FootballAprès la qualification, l’heure des choix pour la Suisse
L’équipe nationale ira à l’Euro 2024, malgré le nul 1-1 contre le Kosovo. Mais rien ne plaide pour qu’elle y aille avec Murat Yakin.
- par
- Valentin Schnorhk - Bâle
Cette question-là est réglée. La Suisse sera à l’Euro 2024, et cela permet au moins de faire avancer le débat et la réflexion. Faire 1-1 contre le Kosovo, même en dominant celui-ci, ce n’est pas suffisant. Sur les sept derniers matchs, la Suisse en a remporté deux: les deux contre Andorre.
Les résultats ne plaident pas pour Murat Yakin. Mais ce qui le discrédite, c’est une équipe qui régresse, parce qu’elle semble dire à tous qu’elle veut passer à autre chose. Il n’y a plus aucun projet qui vaille avec ce sélectionneur.
Les trois enseignements
Par souci d’humilité, il s’agit de le dire. L’équipe de Suisse est qualifiée pour son sixième grand tournoi consécutif, et tout autre résultat aurait été un échec. Une fois que cela est rappelé, il faut passer à autre chose.
Comment ne pas voir ce qui saute aux yeux? Soit cette sélection n’a plus aucun repère, soit elle ne veut plus de son sélectionneur Murat Yakin. Le cas échéant, elle ne procéderait pas autrement pour le montrer sans l’exprimer textuellement. De fait, aucun point n’offre plus de perspectives qu’un autre.
Puisque l’essentiel est fait, et qu’importe le match de mardi en Roumanie, une histoire est terminée. La situation n’est pas évidente, mais l’ASF doit désormais procéder à des choix. Et ils doivent être forts.
Le meilleur Suisse: Ruben Vargas
Il est le seul buteur suisse de ce mois de novembre. Pas un hasard complet: malgré le déchet qu’il peut avoir, Ruben Vargas fait en sorte de forcer le destin, d’aller provoquer les défenses adverses.
Souvent isolé sur son côté gauche, il a pu jouir d’une configuration de match qui lui correspondait, en cherchant le un contre un. Parfois un peu répétitif dans ses tentatives, c’est quand il a varié ses courses qu’Ulisses Garcia a enfin trouvé de la liberté pour centrer. Et Vargas en a profité pour marquer.
Le moins bon Suisse: Xherdan Shaqiri
C’était un match spécial pour lui, il l’avait dit: une 118e sélection chez lui à Bâle, contre le Kosovo, son autre patrie. Peut-être dépassé par le moment, ou alors simplement par son manque de forme, Xherdan Shaqiri n’a pas existé. Il n’a eu aucun impact dans le jeu, lui qui doit pourtant être celui qui peut résoudre des situations compliquées.
Pire, il a été le plus souvent à l’envers, à l’image de ses multiples corners qui n’ont rien donné.
La décla’
Le fait tactique: les relations sur les côtés
La Suisse a dominé le Kosovo. Dans les faits, elle aurait largement mérité de gagner, parce qu’elle a eu bien plus d’occasions, dont plusieurs de qualité. La moindre des choses.
En fait, il en aurait fallu plus. Il aurait fallu plus de maîtrise du projet de jeu offensif pour y parvenir. Il aurait fallu plus d’idées quant à la façon de déborder, de prendre à revers cette défense si regroupée. C’était le plan du Kosovo: attendre en bloc bas, avec ce 5-4-1 très compact. Il annonçait la difficulté que la Suisse allait avoir, mais il a aussi été aidé par le manque de relations naturelles sur les ailes.
Le fait de devoir inclure deux nouveaux latéraux (Cömert à droite, Garcia à gauche) pour cette rencontre ne facilitait pas les automatismes. Mais il aurait quand même été souhaitable d’avoir plus d’échanges entre les ailiers et les latéraux, ou avec les milieux relayeurs. Ou, en tout cas, plus de complémentarité dans les échanges et les appels.
À gauche comme à droite, on a surtout pensé à déléguer le rôle du déséquilibre aux ailiers. Cela a bien marché à gauche avec Vargas, beaucoup moins avec Shaqiri. Mais la Suisse en a-t-elle fait assez dans la variété de ses choix? Le fait de n’avoir marqué qu’un seul but ne sert pas l’affirmative.
La relation entre Vargas et Garcia aurait sans doute pu être plus aboutie. Parce que, souvent, le premier cité a considéré que le travail de déséquilibre avait plus de pertinence en un contre un, plutôt qu’en créant un surnombre. Il a plus d’une fois négligé les déplacements de Garcia, soit en ne le servant pas, soit en choisissant de ne pas utiliser son appel pour faire le bon geste.
De l’autre côté, la présence de Cömert n’a rien apporté. Shaqiri n’en avait cure, et il n’a même pensé à l’exploiter, malgré toute la bonne volonté du défenseur central de formation.
Cela raconte surtout l’absence de certitudes offensives, et peut-être même leur déliquescence. Il faut se souvenir qu’au début de la campagne de qualification, contre la Biélorussie, il y avait des triangles qui fonctionnaient (notamment à gauche, avec le trio Rodriguez-Xhaka-Vargas). Ils n’ont pas duré longtemps.
Parce qu’il n’y a plus qu’un seul scénario de jeu avec cette équipe de Suisse: elle s’installe dans le camp adverse, en dépendant du bon vouloir de l’un ou l’autre élément pour créer une action, dans l’espoir qu’une soit finie. Et de toute façon, elle finit toujours par se faire avoir en fin de match.
La statistique
11, comme le nombre de points récoltés en sept matchs par l’équipe de Suisse dans ce groupe de qualification, en ôtant les résultats contre Andorre.
Une moyenne bien basse. Quand même très révélateur d’une campagne catastrophique pour une formation qui devait dominer largement son groupe, à défaut de le survoler. Dans ce groupe, la Suisse a fait plus de matchs nuls (5) que de victoires (4). Voilà, voilà.
Une question pour penser l’avenir
Murat Yakin dirigera-t-il son 30e et dernier match à la tête de l’équipe de Suisse en Roumanie mardi?