terrorismeTensions entre l’Iran et l’UE autour des Gardiens de la Révolution
Téhéran a promis des «conséquences négatives» en cas d’ajout de l’armée idéologique de la République islamique à la liste des organisations terroristes.
L’Iran a mis en garde jeudi les Européens contre l’éventuelle intégration des Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique de la République islamique, à la liste des organisations terroristes, comme le souhaite le Parlement européen. Téhéran a averti qu’une telle décision aurait des «conséquences négatives», alors que les sujets de friction avec l’Union européenne (UE) se multiplient depuis plusieurs mois sur fond de mouvement de contestation dans le pays et de guerre en Ukraine.
Craintes d’une escalade
Cette tension est susceptible de franchir un nouveau palier si l’UE se rangeait à l’avis d’une majorité d’eurodéputés qui lui ont demandé de qualifier le Corps des Gardiens de la Révolution (CGRI) d’«organisation terroriste», comme l’ont fait les États-Unis en 2019. In fine, la décision -complexe à mettre en œuvre juridiquement - revient au Conseil européen, seul habilité à appliquer des sanctions. Certains États membres s’y sont déclarés favorables tandis que d’autres se montrent plus prudents. Un quatrième paquet de sanctions contre l’Iran sera au menu de la prochaine réunion des ministres des Affaires étrangères le 23 janvier.
Décision «émotionnelle»
La prise de position des eurodéputés est «inappropriée» et basée sur «une approche émotionnelle», a dénoncé le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir Abdollahian, au cours d’un échange téléphonique avec le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell. Pour lui, l’UE «se tirerait une balle dans le pied» en plaçant sur sa liste noire le CGRI, considéré par les experts comme étant la force militaire et sécuritaire la plus puissante de l’Iran.
«Le CGRI est une institution officielle et souveraine qui joue un rôle vital pour assurer la sécurité nationale de l’Iran et de la région, en particulier dans la lutte contre le terrorisme», a expliqué le ministre. Le placer sur la liste noire «affecterait la sécurité, la tranquillité et la paix», a renchéri l’état-major de l’armée. En affirmant que, sans l’engagement des Gardiens, «les gouvernements européens seraient sous le contrôle de Daech», le groupe État islamique actif notamment en Syrie et en Irak.
Omniprésent
Créés en 1979 après la victoire de la révolution contre le pouvoir du Chah, les Gardiens («Sepah-é Pasdaran» en persan) disposent de forces terrestres, navales et aériennes avec des effectifs évalués à plus de 120’000 hommes. Parmi les rôles dévolus aux Gardiens figurent la sécurité du Golfe et du détroit d’Ormuz, par où passent de nombreux pétroliers, et la gestion des programmes de développement balistique.
La résolution adoptée par le Parlement européen souligne explicitement que les forces Qods - qui interviennent hors des frontières - et la milice Bassidj, toutes deux affiliées au CGRI, doivent être inscrites sur la liste noire. Et il réclame l’interdiction de «toute activité économique ou financière» avec les nombreuses entreprises contrôlées directement ou indirectement par les Gardiens.
Dans l’amendement adopté mercredi, les eurodéputés mettent en cause le CGRI dans «la répression des manifestants» mobilisés contre le pouvoir depuis la mort le 16 septembre de Mahsa Amini, mais aussi pour «la fourniture de drones à la Russie» dans le cadre de la guerre en Ukraine.