EuropeSix mois de guerre en Ukraine et toujours aucun signe de fin
Alors que la guerre en Ukraine atteint son septième mois, peu de signes de progrès sont visibles.
«On doit être préparés au fait que cela pourrait durer longtemps», dit un médecin militaire ukrainien, nom de guerre Doc, posté sur la ligne de front dans le sud de l’Ukraine. «Il y a beaucoup de larmes, beaucoup de sang. Vous pleurez dans votre cœur», ajoute cet homme de 40 ans, un prothésiste dentaire dans la vie civile. «L’histoire de plusieurs générations est en train d’être détruite».
Dans un complexe de bunkers souterrains, entouré d’obstacles antichars rouillés et rempli de chats et de chiens errants, ses camarades se versent des bols copieux de soupe chaude.
En tête de table, est assis un homme sur le bras duquel est tatoué en anglais «Never give up» («N’abandonne jamais»). «Six mois de guerre, ce n’est pas seulement une grande douleur pour le pays, c’est aussi une petite douleur pour chacun personnellement», dit Mykola, un soldat de 41 ans assis à sa gauche. Le commandant adjoint du bataillon, Artem, 30 ans, ne le cache pas: «Nous avons informé nos soldats que le conflit pourrait traîner des années».
La Russie a déclenché son attaque sur l’Ukraine le 24 février, tentant de s’emparer de la capitale Kiev dans une offensive éclair. Mais les forces ukrainiennes ont opposé une résistance farouche, obligeant les troupes russes à la retraite et déplaçant les combats vers le bassin du Donbass, dans l’est du pays, et dans son sud agricole. L’Ukraine, depuis quelques semaines, annonce une contre-offensive dans le sud, retardée, selon Kiev, par la lenteur des livraisons d’armes occidentales.
Interrogé sur ses espoirs pour l’avenir durant une visite à Odessa (sud de l’Ukraine) vendredi, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a fermé les yeux, ralenti ses propos, et évoqué une «situation très difficile, où les perspectives de paix ne sont pas évidentes».
«Détruire tout ce qui est ukrainien»
À Mykolaïv, important centre régional qui comptait presque un demi-million d’habitants avant l’offensive russe, la guerre semble n’avoir plus rien de neuf. Les affiches de soutien aux troupes ont été détrempées par l’hiver, déchirées par les vents du printemps et blanchies par la chaleur de l’été. Les coutures des sacs de sable empilés autour des barrages commencent à se déchirer et des herbes sauvages poussent dans les interstices.
Dans les premières semaines de la guerre, un missile russe s’est abattu sur le siège du gouvernement régional, tuant 37 personnes. Le trou béant toujours visible est maintenant l’une des nombreuses cicatrices de cette ville portuaire, qui demeure la cible de bombardements incessants.
La semaine dernière, l’université d’État Petro-Moguyla de la mer Noire a été frappée deux fois. L’entrée principale a été soufflée, les panneaux du plafond démolis et les fenêtres brisées en morceaux. L’effondrement de la façade laisse à voir les intérieurs des salles de classe.
«Ils attaquent les écoles, les hôpitaux, le port et les infrastructures de la ville», lance le recteur, Leonid Klymenko, depuis une salle d’étude éventrée. «Il est clair qu’ils veulent complètement détruire l’éducation ukrainienne, détruire l’esprit ukrainien, détruire tout ce qui est ukrainien».
Chemin pour la paix
Alors que la guerre atteint son septième mois, peu de signes de progrès sont visibles.
Le mois dernier, l’ONU et la Turquie ont négocié un accord céréalier qui assouplit le blocus russe des ports ukrainiens de la mer Noire, permettant à Kiev de reprendre ses exportations de céréales, cruciales pour de nombreux pays.
Vendredi, Antonio Guterres a visité le port d’Odessa pour observer la mise en œuvre de cet accord, qui semble fonctionner. Mais son voyage a été assombri par des inquiétudes grandissantes autour de la centrale nucléaire ukrainienne de Zaporijjia.
Située à 200 km au nord-est de Mykolaïv, cette centrale, la plus grande d’Europe, est occupée par les troupes russes depuis le début de la guerre et essuie régulièrement des bombardements faisant craindre une catastrophe majeure. «Ce ne sera pas facile de trouver un chemin pour la paix à court terme, mais il faut persister, car la paix est le bien le plus important dans le monde», résume Antonio Guterres auprès de l’AFP.