Et les marques de luxe en Europe vont devoir se réadapter à cette clientèle chinoise de retour, qui a pour habitude de se déplacer en groupe, et qui s’additionne à une clientèle américaine et locale plus nombreuse qu’avant la pandémie. «Il y a déjà des files d’attente devant les boutiques sans clientèle chinoise, il va falloir plus de personnel», souligne Joëlle de Montgolfier, directrice du pôle luxe chez Bain and Company. Sinon, il risque d’y avoir «une dégradation de l’expérience» d’achat luxe dans les boutiques. «L’autre petite tension, c’est qu’à ce stade, on ne sait pas prévoir» les volumes de marchandises que voudront acheter les clients chinois, relève-t-elle.
Les touristes chinois vont-ils renouer avec leurs destinations historiques de prédilection, à savoir l’Europe et l’Asie? Et pour privilégier des séjours dans quels pays? Les marques devront être «agiles» pour faire face à cette demande, dit Joëlle de Montgolfier.