Dette américaineLa Maison-Blanche n’envisage pas de passage en force constitutionnel
«Cela ne résoudrait pas le problème que nous avons en ce moment», a déclaré, mardi, Karine Jean-Pierre, alors que les négociations sur le relèvement du plafond de la dette américaine se poursuivent.
Tandis que le compte à rebours s’égrène avant une possible banqueroute des États-Unis, les équipes de Joe Biden et les négociateurs du camp républicain ont de nouveau cherché, mardi, sans succès dans l’immédiat, un délicat compromis budgétaire.
«Chacun des deux camps doit comprendre qu’il n’aura pas tout ce qu’il veut. Nous essayons d’arriver à un budget raisonnable et soutenu par les deux partis», a dit la porte-parole de la Maison-Blanche Karine Jean-Pierre. Elle a précisé que les négociateurs républicains et démocrates, après avoir déjà travaillé jusqu’à tard lundi soir, s’étaient de nouveau réunis pendant plusieurs heures mardi, et indiqué que Joe Biden serait informé de l’état des discussions.
Même si le temps presse avant le 1er juin, date à laquelle pourrait intervenir un défaut de paiement américain inédit et périlleux, l’Exécutif n’entend pas passer en force en invoquant le 14e amendement de la Constitution. Ce texte interdit de «remettre en question» la solvabilité de la première puissance mondiale. «Cela ne résoudrait pas le problème que nous avons en ce moment», a-t-elle dit à propos de cette stratégie évoquée récemment par le président américain.
Elle consisterait à émettre de nouveaux emprunts sans se soucier du «plafond de la dette», objet de toutes les discussions du moment. Le Congrès doit absolument l’augmenter rapidement pour éviter la banqueroute, qui pourrait selon le Trésor américain arriver dans neuf jours.
Panique
Le gouvernement fédéral se retrouverait alors plus ou moins rapidement incapable de payer certains fonctionnaires, de verser certaines prestations sociales et de rembourser certains créanciers. S’ensuivraient, selon les économistes, une panique financière et une récession massive, avec un effet de contagion à l’échelle mondiale.
Pour voter en faveur d’un plafond d’endettement plus élevé – il est pour l’heure de plus de 31’000 milliards de dollars –, les Républicains exigent un effort budgétaire. Les Démocrates emmenés par Joe Biden sont eux aussi favorables à une réduction du déficit. Problème: chaque camp a des idées opposées sur la manière d’y parvenir.
La Maison-Blanche voudrait taxer davantage les plus riches et les grandes entreprises, sans toucher aux prestations sociales ni aux immenses projets d’investissement du président. En clair, augmenter les revenus de l’État fédéral. Les conservateurs, eux, voudraient plutôt tailler dans la dépense publique.
Le patron républicain de la Chambre des représentants Kevin McCarthy, qui est le principal adversaire de la Maison-Blanche sur ce dossier, a estimé mardi que les conservateurs étaient «les seuls à avoir fait quelque chose» pour éviter un défaut de paiement, en présentant un projet budgétaire de rigueur.
2024
Le compromis, selon la presse américaine, pourrait être trouvé sur quelques postes budgétaires ciblés, dans une réaffectation de fonds destinés à lutter contre la pandémie de Covid-19, et via un gel de certaines dépenses, dont la durée est âprement discutée. Le temps presse d’autant plus qu’il ne s’agit pas seulement, pour Joe Biden et Kevin McCarthy, de se mettre d’accord entre eux. Il faudra encore que le compromis trouvé soit validé par le Congrès.
Les Démocrates ne contrôlent le Sénat que d’une courte tête, tandis que les Républicains n’ont que quelques sièges de majorité à la Chambre. Or les sénateurs progressistes, côté démocrate, et les élus trumpistes, côté républicain, ont déjà donné de la voix pour exiger de leurs dirigeants respectifs la plus grande fermeté.
Un défaut de paiement pourrait changer la face de la campagne pour la présidentielle de 2024. Joe Biden, qui à 80 ans brigue sa réélection, peine pour l’heure à enthousiasmer l’opinion avec ses promesses de prospérité et de justice sociale. Une récession plomberait sa candidature. L’ancien président Donald Trump, favori de la primaire républicaine, appelle pour sa part son camp à ne surtout pas «plier» face à la Maison-Blanche dans le dossier de la dette.