Football: Et si Paolo Tramezzani avait trouvé la solution pour intégrer Mario Balotelli?

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FootballEt si Paolo Tramezzani avait trouvé la solution pour intégrer Mario Balotelli?

Le 3-5-2 utilisé par l’entraîneur du FC Sion contre Lucerne samedi a coïncidé avec la meilleure performance de l’Italien. Décryptage de l’approche, qui a eu ses failles.

Valentin Schnorhk
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Valentin Schnorhk

Parfois, l’adversité se veut créatrice. Elle stimule la réflexion, et fait émerger les meilleures idées, celles qui guident par la suite. Et d’autres fois, elle ne fait que refléter la contrainte, ne soulignant que le caractère provisoire de l’idée en question. On saura assez vite si le 3-5-2 pensé par Paolo Tramezzani pour défier Lucerne samedi fera office de trame pour les prochains matches du FC Sion.

Paolo Tramezzani a peut-être trouvé la formule qui convient le mieux à Mario Balotelli et à ses coéquipiers.

Paolo Tramezzani a peut-être trouvé la formule qui convient le mieux à Mario Balotelli et à ses coéquipiers.

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L’entraîneur italien a en tout cas affirmé qu’il n’était pas lié à Mario Balotelli, mais qu’il était forcé par les événements (les absences de Lavanchy et Cavaré). Le fait est qu’il a coïncidé avec une victoire et à la meilleure prestation de Balotelli depuis son arrivée en Valais. De quoi suffisamment satisfaire le Mister et retenter l’expérience mardi (20h30) à Winterthour? Pas sûr. Décryptage.

Le plan

Il y a certains signes qui ne trompent pas. Il y avait dans le plan échafaudé par Tramezzani une légère impression de bricolage. Parce que le fait d’aligner Giovanni Sio à un poste d’extérieur (terme préférable à celui de «piston» pour désigner ce poste, en référence à la largeur que le rôle induit) n’est pas forcément naturel. Même si, pour lui donner de la pertinence, il y avait forcément une intention d’asymétrie dans l’animation.

Autrement dit, avec Joël Schmied pour le couvrir, Sio devait pouvoir bénéficier d’une certaine liberté sur le couloir droit, là où Baltazar devait plus incarner une fonction un peu plus conservatrice de l’autre côté. L’objectif étant de former une ligne de quatre par séquences, en suggérant à Baltazar de fermer l’intérieur pendant que Schmied coulissait sur le couloir.

C’est même avec ballon que le schéma s’est concrétisé le plus souvent. Notamment dans les sorties de balle depuis Heinz Lindner. Classique des défenses à trois ou à cinq, Sion est reparti à quatre, avec Saintini et Moubandje pour entourer le portier autrichien, alors que Baltazar et Schmied offraient de la largeur. De quoi permettre à Sio d’être plus haut. Même si, sur ces phases de jeu, les Valaisans n’ont pas souvent trouvé la solution pour éliminer le bloc haut lucernois, haut et très orienté sur le ballon. Les mouvements (décrochages et dézonages) ont parfois représenté la solution à exploiter.

Plus globalement, en phase offensive, ce 3-5-2 devait offrir du contrôle à Sion, parce qu’il permet d’occuper au mieux la largeur. Contourner le bloc lucernois était alors plus simple (aussi en permettant à Schmied de monter lorsque le couloir droit s’ouvrait), et la couverture amenée par les trois défenseurs centraux plus à même de prévenir la perte de balle. Les Sédunois ont ainsi pu avoir des séquences d’installation dans le camp adverse, avec des récupérations de balles hautes. C’est sur une action placée dans la moitié lucernoise qu’ils ont ainsi pu ouvrir le score, grâce à un appel de Musa Araz qui a fait reculer la défense adverse et offert de la liberté à Balotelli.

Le 3-5-2 permet de s’installer dans le camp adverse, avec une occupation du terrain avec ballon équilibrée. Face au losange lucernois, la largeur était même exploitable pour Schmied, qui a plusieurs fois pris le couloir droit depuis son poste de défenseur central droit pour apporter le surnombre.

Le 3-5-2 permet de s’installer dans le camp adverse, avec une occupation du terrain avec ballon équilibrée. Face au losange lucernois, la largeur était même exploitable pour Schmied, qui a plusieurs fois pris le couloir droit depuis son poste de défenseur central droit pour apporter le surnombre.

Autre aspect du plan de jeu de Tramezzani: le bloc médian. Avec Balotelli dans ses rangs, le pressing continu est difficile. L’idée d’être actif en zone médiane est plus légitime. Ainsi, Sion a laissé Lucerne relancer et progresser jusqu’en zone 2. Là, la formation valaisanne avait pour intention d’être agressive sur les couloirs avec Baltazar et Sio et orientée sur l’homme à l’intérieur du jeu, avec des marquages très individuels des relayeurs du losange lucernois (Dorn à gauche et Beloko à droite).

Les failles

Sauf qu’en phase défensive, le plan de jeu imaginé a vite été mis à mal par les adaptations lucernoises. Surtout parce qu’il a été difficile de tenir le bloc médian. La première ligne Balotelli-Stojilkovic a été facilement éliminée par la défense centrale Simani-Burch, parfois aidée par Jashari. Conséquence immédiate: les centraux lucernois pouvaient avancer balle au pied sans être cadrés, contraignant le bloc sédunois à reculer.

Une des failles de l’approche de Tramezzani. Le bloc défensif sédunois a eu tendance à reculer face aux montées des défenseurs centraux lucernois. Ici, Burch avance en conduite. Musa Araz se force à sortir sur lui, oubliant Pius Dorn qui a dézoné dans son dos. Ce dernier n’est pas couvert puisque Giovanni Sio oublie de défendre le couloir, alors que Joël Schmied est fixé dans l’axe par Chader.

Une des failles de l’approche de Tramezzani. Le bloc défensif sédunois a eu tendance à reculer face aux montées des défenseurs centraux lucernois. Ici, Burch avance en conduite. Musa Araz se force à sortir sur lui, oubliant Pius Dorn qui a dézoné dans son dos.
Ce dernier n’est pas couvert puisque Giovanni Sio oublie de défendre le couloir, alors que Joël Schmied est fixé dans l’axe par Chader.

Et puis, les mouvements des milieux de Mario Frick ont passablement désorienté et désuni ceux de Tramezzani. À l’image d’un Pius Dorn qui s’est toujours arrangé pour attirer Musa Araz dans des zones périphériques, libérant des espaces dans l’axe.

Exemple similaire ici, où les oublis de Sio sont mis en exergue: il est focalisé sur le ballon et ne défend pas ce qui se passe derrière lui.

Exemple similaire ici, où les oublis de Sio sont mis en exergue: il est focalisé sur le ballon et ne défend pas ce qui se passe derrière lui.

Des déplacements qui ont mis en exergue le point faible de l’approche sédunoise: le dos de Giovanni Sio. Ce n’est pas un hasard que les appels de Dorn aient été effectués dans le couloir du Français. Sio plutôt focalisé sur ce qui se passait devant lui, Araz incertain entre la nécessité de suivre Dorn ou le besoin de couvrir l’axe et Schmied fixé à l’intérieur par les attaquants, Sion a souvent offert une zone exploitable à Lucerne, que ce dernier n’a pas su suffisamment utiliser (malgré son passage en 4-2-3-1 après la pause). En aurait-il été de même avec Numa Lavanchy?

Balotelli, l’homme qui valide

Paolo Tramezzani l’a donc assuré: «Le changement de système n’était pas fait pour intégrer Mario Balotelli.» Si cela avait été le cas, alors la réflexion aurait été légitime et l’opération validée par la prestation de l’Italien. Parce que le 3-5-2 avait cet avantage de pouvoir associer l’attaquant de 32 ans à Filip Stojilkovic (et sa capacité à peser sur une défense tout en faisant des courses vers l’avant), tout en conservant un milieu à trois, qui autorise une certaine mobilité à Araz, Grgic & co.

Sion a donc conservé ses atouts dans le jeu offensif, tout en offrant à Balotelli la liberté qu’il s’arroge de fait. Ce dernier ne touche pas de ballons dans la surface. Ce n’est plus son jeu: ce n’est arrivé qu’à quatre reprises depuis sa signature à Sion. Il décroche donc beaucoup, dézone aussi quand il le souhaite et demande constamment le ballon. La présence de Stojilkovic et les appels de ses partenaires lui offrent plus de liberté.

L’ensemble des 17 passes reçues par Mario Balotelli samedi. Aucune ne l’a été dans la surface lucernoise. (Les ronds bleus font référence aux ballons conservés, les croix aux ballons perdus)

L’ensemble des 17 passes reçues par Mario Balotelli samedi. Aucune ne l’a été dans la surface lucernoise.

(Les ronds bleus font référence aux ballons conservés, les croix aux ballons perdus)

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Contre Lucerne, il y a conjugué une justesse technique et tactique. Dans divers domaines: l’orientation en une touche lorsqu’il a été touché à l’intérieur, l’exploitation de la largeur lorsqu’on l’a trouvé sur le côté, la capacité à voir vite lorsqu’il s’est trouvé face au jeu et sa spontanéité sur les transitions, en profitant des appels de ses coéquipiers. La clé: sa capacité à limiter les touches, là où il avait souvent pu exaspérer lors de ses précédentes sorties. Et puis, bien sûr, son habileté à déclencher soudainement une frappe. Son but donne du crédit au projet.

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