Roland-Garros 2023Débat: sans Nadal, le tournoi est-il plus ouvert que jamais?
Nos deux envoyés spéciaux se renvoient la balle, alors que le coup d’envoi du Grand Chelem parisien est donné ce dimanche.
- par
- Jérémy Santallo Paris ,
- Daniel Visentini Paris
N’en déplaise à John McEnroe, ce Roland-Garros s’annonce bien grand ouvert, comme jamais il ne l’a été depuis vingt ans. Comment pourrait-il en être autrement, alors que l’homme qui a fait sienne la Porte d’Auteuil 14 fois n’est plus là que par sa statue ou les affiches des panneaux publicitaires aux arrêts de bus?
Novak Djokovic a beau penser que le tennis en Grand Chelem est un autre sport, il ne surfe pas sur une vague de confiance. Le Serbe n’a gagné aucun tournoi sur terre battue, vaincu par Musetti (Monte-Carlo), Lajovic (Serbie) et Rune (Rome), et a zappé Madrid en raison de ce coude droit douloureux. Difficile de faire pire comme préparation.
Titré à Barcelone puis Madrid, Carlos Alcaraz est l’autre favori que tout le monde voit gros comme une maison et ça tombe sous le sens. Mais à Rome, il nous a prouvé qu’il pouvait connaître un jour sans (Marozsán). N’oublions pas aussi qu’il avait failli se faire piéger par Ramos-Vinolas – service pour le match – l’an dernier.
Voilà les raisons d’y croire pour la meute des poursuivants. Sacré à Rome pour la première fois de sa carrière sur terre battue, Daniil Medvedev joue le tennis de sa vie sur une brique pilée qu’il ne déteste plus. Toujours placé mais jamais gagnant, Stefanos Tsitsipas aimerait enfin être détesté pour de bonnes raisons et Holger Rune, finaliste à Monte-Carlo et au Foro Italico, a donné récemment le sentiment de grandir.
Ajoutez à ça le finaliste sortant Casper Ruud, la pépite Jannik Sinner et bienvenue dans le Roland-Garros le plus illisible du XXIe siècle.
La belle affaire: parce que Rafa Nadal, blessé, a jeté l’éponge cette année, Roland-Garros 2023 deviendrait comme par miracle la terre de tous les possibles? Soyons sérieux. D’accord, le monstre qui a bâti sa légende ici, à Paris, en raflant 14 fois le trophée, laisse un immense vide. Mais cet appel d’air ne va pas aspirer n’importe qui pour combler l’espace. En fait, c’est tout le contraire.
Si la nature a peur du vide, il le lui rend bien. Un monstre chasse l’autre, c’est la vérité qui persiste, toujours. En 2021, Novak Djokovic a manqué d’un rien la saison parfaite, craquant en finale de l’US Open face à Medvedev alors qu’il s’était déjà imposé à Melbourne, à Paris et à Londres. Le monstre est là, il vient d’ailleurs d’égaler en janvier Nadal avec 22 victoires en Grand Chelem, après son succès à l’Open d’Australie.
Dans l’imaginaire collectif, il y a aujourd’hui, forcément, l’idée d’une fin de règne: Nadal est usé et absent, Federer a déjà raccroché ses raquettes. Tout dit la nostalgie d’une ère qui s’achève, tout, jusqu’à cette certitude dont il faudrait se bercer: après eux, le déluge, la foire d’empoigne. Les patrons ne sont plus là? N’importe qui peut réclamer le trône. Balivernes! Le trône est déjà occupé. Novak Djokovic est là. Il va gagner cette édition de Roland-Garros, devenant le seul avec 23 titres en Grand Chelem. Ce tournoi n’est pas ouvert aux quatre vents. Il a déjà son favori, Djokovic.
On pourrait lui associer le jeune Carlos Alcaraz, comme potentiel vainqueur en puissance. C’est vrai. Mais cela ne fait toujours que deux immenses favoris. Pour le grand brassage, on attendra encore…
Qui va gagner le tournoi parisien?