FootballWilliam Le Pogam: «J’ai envie de rendre aux autres»
Capitaine d’un Yverdon Sport surprenant 6e de Super League, le défenseur français entame sa quatrième saison dans un Nord vaudois qui lui donne «beaucoup d’amour».
- par
- Jérémy Santallo
William, franchement, c’est quoi le secret d’Yverdon?
(Rires) Il n’y a pas de recette miracle! La réussite de notre succès, c’est l’ADN de ce club, qui se veut familial et sait très vite mettre à l’aise les nouveaux joueurs, qui s’intègrent rapidement au vestiaire, aux systèmes de jeu et à la ville. C’est ce qui fait notre force.
On a lu dans «Blick» que ça parlait plusieurs langues dans le vestiaire. Concrètement, ça donne quoi?
On utilise surtout l’anglais, car c’est la langue universelle, que tout le monde parle plus ou moins bien. Après, on s’adapte. On a un Brésilien dans l’équipe qui ne parle ni français ni anglais, donc on s’adresse à lui en portugais ou en espagnol. Tout le monde fait l’effort d’essayer de comprendre l’autre, par des gestes, par les mots, par l’accent (sourire). C’est marrant de voir que chacun y met du cœur et forcément, cela amène à des scènes cocasses! Ça montre notre mentalité, notre ouverture d’esprit. Nous, les anciens, on fait tout pour qu’ils se sentent bien. Et eux, les nouveaux, essaient d’apprendre la langue et de s’intégrer au plus vite.
Dans le vestiaire, vous êtes le genre de coéquipier à mettre la main sur l’épaule du nouveau pour lui demander s’il a bien dormi?
C’est exactement ça. Plus jeune, j’ai eu la chance que des anciens le fassent pour moi. Je pense à Nuzzolo à Neuchâtel ou à Sauthier, Cadamuro et Alphonse à Servette. Je ne suis pas originaire du canton de Vaud ou d’Yverdon, mais on m’a bien accueilli et on me donne beaucoup d’amour. Maintenant, j’ai envie de rendre aux autres. Et si le joueur est bien dans sa vie privée, il sera au top sur le terrain.
En dehors des vestiaires et du foot, vous vous retrouvez pour renforcer cette cohésion?
Oui, nous sommes allés jouer au golf de Vuissens un après-midi. Après, on propose des choses simples: un café, un dîner, même si évidemment on ne le fait jamais à trente. Ces dernières années, on a pris l’habitude pendant la trêve internationale de se faire une sortie. Et les soirées, ça renforce les liens. Je ne vais pas mentir (sourire).
Marco Schällibaum, c’est un monstre tactique ou un meneur d’hommes de génie?
Je dirais que c’est avant tout un grand meneur d’hommes. Il protégera toujours ses joueurs. Il est fort dans ses discours, qui sont toujours motivants. Il y met beaucoup de passion. Je l’avais dit après la défaite en Coupe de Suisse à Rapperswil. Lorsque ça ne va pas, sa colère est à la hauteur de l’amour qu’il nous donne. (Il marque une pause) On en prend plein la gueule, sans qu’il ne bascule dans la vulgarité. Après, tactiquement, vous avez pu le voir, il sent bien les choses aussi. Il a changé de système le week-end passé et on a gagné contre St-Gall. La saison dernière, on est passé en losange à Aarau et on a gagné aussi. Il sait s’adapter.
Quand vous repensez à YS lors des matches de préparation et que vous regardez le classement actuel, il faut vous pincer pour y croire?
Oui, je suis surpris car on reste un promu. On n’est pas le Lausanne-Sport avec INEOS derrière et un stade à 12’000 places (rires). Nous ne sommes pas un grand club du pays, et c’est notre retour en Super League, donc on a le droit d’être surpris. Il y a eu beaucoup de départs pendant la préparation, des personnes avec qui j’étais très lié, avec qui j’ai été champion et vécu une année superbe, peut-être la plus belle de ma carrière. On a dû annuler un match amical parce qu’on était en sous-effectif, les recrues sont arrivées à une semaine du début de saison, certains sortaient de vacances et n’avaient pas eu de préparation. J’étais en plein doute alors que je venais de prolonger. Aujourd’hui, il faut encore ajuster les choses pour que les automatismes dans le jeu soient plus fluides. On n’est pas encore à notre potentiel maximal.
Donc Yverdon qui carbure à plein régime, ça vise la place de leader?
Non, peut-être pas quand même (rires). Au début, ce n’était pas très beau à voir. Nous étions une équipe en reconstruction, mais la chance que l’on a eue, c’est de faire des points. On bat Lausanne, on accroche YB et on bat Servette. Si ça se trouve, au moment où on récitera notre meilleur football, on perdra des matches. C’est difficile à analyser. Être le Petit Poucet, ça nous va bien, car on surprend l’adversaire et on joue sans pression. Là, peut-être que les autres équipes vont plus nous attendre et que ça sera plus compliqué pour nous.
En Challenge League, vous étiez l’un des meilleurs joueurs, si ce n’est le meilleur du groupe. Comment jugez-vous votre adaptation à l’élite du football suisse?
Je suis plutôt satisfait. Sur mes deux ou trois derniers matches, c’était bien. Mon début de saison a été l’image de l’équipe: je n’étais pas très offensif, je préférais assurer mes arrières. Je suis dans une phase de découverte de la Super League parce qu’avec Neuchâtel Xamax (ndlr: saison 2018/2019), j’avais eu pas mal de pépins et joué une poignée de matches seulement. Mais disons que dans l’ensemble, c’est pas mal pour un début.
Ce samedi (18 h), contre un Grasshopper mal en point, vous ne devez pas perdre?
Oui, il y a de la pression. C’est un match piège. On a vu à la vidéo la qualité de cette équipe, qui est dans une spirale négative. Un gros match chez nous peut les relancer et YB n’a gagné que 1-0 contre eux. Il ne faut trop se fier au classement et à nos dix points d’avance sur GC. Je pense que cela va être le match le plus compliqué depuis que l’on a retrouvé le Stade municipal.
Quand on a réussi à accrocher le bon wagon pour être à 4 points du leader, il y a la tentation de viser encore mieux, non?
Entre nous, comme aujourd’hui (ndlr: vendredi) à l’entraînement, on ne regarde pas au-dessus. On sait qu’il y a de meilleures équipes que nous qui ne sont pas à leur place. Bâle et Servette ont un meilleur effectif et si les machines se mettent en route, ils nous dépasseront logiquement. L’objectif, c’est déjà de faire les points pour se maintenir. Ce serait déjà beau pour une première saison. Et si on fait mieux, ce sera du bonus.