CommentaireLa surenchère de l’UDC contre les drag-queens
Sous prétexte de vouloir protéger les enfants du «wokisme», l’UDC genevoise veut leur interdire des lectures de contes. Absurde.
- par
- Eric Felley
«Pour plus de liberté, votez UDC!» martèle le slogan du parti. Et pour moins de liberté, votez aussi pour l’UDC… Depuis quelques mois, les questions de genre tarabustent les élus du parti. Ils ciblent notamment les lectures de contes faites aux enfants par des drag-queens. Jean-Luc Addor (UDC/VS) a même interpellé à ce sujet le Conseil fédéral en juin dernier. Ce dernier lui a répondu brièvement que les bibliothèques étaient libres de programmer ce qu’elles voulaient.
Mais la section UDC de Genève ne l’entend pas de cette oreille. Elle veut défendre au Grand Conseil une motion pour interdire «la participation de mineurs de moins de 16 ans aux lectures, spectacles et autres représentations publiques ou privées animés par des hommes travestis en femmes». C’est large. Avec ce type d’interdiction, on se croirait plutôt en Iran que dans la Genève internationale des droits humains. Mais pour l’UDC et sa conseillère nationale Céline Amaudruz (UDC/GE), il s’agit de lutter contre le «wokisme», qui se cache insidieusement dans ces lectures peuplées de gentils hermaphrodites politisés.
Discrimination
Cela dit, ne s’appliquant qu’aux hommes, la disposition proposée par l’UDC est contraire à l’article 8 de la Constitution fédérale sur l’égalité et à sa loi, art. 3: «Il est interdit de discriminer les travailleurs à raison du sexe, soit directement, soit indirectement, notamment en se fondant sur leur état civil ou leur situation familiale…» Or, pour certains, Drag Queen est un métier de scène comme un autre.
Ensuite, la proposition est absurde. En visant les «hommes travestis en femmes». l’UDC oublie qu’une femme peut tout aussi bien se déguiser en drag-queen (on y verrait que du feu) et raconter les mêmes histoires à rêvasser qu’un homme. À moins d’aller contrôler sous chaque jupon, il faudrait donc aussi interdire les femmes travesties en femmes!
Et les étrangers?
On l’a compris, l’UDC cherche à censurer un contenu qu’il juge politique et qui ne lui convient pas. Mais aujourd’hui, s’il fallait protéger les mineurs de moins de 16 ans, il faudrait plutôt les préserver des annonces de l’UDC dénoncées par la Commission fédérale contre le racisme pour leurs incitations xénophobes. Éduquer nos enfants dans la peur de l’étranger est-il pertinent pour les aider à créer du lien social? Probablement beaucoup moins que lorsqu’ils sont assis en rond à écouter des fables.