Pride MonthAux États-Unis, le mois des fiertés terni par les menaces anti-LGBT+
La recrudescence des menaces aux États-Unis ciblant la communauté LGBT+ a jeté un froid sur le mois des fiertés ou «Pride Month», selon des militants, en particulier au sein des États les plus conservateurs du pays.
À Houston, la programmation de la plus grande célébration des personnes LGBT+ du Texas pour le mois des fiertés, en juin, a été largement réduite cette année.
«Nous avons décidé d’annuler le festival», explique Kendra Walker, présidente de l’association Pride Houston 365.
Les festivités se limiteront à une parade qui aura lieu le 24 juin, par mesure de sécurité mais aussi afin d’assurer une meilleure gestion des foules et du budget.
La décision a été prise en janvier, après que le parlement à majorité républicaine de l’État eut adopté plusieurs mesures discriminatoires contre les personnes LGBT+, selon des associations de défense des droits.
Depuis, les menaces se multiplient contre les événements LGBT+.
«Il suffit d’une poignée de personnes qui n’arrivent pas à distinguer mythe et réalité pour que le danger soit là», selon Kendra Walker, citant l’exemple des menaces d’émeutes proférées par des suprémacistes blancs lors de la marche des fiertés dans l’Idaho (nord-ouest des États-Unis) l’an dernier.
«Cela paraît anodin jusqu’à ce que ces propos reviennent aux oreilles de la mauvaise personne… Et là, la menace est bien réelle.»
Désinformation
L’inquiétude se fait également sentir en Floride, dirigée par le gouverneur Ron DeSantis, rival de Donald Trump aux primaires républicaines pour la présidentielle de 2024.
Ce fervent conservateur a poussé ces derniers mois une série de lois visant à restreindre les droits des personnes LGBT+, interdisant notamment d’évoquer les questions d’orientation sexuelle à l’école.
«Je n’avais pas réalisé à quel point cela bouleverserait» notre État, souligne Carrie West, à la tête du groupe Tampa Pride, qui en mai dernier a finalement décidé d’annuler un festival après que plusieurs sponsors de l’événement se sont inquiétés d’enfreindre les nouvelles mesures du gouverneur.
Outre en Floride et au Texas, de telles mesures se multiplient à l’échelle du pays, provoquant un torrent de désinformation en ligne.
Des publications associant la communauté LGBT+ à la pédocriminalité et au satanisme ont amassé des milliers d’interactions sur les réseaux sociaux ces dernières semaines, en partie grâce à leur amplification par des éditorialistes conservateurs.
Les appels à boycotter les marques jugées trop «woke» ont également ciblé de nombreuses grandes enseignes américaines, comme Target, coïncidant avec la promotion de leur «Pride» collection.
«Plus en sécurité»
Dans la ville de Saint Cloud, en Floride, le comité local chargé des festivités de la «Pride» a annoncé l’annulation de son événement dans un État où règne «un climat de peur» selon ses organisateurs. L’ONG Equality Florida a aussi publié un avis prévenant les voyageurs des risques potentiels pouvant toucher les personnes LGBT+ dans l’État.
Les artistes drag «ne se sentaient plus en sécurité», confie Kristina Bozanich, photographe, à la tête de l’événement à Saint Cloud.
«Alors que nous réfléchissions à ce que nous pouvions faire à la place d’un drag show, des panneaux «Tuez tous les homos» sont apparus dans la région», dit-elle.
À Port Sainte-Lucie, plus au sud, une parade a, elle aussi, été annulée en avril.
«J’ai écrit au sujet de notre événement sur une de nos pages Facebook habituelles et des personnes ont commencé à commenter, parlant de «trafic d’enfants», explique PJ Ashley de l’ONG Sanctuary of The Treasure Coast.
Selon RG Cravens, expert à l’ONG Southern Poverty Law Center, il est courant que les adeptes des théories du complot utilisent des fausses accusations de pédocriminalité pour «justifier la discrimination et la violence».
Des études montrent que la tolérance envers la communauté LGBT+ a progressé depuis les débuts du mouvement mais les plus anciens «ont l’impression de retourner en arrière», note PJ Ashley.
«Ils ont peur de s’exprimer» sur ces questions. «C’est vraiment un retour aux années 1960… Il semblerait que tout ce pour quoi ils se sont battus à l’époque, nous en sommes en train de le perdre aujourd’hui.»